Dracula VII

 

 

 

Deux semaines ont passé depuis qu'Amé m'a demandé d'être son cavalier. Quelle idée stupide j'ai eu, d'accepter de l'accompagner à son bal. Je sais que ça lui fait plaisir, mais je vais devoir me coltiner plus d'une centaine d'étudiants excités et alcoolisés. Je me suis arrangé pour fuir les humains pendant des années, autant dire que j'appréhende cette fameuse soirée. Nous sommes mercredi et le jour J est dans deux jours. Deux maudits petits jours.

 

Je fouille mon armoire à la recherche de mon superbe costume noir. Ah, le voilà ! Une pièce collector. Un petit bijou de mode. Une fois vêtu de mes plus beaux habits, je prends quelques minutes pour m'admirer. Hum... Y a pas à dire, je suis vraiment un beau mâle ! J'observe le teint de mon visage, un peu plus coloré qu'à l'accoutumée. J'ai passé de nombreuses après-midi, dans la cabine à UV d'Anne afin de prendre quelques couleurs, suite à une remarque désobligeante de cette dernière. "Vous êtes blanc comme un cul, vous faites presque peur à voir". Voilà ce qu'elle m'a dit. J'ai pris la mouche et j'ai tenté de remédier intelligemment à ce problème. Et je suis plutôt fier du résultat. Le teint halé me va bien aussi.

 

Je descends au salon, fier comme un paon, pour montrer mon beau costume aux filles. Je franchis le pas de la porte et je découvre Amé et Anne les yeux rivés sur l'écran de la télévision. Je me racle bruyamment la gorge pour signaler ma présence. Aucune réaction. Elles n'ont pas dû m'entendre, trop concentrées sur leur film. Désolé de vous embêter pendant Titanic ! Mais je n'ai pas dit mon dernier mot. Je recommence mon petit manège et cette fois, leurs regards se posent sur moi. La réaction est immédiate, mais ce n'est pas celle que j'attendais. Elles éclatent de rire. Je suis perplexe, qui y a-t-il de drôle ? Je vérifie si j'ai bien fermé ma braguette, au cas où ce serait l'objet de leur hilarité.

 

 Tu as piqué le costume de ton grand-père ? se moque Amé en riant.

 

 Vos habits ne sont plus au goût du jour, explique Anne en essayant de contenir son rire. J'irai vous en acheter un beau demain matin.

 

Je suis vexé jusqu'au trognon par leur manque de goût. Mon costume est magnifique ! Ce n'est pas ma faute si les gens d'aujourd'hui ne savent plus apprécier les belles choses. Mais à mon plus grand désarroi, je suis obligé de m'acclimater à cette nouvelle époque. Je sais que malheureusement, c'est moi l’intrus ici. Un vieux vampire de plus de cent cinquante ans coincé dans un temps qui n'est pas le sien. Je rejoins rapidement ma chambre. J'enlève ma veste et la lance sur mon lit. Je commence à déboutonner ma chemise quand on toque à la porte. La personne entre sans attendre ma réponse. Je ne me retourne pas, mais je sais par sa présence que c'est Amé.

 

 Tu ne l'a pas mal pris, hein ? Tu sais que même si tu portais un sac poubelle, tu resterais le plus beau ! me rassure-t-elle.

 

Un petit sourire se dessine sur mes lèvres. Je suis flatté dans mon égo, mais je garde le silence. Amé repart aussi vite qu'elle est entrée en me laissant seul. Je me déshabille et range soigneusement mon beau costume dans mon armoire. Ce n'est pas encore maintenant que j'aurais la chance de le porter. 

 

 

Nous sommes le jour J, celui du bal. Ce soir, je vais devoir aller me dandiner sur scène, entouré d'humains. L'angoisse. Amé est partie à l'école ce matin, les élèves doivent aider à la préparation de la soirée. Depuis que je me suis levé ce matin, une boule s'est formée au creux de mon ventre. Je suis incapable de rester en place, il faut que je m'occupe l'esprit. Je suis allé courir dans la forêt derrière le domaine, pendant deux heures, afin de me dégourdir les jambes. Je me suis également chargé d'organiser certaines choses pour ce soir. Et pour la première fois de ma vie, j'ai astiqué le château de fond en comble, sous le regard ahuri d'Anne. Cette dernière m'observe attentivement nettoyer la rampe d'escalier.

 

 Vous êtes malades ?! Le boucher m'aurait donné du sang périmé ? taquine gentiment Anne. 

 

 Très drôle ! Ce qui l'est moins, c'est de voir à quel point mon domicile est sale, malgré le fait que la femme de ménage vienne trois fois par semaine. Regardez-moi ce chiffon tout noir ?! dis-je en le lui mettant sous le nez. Elle est aveugle ou quoi ? Je paye une fortune une bonne à rien pour nettoyer mon château ! ronchonné-je. 

 

Anne sourit et s'assoit sur une marche d'escalier. 

 

 Je suis allée chercher votre beau costume ce matin, le paquet est sur votre lit. Vous serez beau comme un camion, Monsieur le vampire, plaisante-t-elle.

 

J'attrape un chiffon propre qui traîne à côté de moi et le lance sur Anne. Celle-ci l'attrape au vol et esquisse un petit sourire. Nous passons une partie de l'après-midi à discuter de tout et de rien, pendant que je nettoie gaiement mon beau château. Je vais me la prendre entre quatre yeux, la femme de ménage, et elle va passer un mauvais quart d'heure. Je vais lui suggérer d'aller s'acheter une paire de lunettes avec les deux mille euros mensuels que je lui paye. Si son travail n'est pas mieux fait à l'avenir, je vais la mettre dehors avec bon coup de pied au cul et en embaucher une autre. 

 

Lorsque qu'Amé rentre des cours, elle demande à Anne de l'aider à se préparer pour ce soir et monte directement à l'étage. Je me dirige moi aussi vers ma chambre. J'y trouve un paquet blanc posé sur le lit. Je m'approche doucement et l'ouvre pour découvrir le costume qu'Anne a choisi pour moi. Je suis plutôt satisfait de son choix, mais je n'en attendais pas moins d'elle, elle ne m'a jamais déçu. Une fois vêtu, je prends quelques secondes pour m'admirer dans le miroir. Ce costume bleu foncé me va comme un gant. J'ai arrangé mes cheveux avec quelques noisettes de gel. J'enfile une paire de chaussures en cuir noir et descends au salon. En attendant que Princesse Amé soit prête, je patiente sagement dans le sofa. Je regarde la télé d'un œil distrait, mon cerveau est occupé à imaginer divers scénarios possibles de la soirée qui m'attend. Mon portable dans la poche de pantalon vibre, j'imagine que c'est pour m'avertir que la surprise est là.

 

Quelques minutes plus tard, Anne entre dans le salon et me demande de venir en bas des escaliers. Je me lève et la suis sagement. Une fois en place, elle hausse la voix pour signaler à Amé qu'elle peut descendre. Je lève les yeux et je l'aperçois. Elle est magnifique. Elle a bouclé ses longs cheveux bruns qui encadrent son visage d'ange. Elle descend lentement les marches et je suis incapable de la quitter des yeux, je suis hypnotisée. Son corset en dentelle semi-transparent, aux couleurs mauve clair et blanc, épouse parfaitement sa poitrine et sa taille. De fines broderies sont cousues sur ce dernier. Le col en cœur lui donne des allures de duchesse. Le bas de sa longue robe est composé de plusieurs couches de tulles mauve. Une fine doublure cache ses longues jambes des regards indiscrets. Elle descend les marches lentement, une par une. Lorsqu'elle arrive à ma hauteur, elle me sourit toujours, pleine innocence. Elle balaye rapidement mon accoutrement de ses magnifiques yeux émeraude.

 

 Tu as oublié de nouer ta cravate, tête en l'air, observe Amé.

 

 Oh, dis-je simplement, tel un benêt.

 

Je suis incapable d'aligner plus de deux mots, je suis toujours sous le coup de l'émotion. Éblouie par la beauté et la grâce de la femme devant moi. Elle esquisse un petit sourire et attrape les deux bout de tissus pour la nouer correctement. Je suis surpris, je ne savais pas qu'elle savait mettre une cravate. Une fois sa tâche finie, elle tapote fièrement son travail, visiblement fière d'elle. Son regard rencontre à nouveau le mien et aucun de nous deux ne détourne les yeux. Je suis perdu dans ses magnifiques iris couleur émeraude. J'ai l'impression que le temps s'arrête et que tout s'efface autour de nous. Il n'y a plus personne, juste Amé et moi. Juste nous deux, une femme et un homme. J'aimerais me pencher doucement pour déposer un baiser sur ses douces lèvres, mais je suis assez lucide pour ne pas céder à la tentation. La voix d'Anne nous ramène à la réalité. Amé cligne des yeux, elle aussi était partie dans un autre monde pendant quelques instants.

 

 Il est temps de prendre de jolis souvenirs, s'exclame-t-elle en tapant dans ses mains.

 

Anne a toujours adoré prendre des photos, elle ne pouvait donc pas passer à côté d'un événement comme le bal de Noël, encore moi si je suis le cavalier d'Amé. Elle part quelques secondes, puis reviens avec notre appareil numérique en main. Je ne sais pas qui est la plus contente, la mère de cœur ou la fille. Amé m'attrape le bras et Anne prend plusieurs clichés de nous. La jeune femme nous offre son plus beau sourire, alors que moi, je reste le visage fermé.

 

 Vous avez l'air constipé ! soupire notre photographe.

 

Je ronchonne en marmonnant quelques mots.

 

 Je vous ai déjà dit de ne pas parler dans votre barbe, gronde gentiment Anne. Allez, dites "Ouistiti" !

 

  Il est hors de question que je dise un mot aussi débile, grommelé-je.

 

  Qu'il est têtu ! 

 

  Allez Dra, je veux une belle photo. En plus, tu es très beau dans ton nouveau costume, me complimente-t-elle.

 

Un petit sourire se dessine sur mes lèvres et je vois Anne nous mitrailler. Je ne doute pas un instant, qu'elles trouveront leur bonheur dans toutes la série qui vient d'être immortalisée. Amé me lâche et c'est à mon tour de faire quelques photos des filles, aussi excitées l'une que l'autre.

 

Une fois cette soirée immortalisée sur la carte SD de l'appareil, nous nous dirigeons vers la sortie. Amé est bouche-bée en apercevant la limousine garée dans l'allée. Elle me dévisage les yeux ronds comme des billes, et la bouche ouverte. Je suis plutôt ravi de ma surprise, et encore plus quand je vois l'effet que ça fait à ma douce Amé. Elle se précipite, aussi vite que sa robe lui permet, vers la voiture noire. 

 

 Oh mon dieu, Dra ! Tu as réservé une limousine ?! s'exclame-t-elle. Jess et Julie vont être vertes de jalousie, rit la jeune femme.

 

Je suis rassuré par sa réaction, j'avais peur d'en faire trop. J'avais vu que les jeunes faisaient ce genre de choses dans les films et j'espérais que ça lui plairait. J'esquisse un sourire et je m'avance pour lui ouvrir la porte, tel un gentleman. Elle me sourit et entre à l'intérieur. Je m'installe à ses côtés et indique au chauffeur notre destination. C'est parti ! 

 

 

 

 

La limousine s'arrête devant l'école d'Amé, derrière la file de véhicules. Les voitures arrivent et repartent aussi vite, après avoir déposé leurs passagers. J'ouvre la porte et sors quelques secondes pour respirer l'air frais du soir. Je balaye les alentours du regard, ça grouille de jeunes étudiants : une vrai fourmilière. Je ne me sens pas à l'aise et une bouffée de chaleur m'envahit. J'ai l'impression de suffoquer, je desserre légèrement ma cravate. Ma respiration est haletante, je répète à voix basse : "inspirer", "expirer". J'applique minutieusement mon mantra, afin de me calmer et de m'apaiser. Petit à petit, ma poitrine se soulève moins rapidement et les battements de mon cœur retrouvent un rythme régulier.

 

 Jess et Julie sont déjà à l'intérieur avec leur cavalier, m'informe Amé.

 

Déboussolé par ce nouvel environnement, je ne l'avais même pas vue sortir de la limousine. Elle se dirige vers l'escalier de la porte principale quand je l’interpelle. Elle se retourne et me dévisage. Elle a l'air inquiète, elle pense que je vais me défiler au dernier moment et j'avoue que l'idée est très tentante, mais elle se trompe. Je lui ai promis de l'accompagner, alors je le ferais et jusqu'au bout. J'esquisse un petit sourire et lui tends mon bras qu'elle fixe quelques secondes, avant de revenir vers moi et de le saisir. 

 

 On se croirait dans un film, murmure timidement Amé. 

 

 Ça te dérange ? Tu trouves que ça fait vieux jeu ? demandé-je, inquiet.

 

 Non, j'aime beaucoup ! Merci encore de m'avoir accompagné, répond-elle en posant sa tête contre mon épaule quelques secondes.

 

Sur ces jolies paroles, nous avançons vers l'entrée pour pénétrer à l'intérieur du bâtiment. La soirée se déroule dans la salle des fêtes de l'université. Ah, les écoles de petits riches. Je suis surpris de voir les efforts et le budget consacrés à ce bal d'étudiants. Des tables rondes, couvertes de nappes bleu marine, ont été dressées chaque côté de la salle. Sur l'estrade, on retrouve des platines, surement pour le DJ qui va animer cette fameuse soirée. La piste de danse -énorme- est au milieu de la pièce. Des sapins artificiels blancs, aux décorations bleues, sont dispersés un peu partout. Des rubans et des banderoles, avec le même code couleurs, sont accrochés aux murs. Des jeux de lumières ont été installés pour l'ambiance lors des danses.

 

 

Depuis notre arrivée, quelque chose me met mal à l'aise et étrangement, cela n'a rien à voir avec la foule autour de moi. Je sens une présence hostile dans cette salle, mais impossible de trouver d'où et de qui elle provient. J'ai beau balayer la pièce du regard, en long, en large et en travers, je n'arrive pas à identifier la menace. Je déteste cette sensation, celle de me sentir observer et de ne pas savoir par qui. Si je trouve le coupable, il risque de passer un très mauvais quart d'heure, parole de Dracula. La douce voix d'Amé me ramène sur terre.

 

 Faisons rapidement les présentations. Julie et son cavalier Quentin. Jess et Thomas. Et enfin, un cousin lointain de l'homme qui m'a adoptée, An...

 

 Alucard, la coupé-je.

 

J'esquisse un petit sourire sous le regard surpris d'Amé. Jess me fait un clin d’œil et lève discrètement le pouce en l'air : elle est la seule à savoir qui je suis vraiment - son tuteur- parmi les amis de ma cavalière. Je suis moi-même étonné d'avoir utilisé ce prénom. Peut-être qu'au fond de moi, le temps d'une soirée, j'ai voulu abandonné le nom qui me relie à ma nature de vampire. Ce soir, je veux juste redevenir Alucard, un jeune homme comme les autres. Mais combien de temps vais-je réussir à faire illusion ? 

 

On s'installe à une table. Comme je suis un gentleman, je tire la chaise recouverte d'un drap blanc à Amé. Je prends ensuite place à ses côtés. Julie et son cavalier me posent quelques questions, comme : d'où je viens, ce que je fais, l'âge que j'ai. Evidemment, aucune de mes réponses n'est vraie. Ils pensent donc que je suis un étudiant en droit, que je vis en Bretagne et que j'ai vingt-deux ans. Je me prends au jeu et ajoute même quelques détails comme le fait que je possède un petit chat âgé de deux ans. La conversation s'oriente ensuite vers les potins en estimant les couples qui vont se former à la suite du bal. Les entrées sont servies : deux tranches de foie gras accompagnées d'une coupelle de confiture de figues. Des serveurs déposent des paniers de pains grillés au milieu de la table. Et bien, ils ont pas lésiné sur le traiteur, ils ont dû avoir une note salée.

 

Pour le plat, un filet de chapon avec des petits légumes. Je n'ai pas encore goûté, mais j'en ai l'eau à la bouche. Il ne manque plus qu'un verre de sang frais et ça serait parfait. Mais malheureusement, cela va devoir attendre cette nuit. En guise de boisson, nous avons du vin rouge, un Bordeaux, ou des carafes d'eau. Thomas attrape la bouteille et remplit les verres un à un. Quand il arrive à celui d'Amé, je pose ma main au-dessus pour l'empêcher de verser le liquide. 

 

— Eh, s'insurge Amé.

 

— Pas de vin, déclaré-je d'une voix sans appel.

 

Je jette un regard à la jeune femme à côté de moi, je n'ai pas besoin de prononcer d'autres mots, elle m'a compris. J'ai accepté de l'accompagner à son bal, mais elle ne boira pas une goutte d'alcool devant moi. Pour me montrer son mécontentement, elle me pince discrètement la cuisse, mais je l'ignore. Une fois le plat fini, le DJ monte sur la scène. Quelques secondes plus tard, la musique sort des enceintes et résonne dans la salle. Les étudiants laissent leur assiette vide et se précipitent sur la grande piste de danse au centre. Julie et Quentin sont les premiers à quitter la table, suivi de Jess et Thomas. Amé se tourne vers moi, tout sourire.

 

—  Je viendrai quand il y aura un slow. Je ne sais pas bouger sur vos musiques de jeunes, expliqué-je.

 

J'aimerais pouvoir l'accompagner sur la piste et me dandiner comme tous ces étudiants, mais j'en suis incapable. J'aurais l'air d'un plouc ! Je ne sais pas danser, et encore moins comme eux. Je ne sais pas si c'est normal, mais certains ont plus l'air de faire des crises d'épilepsie que se trémousser sur la piste. Et puis, je ne connais pas leurs sons, enfin si on peut qualifier ces choses de musiques. Mes pauvres oreilles saignent. Ne connaissent-ils donc pas des chefs d'œuvre comme Mozart, Beethoven ou encore Tchaïkovski ? Triste monde. Ils feraient mieux d'aller à l'opéra ou voir des ballets plutôt que de se dandiner serrés comme des sardines. Je me souviens avoir assisté à une représentation du Lac des cygnes, un hivers à Paris, en 1965, si je ne me trompe pas et c'était magnifique.

 

Cela doit faire passé une heure que je suis assis seul sur ma chaise et j'ai déjà descendu trois bouteilles de vins pour m'occuper. Les serveurs ont débarrasser les assiettes et couverts depuis longtemps. Je ressens toujours cette maudite présence hostile, sans savoir d'où elle provient. Serait-ce un admirateur secret d'Amé, jaloux de moi, son cavalier ? En même temps, je peux le comprendre. Face à ma beauté et mon charisme, il n'a aucune chance. Cela doit être rageant. Tiens, quand on parle du loup, on en voit la queue. Je l'aperçois qui revient vers moi, le sourire aux lèvres. 

 

— Les slows vont commencer, m'informe-t-elle. Tu viens ? 

 

Sur ces mots, elle me tend la main. J'ai envie de refuser, mais je lui ai promis alors je dois le faire. Comme on dit, quand il faut y aller, il faut y aller ! Je dois en être capable, il n'y a pas de raison si ces jeunes y arrivent, je peux le faire. La musique commence et nous nous dirigeons vers la piste. On se faufile entre les étudiants pour se faire une petite place au milieu de la foule. On se fixe quelques secondes, aucun de nous ne sait comment s'y prendre, alors on jette un coup d’œil aux couples qui nous entourent pour les imiter. Amé se rapproche doucement et passe ses bras autour de mon cou tandis que je place les miens sur sa taille. Nous sommes presque collés l'un à l'autre. Je ne suis pas habitué à cette proximité, mais j'aime beaucoup. Je peux sentir son parfum fruité, un doux mélange de cerises et pêches. Nos yeux ne se quittent pas, son regard émeraude m'hypnotise. Au fur et à mesure de la danse, les gens aux alentours disparaissent. Nous sommes plus que tous les deux, un homme et une femme. Je voudrais que ce morceau ne s'arrête jamais et qu'elle reste dans mes bras pour toujours. Que le temps s'arrête ici, laissant la vieillesse et la mort loin derrière nous. J'ai été tellement soulagé et content quand elle m'a annoncé sa rupture avec Dimé-machin, c'était un crétin qui ne lui convenait pas. Mais il n'est pas le seul garçon sur cette planète et j'ai peur qu'un autre vienne me la prendre. Dois-je agir avant que cela n'arrive ? Dois-je prendre le risque de tout faire voler en éclats ? Elle est tellement importante pour moi que je n'ai pas envie de la perdre. Est-ce que mes envies et mes pulsions méritent que je mette en danger notre relation ? Pour la première fois depuis le début de la chanson, je quitte ses yeux pour fixer quelques secondes ses lèvres charnues. Je replonge rapidement mon regard dans le sien et je suis surpris de voir ce que j'y lis : du désir. Est-ce la réalité ou l'alcool présent dans mon sang qui me joue des tours ?

 

La musique s'achève et nous arrêtons de bouger. Un autre slow démarre, les couples se remettent à danser tandis que nous restons immobiles. 

 

— Dra ? murmure la douce voix d'Amé.

 

Je ne sais pas si c'est l'ambiance romantique ou l'alcool qui a raison de ma lucidité car je perds la tête. J'incline lentement la tête et pose délicatement mes lèvres sur les siennes. Je vois Amé fermer les yeux et pousser un petit soupir d'aise. Je ferme à mon tour mes paupières pour savourer et profiter de ce moment tant attendu. Peut-être même le dernier. Quelques secondes plus tard, je suis bousculé par un mec, ce qui nous fait rompre le baiser. Il s'excuse avant de continuer son chemin. Je peste intérieurement avant de reporter mon attention sur la magnifique jeune femme devant moi. Malheureusement, le charme est brisé et le retour à la réalité est violent. J'ai l'impression d'avoir dessaoulé en un claquement de doigt. J'ai adoré le sensation de sa bouche contre la mienne, c'est indéniable, mais j'ai fais une bêtise. Est-ce vraiment une bonne idée ? A cet instant, j'ai peur d'avoir fait l'une des plus grosses conneries de ma vie.

 

— Je crois que j'ai un peu trop bu, dis-je en me passant la main dans les cheveux.

 

— Pardon ?

 

Aucun mot ne sort de ma bouche. J'aimerais lui dire que ce n'est pas l'alcool qui m'a fait l'embrasser et que je mourrais d'envie de poser mes lèvres sur les siennes depuis des mois, mais rien. Je reste muet comme une carpe. Je ne peux pas lui avouer ce que je ressens, ce n'est pas bien.

 

— Tu es en train de me dire que tu m'as embrassée parce que tu es à moitié bourré ? s'énerve Amé. Va en enfer, je te déteste ! 

 

Sur ces mots, elle m'abandonne sur la piste et se faufile entre les couples pour s'enfuir. J'essaye de la suivre en tentant de me frayer un passage pour la rejoindre, mais je suis ralenti par ces crétins d'étudiants à moitié en train de copuler. J'hésite, ils font l'amour ou ils dansent ? Une fois que j'ai enfin réussi à m'extirper de la foule, je balaye la salle du regard à la recherche d'Amé. Elle est debout à notre table, son sac à main à l'épaule. Je me précipite vers elle. Une fois à sa hauteur, je lui attrape le poignet et la force à se retourner vers moi. Elle a les larmes aux yeux et elle se mord la lèvre pour s'empêcher de pleurer. La voir dans cet état me fait un pincement au cœur. Je sais que c'est de ma faute, c'est moi, l'idiot qui l'ai blessée.

 

 Amé...

 

 Je vais aux toilettes, me coupe-t-elle.

 

Elle se dégage violemment de mon étreinte et sort de la salle. En quelques secondes ma décision est prise : je vais lui parler sérieusement, je dois lui dire la vérité. Que je ne l'ai pas embrassée à cause de l'alcool, mais parce que j'en avais envie. Très envie. Que depuis plusieurs années, je la vois comme une femme belle et intelligente. Je ne suis pas pressé d'avoir cette discussion car je ne sais pas comment elle va réagir à ses aveux. Alors que je suis en train de réfléchir aux mots que je vais utiliser lors de notre conversation, j'entends un cri. Je balaye la salle du regard, mais personne ne réagit. L'aurais-je rêvé ? Quelques secondes plus tard, j’aperçois Amé débouler dans la salle. Je suis horrifié. Mon cœur s'arrête de battre et la peur m'envahit. Sa robe mauve est maculée de sang.

 

 

 

Je me précipite à ses côtés et je la prends par les épaules pour lui demander si elle va bien, mais aucun mot ne sort de sa bouche. Elle reste silencieuse, elle est en état de choc. Nom de Dieu, qu'est-ce qu'il s'est passé ?! Mon cœur bat à tout rompre, je ne me souviens pas avoir eu aussi peur pour quelqu'un autre. Je l'examine minutieusement, afin de trouver l'origine de sa blessure. Sa robe n'est pas déchirée et Amé n'est pas blessée. Ce n'est pas son sang. Je pousse un long soupir de soulagement, je respire enfin. Elle n'a rien, elle est saine et sauve. Mais une question se pose : A qui appartient-il ? Que s'est-il passé et qu'à vu Amé ? Je la secoue un peu et ses yeux rencontrent enfin les miens. Elle semble être revenue à elle. Je lui demande si elle va bien, mais elle est incapable d'aligner trois mots. Bon sang ! Je vais devenir fou !

 

Je remarque que la foule s'agite nerveusement. Grâce à mon ouïe surdéveloppée, je parviens à entendre quelques brides de conversation. La police et le samu ont été prévenus et ils devraient arriver d'ici quelques minutes. J'écarquille les yeux quand j'apprends ce qu'il s'est apparemment passé. Une étudiante a été retrouvée morte dans les toilettes des filles. Le sang sur sa robe serait-il celui de la jeune femme décédée ? Je reporte mon attention sur Amé, qui est toujours silencieuse à mes côtés. Je lui prends doucement le bras et l'amène à notre table. Je l'aide à s’asseoir et je prends place sur sa droite. Je lui sers un verre d'eau avant de lui tendre. Elle le saisit pour boire quelques gorgées et le repose sur la nappe. Nous restons tous les deux muets plusieurs minutes, je la laisse rassembler ses esprits. Je pose délicatement ma main sur sa joue et ses yeux rencontrent enfin les miens. 

 

— Amé, dis-moi ce qu'il s'est passé, chuchoté-je.

 

— Je ne sais pas. Je suis allée aux toilettes et elle était là, allongée sur le sol dans une mare de sang. Je me suis approchée, pour l'aider. Mais je ne pouvais rien faire pour elle.... J'ai vite compris qu'elle était... 

 

Elle laisse sa phrase en suspens, les larmes aux yeux. Elle m'arrive pas à prononcer ce mot fatidique, ce mot qui met un point final à la vie, alors je le fais pour elle.

 

— Morte ?

 

— Oui, murmure-t-elle en éclatant en sanglots.

 

Je rapproche doucement ma chaise de la sienne et je la prends dans mes bras. Elle passe ses bras autour de mon torse et pleure à chaudes larmes. Ses poings attrapent le tissu de ma chemise pour le serrer entre ses doigts fins. Je la sens trembler contre ma poitrine. Je lui caresse lentement le dos en guise de réconfort. Je suis désolé pour elle, je sais à quel point elle attendait cette fameuse soirée et tout ce qu'elle retiendra, c'est ce cadavre qu'elle a découvert dans les toilettes. Ce corps encore chaud, mais sans vie d'une jeune fille. Je dépose délicatement un baiser sur le haut de son crâne. J'entends des bruits de pas s'approcher de nous. Je lève la tête, deux hommes en uniforme se tiennent devant nous. Leur insigne sur la poitrine est bien visible : des policiers.

 

— Nous aurions besoin d’interroger Améthyste De Rosnay au poste de police, informe un des deux hommes.

 

— Cela ne peut pas attendre demain ? demandé-je. Vous voyez qu'elle n'est pas en état.

 

Je n’obtiens aucune réponse, ils m'ignorent royalement. J'imagine que ça veut dire non. Ça y est, ça porte un badge et un pistolet, et ça se prend pour les rois du monde ! Amé lève doucement la tête vers les policiers. Les joues baignées, elle se lève pour les suivre en silence. Je fais de même, hors de question de la laisser seule avec ces deux colosses dans l'état qu'elle est. Un des hommes me stop en mettant la main sur le torse.

 

— Seule. 

 

Et puis quoi encore ? Il commence à me courir sur le haricot, Bruce Willis. Ce n'est pas parce qu'il lui reste trois cheveux sur le caillou, qu'il doit être aigri. Il est hors de question qu'ils l’interrogent si je ne suis pas là. Je suis déjà tendu comme un string -comme dirait les jeunes d'aujourd'hui- ce n'est vraiment pas le moment de me taper sur les nerfs. Je suis à deux doigts du massacre moi aussi et je prends sur moi pour ne pas laisser exploser mes pulsions. Ne traumatisons pas Amé plus qu'elle ne l'est déjà.

 

— Je suis son tuteur légal, précisé-je.

 

— Et alors ? Elle est majeure. Rentrez chez vous, nous la raccompagnerons à votre domicile.

 

Sur ces mots, il me laisse seul comme le dernier des crétins. Quel petit con, ce mec ! Il ferait moins le malin, ce trou du cul, s'il savait que j'avais un siècle de plus que lui. Je saurais me souvenir de ce minable. Je suis frustré de laisser Amé aux mains de ses malotrus, mais malheureusement, je ne peux rien faire pour elle. Je décide de me rapprocher de la scène de crime pour en apprendre un peu plus sur l'incident et je tends l'oreille. Je suis choqué par les bribes de phrases que j'arrive à entendre. "C'est un homicide", "elle a été assassinée" "cause de la mort : vidée de la moitié son sang par deux trous dans le cou". Je reste stupéfait. C'est une mauvaise blague, ce n'est pas possible. Cette fille aurait été attaqué par un vampire ? Aux dernières nouvelles, je suis le seul monstre assoiffée de sang dans cette ville. Et ce depuis plus d'un siècle ! A ma connaissance, aucun autre confrère n'est venu dans la région et encore moins pour tuer un humain. Je n'ai jamais entendu parler de cadavre vidé de son sang jusqu'à aujourd'hui. Serait-ce le résultat de la présence hostile que j'ai ressenti ce soir ? Serait-il le coupable ?

 

Je m'éclipse de l’école d'Amé et me transforme en hibou à l'abri des regards indiscrets. Je parcours la ville à la recherche de tout individu suspect, sans succès. Je rendre bredouille au château un peu avant minuit. Lorsque je franchis la porte du salon, j'y trouve Anne assise dans le canapé, un livre à la main. Elle lève le nez de sa lecture et me jette un regard surpris.

 

— Vous rentrez seul ? Où est Amé ? Vous vous êtes disputés ? questionne t-elle en venant à ma rencontre, inquiète.

 

— Elle est au commissariat, dis-je calmement.

 

— Pardon ?! s'offusque-t-elle. Comment est-ce arrivé ? Que s'est-il passé ? 

 

Je perçois dans son regard et dans sa voix qu'elle est folle d'inquiétude pour Amé et je la comprends. C'est sa fille après tout. Mais parfois, elle oublie que cette dernière a maintenant vingt ans et qu'elle n'est plus le petit bébé fragile dont elle s'est occupée. Enfin, je dis ça, mais je suis loin d'être serein et j'aimerais être auprès d'elle dans ce maudit commissariat. Je pousse un long soupir, épuisé par les récents événements. Je me laisse tomber dans le sofa et raconte à Anne ce qu'il s'est passé. La robe couverte de sang d'Amé, les policiers et enfin la victime. Je précise les détails de sa mort que j'ai entendu plus tôt : à moitié vidé de son sang et deux petits trous dans le cou. Elle reste silencieuse quelques instants, plongée dans ses pensées. 

 

— Vous pensez que c'est l'œuvre d'un vampire ? demande-t-elle enfin.

 

— Je n'en sais rien, soupiré-je. A ma connaissance, je suis le seul dents pointues dans le coin. Le dernier vampire que j'ai vu remonte à il y a plus d'un siècle. Cette histoire ne fait que commencer qu'elle me fatigue déjà. 

 

— Et avec Amé ? questionne-t-elle. 

 

— Quoi, avec Amé ? dis-je innocemment.

 

— Me prenez pas pour une buse, racontez-moi ! 

 

— On croirait entendre une mère, informé-je.

 

— Vous êtes un peu comme mes deux enfants, sourit-elle.

 

C'est vrai, je considère moi aussi Anne comme une deuxième maman. Elle a toujours pris soin de moi depuis son arrivée au château. Elle m'a tout de suite materné alors qu'elle avait à peu près mon âge. C'était un peu étrange, mais j'ai tout de suite apprécié sa gentillesse et sa dévotion. Je lui serais reconnaissant jusqu'à sa mort, mais je ne me vois pas raconter notre petit moment privilégié lors de notre danse. Ce baiser ne regarde que nous, Amé et moi. D'ailleurs, j'attends avec impatience qu'elle rentre. Je dois savoir ce qu'il s'est dit au poste de police et on doit régler notre petit malentendu sur ce fameux bisou. Alors que je cherche une excuse pour éviter de répondre à Anne, j'entends des bruits provenant de l'extérieur. Je bondis du canapé et me dirige vers l'entrée.

 

Amé referme la porte derrière elle. Elle a l'air épuisée, son mascara a coulé et lui fait des yeux de panda. Elle esquisse un faible sourire quand elle m'aperçoit. Les larmes aux yeux, elle s'approche pour se réfugier au creux de mes bras. Je l'enlace tendrement et lui caresse le dos en signe de réconfort. Après quelques minutes dans cette position, on se détache lentement. Au moment où ses yeux croisent les miens, elle détourne le regard. Super... c'est bon signe. Elle évite tout contact visuel. Anne lui attrape la main et l'amène au salon. Elles prennent place sur le canapé, Amé se blottit immédiatement contre elle. J'envie presque cette dernière, j'aimerais être à sa place pour serrer encore une fois la jeune femme dans mes bras. 

 

— Alors, ma chérie, raconte-nous, encourage Anne d'une voix douce.

 

— Je ne sais pas combien de temps il m'ont interrogée, mais ça m'a semblé interminable. Ils étaient froids et ils m'ont posé des tas de questions. A peine avais-je répondu, qu'ils enchaînaient avec une autre. Je leur ai dit la vérité. Je ne connaissais même pas cette fille. Quand je suis entrée dans les toilettes, son corps gisait dans une mare de sang, sur le sol. Je n'ai pas réfléchi, je me suis approchée pour voir si elle respirait encore. Je l'ai secouée quelques fois avant de prendre son pouls, mais son cœur ne battait plus, sanglote-t-elle. C'est la première fois que je voyais un cadavre, elle était morte pourtant, son corps était encore chaud. Je n'ai rien pu faire pour la sauver, je suis arrivée trop tard.

 

— Heureusement que tu es arrivée trop tard, Amé ! rugis-je. Imagine ce qui serait arrivé si tu étais entrée, alors que le meurtrier était encore dans la pièce ! Tu aurais subi le même sort que cette fille !

 

A cette pensée, j'en ai la nausée. Mon Amé aurait pu se faire tuer, ça aurait pu être elle à la place de cette étudiante. Si c'était arrivé, j'aurais remué ciel et terre, nuit et jour, pour retrouver ce monstre. Afin de le tuer de mes propres mains, après lui avoir infligé d’atroces souffrances. 

 

— Je sais, renifle Amé. Mais je ne peux rien faire, je ne peux même pas aider à retrouver le coupable. Je n'ai rien vu, je n'ai pas une seule piste à donner à la police. Je suis inutile.

 

— Et bien, je suis content que tu sois inutile. Reste en dehors de ce massacre, Amé, et laisse la police gérer cette affaire, ordonné-je.

 

Cette fouine est capable de fourrer son nez n'importe où, par curiosité, et de tomber nez à nez avec le coupable. Il ne manquerait plus qu'elle s'attire des ennuis à cause de cette histoire. Si quelqu'un, à part la police, doit mener une enquête sur ce meurtre, ça sera moi. Ces trous dans la nuque de la victime m'obsèdent. S'agit-il d'un vampire, ou est-ce l'oeuvre d'un tordu fan de ces créatures assoiffées de sang ? 

 

— Je vais aller me coucher, tu m'accompagnes, Anne ? quémande Amé.

 

— Bien sûr, ma chérie, j'arrive.

 

— Amé on peut discuter un peu avant que tu ailles au lit ? demandé-je.

 

Elle me jette un regard empli de tristesse avant de détourner les yeux. 

 

— Pas ce soir, Dra, soupire-t-elle. Tu en as déjà assez dis, je pense.

 

Anne me lance un regard curieux et m'interroge d'un geste de la tête. Pour toute réponse, je hausse les épaules. Elle lève les yeux au ciel avant de monter à l'étage avec Amé. Et bien, ce bal était vraiment mouvementé, je suis lessivé. Les jours à venir vont être difficiles. Je vais aller me boire une petite poche de sang, ça va me faire le plus grand bien. Je me dirige vers la cave, impatient de goûter mon festin de vampire.

 

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Commentaires: 1
  • #1

    Bubulle (vendredi, 31 août 2018 17:23)

    Youpiiiiiii!
    J’etais impatiente de lire la suite et maintenant j’ai encore plus envie!
    Franchement, bravo, j’adore ce que tu fais ;)

    Bisous, Bubulle