Dracula - Chapitre II

 

 

 

Heureusement que mon postérieur est bien assis sur ce fauteuil, car cette nouvelle me fait tomber à la renverse. Je suis littéralement sur le cul. Un rencard ? Comme un rendez-vous ? Et avec un mec de son lycée ? Juste tous les deux ? En tête à tête ? Bon sang non, je ne suis pas d'accord ! 

 

 Oh, c'est super ma chérie, s'enthousiasme Anne.

 

Ébahi, je la dévisage. Non, ce n'est pas super du tout ! Amé n'est pas en âge de fréquenter un garçon, bon sang. Il va abuser de sa gentillesse et de sa naïveté. Je suis persuadé que ce mec est un loup qui voit ma douce Amé comme le petit chaperon rouge sans défense.

 

— Hors de question, dis-je d'un ton sans appel. Tu réviseras avec moi l'après-midi.

 

 J'irai que tu le veuilles ou non ! proteste-t-elle. C'est la première fois qu'un garçon m'invite ! T'es vraiment nul !

 

Puis, sur ces mots, Amé quitte le salon telle une furie. Je n'ose pas croiser le regard d'Anne, je sais qu'elle me dévisage d'un air sévère.

 

— Vous êtes un petit con, me dit-elle.

 

 Je sais, acquiescé-je simplement.

 

 Amé est une très jolie fille de quinze ans, il est normal qu'elle sorte avec des garçons de son âge. Ne faites pas le papa poule hyper protecteur.

 

— Je ne suis pas son père, grogné-je.

 

Je grimace, quand j'entends le mot "papa", pour une raison que je ne m'explique pas, je n'apprécie pas qu'on me considère comme tel. Je me vois plutôt comme son protecteur ou son ange gardien. Et je sais très bien qu'Amé est devenue une très jolie fille et qu'elle attire les garçons, mais ça reste toujours le petit bébé fragile que j'ai trouvé devant ma porte. Je ne veux pas qu'un trou du cul mal intentionné, qui réfléchit avec son entre-jambe plutôt que son cerveau, s'intéresse à elle. Elle mérite mieux.

 

Au bout de cinq minutes, Amé revient dans le salon et s'installe sur la table basse avec son ordinateur et ses écouteurs. Je prends quelques secondes pour scruter ma jeune adolescente rebelle. Ses cheveux châtains foncé lui arrivent maintenant jusqu'en bas du dos, ses yeux verts sont concentrés sur son ordinateur. Elle a l'air sérieuse derrière son écran, bien que je n'aie aucune idée de ce qu'elle fait. Elle doit sentir que je la regarde puisque je croise son regard furieux. Pour toute réponse, elle me tire la langue et détourne la tête. Quelle chipie ! Je n'aime pas quand elle me boude ou me fait la tête, alors je prends sur moi. Je lui lance un coussin. Furieuse, elle enlève ses écouteurs et me le renvoie de toutes ses forces. Manque de bol, il atterrit bien loin de sa cible : moi.

 

 C'est d'accord, lui dis-je, dans un soupir. 

 

Ses yeux s'écarquillent. Elle est surprise que je lui donne mon accord, je n'en reviens pas moi-même d'avoir accepté sa requête. Le ciel m'est tombé sur le tête. Elle affiche un grand sourire et se lève pour venir se jeter à mon cou. 

 

 Merci, t'es le meilleur Dra !

 

Elle s'écarte de moi pour attraper son téléphone portable sur la table basse et s'en va en sautillant. Je souris, j'aime la voir heureuse. Depuis qu'elle vit au château, je fais tout pour son bonheur, quitte à contrarier le mien. Mon sourire s’efface légèrement quand je sens le regard accusateur d'Anne.

 

 Je vous connais, vous n'avez pas dit oui sans arrière-pensée, m'accuse-t-elle.

 

—  Pas du tout, m'offensè-je.

 

— Crachez le morceau, que complotez-vous ?  demande-t-elle en souriant.

 

Je fais la moue et tourne la tête en me grattant l'arrière de la tête. Après tant années à mon service, elle me connaît par cœur. Malheureusement, il est difficile de lui cacher quelque chose. Comme on dit, ce n'est pas au vieux singe qu'on apprend à faire la grimace !

 

 Je vais juste les suivre samedi après-midi. Pour être sûr que ce loup ne fasse pas de mal à ma petite Amé. Au moindre geste déplacé, je lui arrache la tête.

 

Anne sourit en me disant que je suis irrécupérable. J'esquisse à mon tour un petit sourire et je me lève de mon fauteuil pour m'asseoir à côté d'elle. Je décide de l’embêter un peu et de lui raconter les meilleures ou les pires blagues que je connaisse.

 

 

 

Samedi arrive vite, bien trop vite à mon goût. Je ne suis pas prêt. Le reste de la semaine, Amé nous a bassiné les oreilles avec son Diméo. Pfff quel prénom à la noix ! Quelle idée d’appeler son gosse comme ça ?! Ils ont tiré les lettres du prénom à la loterie ? En tout cas, Amé est complètement sous le charme de ce trou du cul et ça ne me plaît pas du tout. Elle doit avoir du cirage dans le ciboulot pour avoir accepté ce rendez-vous ! Ou alors ce petit malin a sorti les violons et Amé, n'étant pas très futée, est tombée dans le piège. Il vient la chercher à quatorze heures pour aller au cinéma. Tiens donc, le parfait endroit pour draguer une fille, comme par hasard. Le petit fumier.  

 

 

Je marche discrètement et incognito quelques mètres derrière Amé et trou duc. Point positif : pas de contact physique. Je les suis jusqu'au cinéma et les laisse entrer les premiers. Je connais le nom du film qu'ils ont choisi grâce à un de mes précieux dons de vampire : mon ouïe hyper développée. Je souris, fier de moi. 

 

 Bonjour, une place pour "Twilight" s'il vous plaît.

 

Elle pianote sur son écran et me demande 8,90 e. Je suis estomaqué devant le prix exorbitant. C'est si cher que ça le cinéma maintenant ? Ça coûte un bras ces conneries ! Je soupire et sors un billet de dix. Je le pose sur le comptoir et lui dis de garder la monnaie. Elle me tend le ticket. Je le prends, achète un pot de popcorn et pars en direction de la salle. Je repère rapidement les deux adolescents et m'installe quelques sièges plus haut. Je n'ai aucune idée du film que je vais voir, ça sera une surprise. Je suis plus focalisé sur Amé et l'autre guignol. Ils grignotent du popcorn tranquillement, en tout bien tout honneur. Bon, pour le moment, tout se passe bien.

 

Les publicités sont interminables, on a compris qu'ils veulent nous refourguer leurs parfums qui puent et nous engraisser avec leurs magnums. Je suis soulagé quand le film commence enfin, mais pas pour longtemps. Je ne sais pas ce qui est le pire : la daube monumentale que je suis en train de regarder à l'écran depuis maintenant plus d'une demi-heure ou alors le bras de l'autre trou duc autour du cou d'Amé. Je comprends rapidement qu'il s'agit d'un film de vampire. Tiens, quelle ironie du sort. Le héros, Edward, est blanc comme un linge. Le cachet d'aspirine aurait vraiment besoin de prendre le soleil. Cerise sur le gâteau, notre cher Edward brille lorsqu'il est exposé à la lumière du jour. Je ne sais pas où les scénaristes sont allés chercher cette idée saugrenue. Il faut sérieusement se calmer sur la bouteille de Whisky.

 

Le rapport qu'il a avec le sang ne m'est pas inconnu, même si après plus de cent cinquante ans j'arrive à me contrôler. Tous les soirs, entre deux et quatre heures du matin, je me lève discrètement pour aller chercher une bouteille qui contient un liquide rouge très spécial dans la cave : du sang. Anne est bien évidemment au courant, puisque c'est elle qui s'occupe de m'approvisionner auprès de différents bouchers de la ville. Je ne sais pas quelle excuse elle a trouvé, mais cela semble les satisfaire puisqu'ils n'ont, à ce jour, jamais posé la moindre question. Avant qu'Anne ne soit à mon service, j'allais chasser moi-même le gibier en forêt et je dois avouer que je trouvais cela fort déplaisant. Evidemment, Amé n'est au courant de rien, et elle ne risque pas de tomber sur ma petite cachette, car j'ai pris soin de mettre un cadenas à la porte de la cave. Je me trouve plutôt intelligent pour un beau gosse centenaire.

 

Dometo ou Dimata, je ne sais plus son nom, a toujours son bras autour des épaules d'Amé. Alors que je pensais qu'il ne pouvait rien se passer de pire, je les vois s'embrasser. Je me sens bizarre, j'ai comme un pincement au cœur. Finalement, je n'aurai pas dû venir, c'était une très mauvaise idée. Je ne suis pas son père après tout, je n'ai pas le moindre mot à dire sur ces fréquentations. Je me lève du siège et m'éclipse discrètement de la salle. Lorsque je rentre au manoir, Anne me questionne. Je lui raconte rapidement et monte dans ma chambre. Quelques jours plus tard, Amé nous annonce qu'elle sort avec ce trou du cul.

 

 ***

 

" 15 septembre 20XX

 

Cher journal,

 

Cela fait maintenant une semaine qu'Amé est entrée dans une université privée de la ville. Pour des raisons pratiques, elle habite toujours au château et se rend à l'école en voiture. Elle a maintenant vingt ans et n'est plus du tout une jeune fille. Ma douce Amé est devenue une femme. Depuis un peu plus d'un an, mon regard sur elle a changé, elle n'est plus le petit bébé ni l’adolescente rebelle que je voyais en elle. Quand elle se promène en pyjama ou chemise de nuit, je détourne les yeux, troublé. Parfois, j'ai envie une envie folle de planter mes crocs dans sa nuque et de goûter son sang. Est-il légèrement sucré ? Bordel depuis quand suis-je devenu un pervers ? Malheureusement, elle sort toujours avec Dimémachin, mais j'ai cru comprendre qu'il y avait de l'eau dans le gaz depuis des mois déjà. Je ne suis pas aveugle, je vois bien qu'il ne prend pas soin d'Amé. Si j'avais des pouvoirs magiques, je le transformerais en joli crapaud !

 

Etre un vampire a ses avantages et ses inconvénients. En points positifs, je peux en citer quatre :

 

- une ouïe supérieure à la normale, je peux entendre n'importe quels sons à plusieurs mètres. Plutôt classe, notre petite curieuse d'Amé adorerait ce don !

- une force surhumaine.

- se transformer en hibou et plus particulièrement en Grand-Duc d'Europe. Je peux voler où bon me semble, libre comme l'air. J'ai souvent lu ou vu que les vampires se changeaient en chauve-souris, un animal pas très joli. Honnêtement, je ne connais pas d'autre spécimen de mon espèce à part la personne qui m'a mordu, mais je n'ai aucune idée de sa transformation. Alors, je ne sais pas si tous les vampires se changent en hiboux ou si c'est seulement certains.

- la jeunesse éternelle peut être dans les avantages, car je resterais un beau gosse à vie. Mais je la vois aussi comme un inconvénient. 

 

En ce qui concerne les points négatifs, j'en compte trois :

 

- la soif de sang, franchement, c'est l'horreur ! Je dois en boire quotidiennement pour ne pas ressentir une soif terrible et risquer d'attaquer un humain. Concernant le goût, ça ne me dérange plus, j'ai fini par m'y habituer au fil des années.

- l'eau. Je me suis toujours demandé comment un vampire pouvait craindre l'eau, mais c'est comme ça. Je n'ai pas la réponse du pourquoi, ni du comment. Si j'entre en contact avec, je ressens une électrocution dans tout le corps. Pour l'avoir expérimenté quelques fois, c'est très douloureux. Ça nous affaiblit et nous cloue au lit pendant des jours, voir des semaines en fonction de la quantité et de la durée du contact. Impossible donc de prendre un bain ou une douche, je suis obligé de faire ma toilette avec des lingettes pour bébé.

- la jeunesse éternelle, si je venais à tomber amoureux d'une personne, je serais condamné à la regarder vieillir et mourir tandis que je resterais à jamais sur cette terre, pleurant la mort de cet être.

 

C'e sont toutes ces choses qui me différencient des hommes et font de moi un vampire. Comme dirait Amé : ça craint un max. "

 

 

 

 

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Commentaires: 1
  • #1

    Ayumi (dimanche, 22 avril 2018 11:48)

    Sympa le deuxième chapitre ^^
    J'ai hâte de voir leur comportement l'un envers l'autre par la suite.
    J'attends que tu vienne me parler pour tu sais quoi :P
    Vivement le chapitre 3
    ♥ Love for U ma belle ♥