Dracula - Chapitre X

- DRACULA -

 

 

Elle sait. Son cerveau a relié beaucoup d'éléments entre eux, même si son cœur refuse encore d'admettre l'horrible vérité. Elle préfère miser sur ses quelques pourcentages de doute, plutôt que d'accepter ma nature. Ce qui soyons honnête, m'arrange beaucoup. Elle m'a demandé si j'étais un vampire et pire encore, elle à envisager que j'ai pu tuer cette fille. Ses mots m'ont fait l'effet d'une grosse claque. Jamais, l'homme que je suis aujourd'hui aurait fait du mal à un humain et encore moins pendant le bal qu'Amé attendait avec impatience. Je suis lasse de tous ses mensonges, c'est fatiguant. Je n'aime pas lui mentir, mais je n'ai pas le choix. Je ne suis pas encore prêt, j'ai besoin d'encore un peu de temps avant de tout lui avoué. Je soupire. Lorsque mon cœur battait encore, j'étais un homme courageux, mais aujourd'hui, je suis un lâche. J'ai peur que ma nature me fasse perdre la femme que j'aime, pour toujours. 

 

Je me suis assis à mon bureau depuis plus de cinq minutes, lorsqu'on toque à la porte. Anne entre dans la pièce avant de refermer doucement la porte derrière elle. Elle esquisse un faible sourire. 

 

— Dure journée, dit-elle.

 

Je dirais plutôt dure semaine. Depuis le bal, plus rien ne va. Je suis dépassé par les événements. J'ai toujours eu le contrôle sur tout ou presque. Apparement, un vampire erre dans la ville et s'amuse à vider ses victimes de son sang. Je vais devoir le trouver et l'éliminer avant qu'il ne tue d'autres personnes. Il n'y a qu'un moyen de se débarrasser d'un vampire : lui trancher la tête. C'est la raison pour laquelle je suis toujours en vie malgré mes tentatives de suicide. Je n'ai jamais réussi à ressembler assez de courage pour m'infliger moi-même cette barbarie. Et le deuxième problème concerne évidemment la jeune femme qui vit sous mon toit. J'ignore quoi faire et comment réagir avec Amé. 

 

— Comment s'est passé votre discussion ? demande Anne inquiète. Je suis désolé, je n'aurais jamais dû laisser vos bouteilles dans le frigo, c'était stupide de ma part.

 

Ce n'est pas sa faute, j'aurai pu les enlever aussi. À ce jour, Amé n'avait jamais touché et bu mes jus de tomate. Elle préférait ses boissons avec une tonne de sucre ajouté comme l'Ice Tea ou le Coca.

 

— Elle m'a demandé si j'étais un vampire et si j'avais tué cette étudiante, répondé-je simplement.

 

Elle grimace.

 

— Aie ! Et qu'avez-vous répondu ? 

 

— Que je ne l'avais pas tué bien sûr ! J'ai une tête de tueur Anne ? m'inquiété-je. 

 

— Évidemment que non, me rassure-t-elle. Amé est chamboulée par tous ces événements et elle commence à se poser beaucoup de question à votre sujet. Vous ne pourrez plus vous taire encore longtemps. Faites lui donc confiance, bon sang !

 

C'est le cas, mais il y a toujours ce petit doute. Cette maudite peur de l'effrayer et d'être rejeté. Si elle ne m'acceptait pas et qu'elle fuyait le château, que deviendrais-je ? Je me retrouverais de nouveau seul dans quelques mois pour l'éternité. D'ailleurs, je profite de cet instant pour aborder un sujet qui me tracasse depuis un petit moment.

 

— Vous connaissais l'histoire de la bête et la belle ? Anne, je suis ce monstre. Et l'équipe de Disney était complètement idiote de penser que la jeune fille pouvait tomber amoureuse de cette ignoble créature ! C'est impossible, à part dans ces stupides dessins animés.

 

— Arrêtez de faire l'enfant, bon sang ! Je vais vous botter les fesses si vous continuez à dire sottises pareilles, menace-t-elle.

 

J'esquisse un petit sourire. Heureusement qu'elle est là, pour me remotiver et me remonter les bretelles de temps en temps.

 

— Je lui dirais tout prochainement, promis-je. Vous allez bien en ce moment ? Comment se passe votre chimio, que disent les docteurs ?

 

Elle a longtemps essayé de me cacher sa maladie et ses aller-retour à l'hôpital, mais on n'échappe pas à ma surveillance aussi facilement. J'ai tout de suite remarqué le changement lorsqu'elle a entamé le traitement. Évidemment, elle a essayé de le cacher au mieux pour ne pas éveiller les soupçons et les inquiétudes, surtout auprès d'Amé. Elle a rapidement acheté une perruque et n'a pas hésité à mettre le prix pour qu'elle ressemble le plus possible à des cheveux naturels. Le maquillage a aidé à masquer son teint blafard et ses traits tirés par la maladie. Elle m'a alors tout raconté. Les médecins ont découverts un cancer des paumons en stade avancé. L'opération a été exclue à cause de l'emplacement de la tumeur jugée trop dangereuse à retirer. Anne étant malgré tout en bonne santé, ils ont alors opté pour une chimiothérapie avec espoir de guérison. Le traitement est lourd et fatiguant, mais elle tient bon. Elle se bat pour essayer de vaincre le mal qui la ronge depuis des années. C'est une femme courageuse du haut de ses soixante-dix ans. 

 

— Très bien, je suis en rémission d'après les docteurs, sourit-elle.

 

J'aimerais me réjouir avec elle, mais je ne peux pas, car je sais qu'elle ne me dit pas la vérité. Anne a toujours été une bonne menteuse pour ne pas inquiéter les autres. J'aurais pu la croire, car elle est très convaincante. Pas de tic nerveux ou autre qui pourraient la trahir, mais malheureusement pour elle, j'ai un détecteur à mensonge infaillible. Grâce à ma condition de vampire, je peux savoir quand quelqu'un dit la vérité ou non. Comment ? Lorsqu'une personne ment, un si minime soit-il, son rythme cardiaque change et s’accélère. En être formidable que je suis, je parviens à capter cette infime différence. Anne est une femme forte, mais j'ai bien peur que la maladie finisse par avoir raison d'elle. Sa perte serait très difficile à bien des égards.

 

— Ne faites pas cette tête d'enterrement, on n'en est pas encore là. Je suis encore en vie, sourit-elle.

 

— Vous n'avez pas intérêt à mourir maintenant. N'oubliez pas que je vous ai sauvé et que votre vie m'appartient, lui rappelé-je. Et je n'ai pas encore décidé de vous laisser aller vous la couler douce au paradis.

 

Anne esquisse un sourire. Elle me connaît par cœur après tant d'années à mes côtes. Même si mes mots semblent froids et méchants au premier abord, ce n'est pas le cas. C'est ma façon d'exprimer mes sentiments de manière détournée, sans avoir l'air d'un ourson au coeur d’artichaut. Oui je sais, je suis légèrement tordu. 

 

— Je ne mourrais pas avant d'avoir assister à votre mariage avec Amé, taquine-t-elle.

 

Mon rire raisonne dans la pièce. Quelle idée absurde. Moi, une abomination de l'enfer dans une église de Dieu ? Et qui plus est avec Amé ? Le tableau bien que ridicule, me fait presque envie. Je serais ravie et émerveillé de voir Amé à mes bras, portant une magnifique robe blanche. 

 

— Parfait, alors vous ne mourrez jamais, souris-je. Maintenant allez-vous reposer. Vous avez une chimio demain si je ne me trompe pas. Soyez en forme.

 

— Oui, le taxi vient me chercher à dix heure. Je vais écouter vos conseils et aller me coucher. Bonne nuit.

 

Sur ces mots elle sort de mon bureau et me laisse seul avec mes pensées. 

 

 

 

Une semaine s'est écoulée depuis l'incident. Je pense qu'Amé a accepté de patienter et d'attendre que je sois prêt pour lui dire la vérité, puisqu'elle n'a pas remis l'incident sur le tapis. Elle n'a plus mentionné le mot "vampire" ou le meurtre de l'étudiante non plus. Je vais avoir quelques semaines de répit pour réfléchir en paix. Ma priorité est de trouver le tueur avant dire la vérité et de tout avouer à Amé. Cette dernière tâche s'avoue très compliquée et je l'appréhende énormément. Il y a deux types de personnes dans le monde : ceux qui mangent ce qu'ils préfèrent en premier et ce qu'ils aiment moins en dernier, et les autres qui font l'inverse. Il n'est pas difficile de trouver à quelle catégorie j'appartiens. Je suis évidemment du genre à remettre les choses qui m'embêtent à plus tard. Néanmoins, je commence sérieusement à réfléchir à la façon d'aborder le sujet avec Amé.

 

Je suis assis à mon bureau, en train de gribouiller diverses idées de scénario sur une feuille. On peut y lire "regarder la saga Twilight ensemble, puis lui dire que je suis aussi fantastique de son Edward". Je relis deux fois la phrase avant de la raturer. Non mais quel idiot ! Comment ai-je pu écrire de telles sottises ? On n'est pas dans le monde des bisounours. Être un vampire, c'est bien et cool dans les films, mais la réalité est plus glauque. Comment va-t-elle réagir en apprenant que je me nourris de sang ? D'animal certes, mais cela reste de l'hémoglobine. Je pousse un long soupir avant de poser mon stylo sur le bureau. Je froisse la feuille de papier dans mes mains et la jette dans la corbeille. Je verrais ça plus tard.

 

C'est à ce moment qu'on toque à la porte. Quelques secondes plus tard, Amé entre dans la pièce. Elle porte un pull gris à capuche en laine, avec deux ficelles qui se terminent par deux pompons. Une jupe plissée noire qui lui arrive au-dessus des genoux et des collants de la même couleur. Je ne peux m'empêcher de la trouver très jolie. Elle reste silencieuse, plantée devant la porte. Elle à l'air gênée. 

 

— Oui ? dis-je.

 

— Je.. je pensais aller rendre visite à mes... parents, hésite-t-elle. J'aimerais que tu sois là, j'ai peur d'y aller toute seule. Je n'ai aucune idée de ce que je vais trouver là-bas, ni de la façon dont laquelle je vais être accueillie.

 

— Je t'accompagnerais et je serais à tes côtés, la rassuré-je.

 

Je serais également plus tranquille de me savoir auprès d'elle dans cette épreuve. Je ne sais pas si elle sera là, mais si c'est le cas, Amé va voir un sacré choc. Si elle venait à pleurer ou à craquer, je serais là pour la consoler et la soutenir.

 

— Merci, sourit-elle.

 

— Quand veux-tu y aller ? 

 

— Je pensais y aller demain après-midi. C'est dimanche et généralement les gens restent chez eux quand il fait un froid de canard.

 

— C'est une bonne idée. Allons-y demain.

 

— Et je me demandais... commence-t-elle.

 

Je sens l'entourloupe venir. Je connais l'oiseau, quand elle commence une phrase comme ça ... 

 

— Demain va sûrement être un jour difficile ...

 

— Oui, et ?

 

— Et je pense, qu'un gros câlin me donnerait du courage et m'aiderait à trouver le sommeil, sourit-elle timidement. 

 

Toujours plantée devant le porte, elle reste immobile. Ses yeux me fixent et attendent de voir ma réaction. Elle se pince les lèvres, certainement d’appréhension. Elle me fait penser à un petit chaton qui cherche du réconfort auprès de sa maman, sauf que je ne suis pas sa mère. Je suis un homme, plutôt charmant à regarder avec un charisme hors du commun. J'aurai pu être président, les Français aurait été hypnotisés par tant de beauté et auraient accroché mon portrait officiel dans leur maison. Ce n'est pas étonnant que notre petite Amé ait succombé à mon charme, le contraire aurait été étrange. 

 

Cette dernière me fixe toujours. Je m'extirpe de ma chaise pour la rejoindre. Une fois devant elle, j'ouvre mes bras en grand. Elle esquisse un sourire et se réfugie contre mon torse. Je referme mon étreinte sur son petit corps et la serre contre moi. Nous restons silencieux et savourons ce moment. Après de longues minutes, elle lève la tête et son regard accroche le mien. Ses beaux yeux émeraude se perdent dans mes iris noisette. Le temps semble s'être arrêté, je pourrais la regarder pendant des heures. Je suis toujours subjugué par la beauté d'Amé, son visage d'ange fait battre mon vieux cœur de vampire. Jamais, j'aurais pensé éprouver de tels sentiments pour quelqu'un, la vie est pleine de surprises et d'imprévus. Son magnifique sourire est mon rayon de soleil quotidien depuis des années. Je suis maintenant hypnotisé par ses lèvres charnues, je n'arrive pas à détourner le regard. Je meurs d'envie de l'embrasser. Je me penche lentement et effleure doucement le fruit défendu. Je veux faire durer ce désir et cette envie avant de craquer, mais Amé est plus impatiente que moi. Elle pose sa main sur ma nuque et m'attire contre elle avant d'écraser sa bouche contre la mienne. Notre baiser est d'abord doux, timide, avant de devenir passionné et fougueux. Je savoure ce contact, ses sensations étranges que me fait ressentir la jeune femme. En ces instants, j'oublie que je suis un vampire, je suis juste un homme. Un homme fou amoureux de la femme qui est dans ses bras. Elle entrouvre ses lèvres et ma langue se faufile à l’intérieur à la recherche de la sienne. Nous nous embrassons ainsi pendant de longues minutes avant de nous séparer à contre-cœur.

 

— Je pense que je vais bien dormir ce soir, sourit-elle.

 

— Bonne nuit Amé.

 

— Bonne nuit Dra.

 

Sur ces mots, elle se dresse sur la pointe des pieds pour déposer un rapide baiser sur les lèvres. Elle sort de la pièce et me laisse seul. J'ai l'impression qu'une tornade est entrée dans la pièce avant de disparaître. Les battements de mon cœur reprennent petit à petit, leur rythme habituel. J'ai besoin d'un petit remontant. Je quitte mon bureau pour rejoindre la cave afin de siroter un peu de sang dans mon havre de paix. Demain va être une longue et dure journée.

 

Nous sommes garés dans la rue et plu précisément, en face de la maison des parents d'Amé. Cette dernière n'a pas prononcé un seul mot de la matinée, elle a été silencieuse tout le trajet. Une vrai carpe. Elle a dû s'imaginer une centaine de fois la scène qui va se produire, mais malheureusement, toutes sont loin de la vérité. Je regarde ma montre : quatorze heures cinq. Cela fait presque dix minutes que nous sommes ici.

 

— Tu veux rentrer Amé ? proposé-je. On peut encore faire demi-tour tu sais.

 

— Non, répond-elle immédiatement. 

 

Elle tourne la tête vers la vitre et observe la maison depuis la route. Elle est grande avec un joli extérieur, bien entretenu. Deux voitures, une Mercedes et une Audi cabriolet sont stationné dans la cour. Je le savais déjà, mais Mr et Mme Blanchard ne manquent pas d'argent. Amé triture nerveusement sa petite couverture rose entre ses doigts. Elle a tenu à l'emporter avec elle, en tant que preuve de son identité. Je pense qu'elle n'en aurait pas besoin. Je suis sûr d'une chose : ils vont la reconnaître à l'instant où ils poseront leurs yeux sur elle.

 

Nous observons avec désolation l'extérieur. Le temps n'est pas clément aujourd'hui. Il pleut à corde dehors, la pluie s’abat violemment sur le pare-brise.

 

— J'espère que cela n'est pas un signe concernant la rencontre, chuchote-t-elle.

 

Je ne dis rien, je me contente de poser ma main sur la sienne. J'aimerais que les retrouvailles se passent bien, mais je sais que ça ne serait pas le cas. Après cette rencontre, Amé pourra enfin faire le deuil de ses parents et avancer dans la vie sans ressasser le passé. 

 

— Allons-y. Prépare toi à courir. On y va à trois. Un. Deux. Trois !

 

Au signal, on sort de la voiture et on se précipite vers l'entrée de la maison. Nous arrivons sur le porche, trempés. Amé arrange rapidement ses cheveux et prend une grande respiration avant de sonner, la main tremblante. J'entends les battements de son cœur s'emballer et sa respiration s'accélérer. Elle appuie une nouvelle fois sur la sonnette. Après de longues minutes, la porte s'ouvre enfin. 

 

 

 

Une jeune fille se tient sur le pas de la porte. Mince, je n'imaginais pas la rencontre aussi rapide. Pourquoi diable, a-t-il fallut que ça soit elle qui nous accueille ? Amé et l'inconnue se fixent. Leurs expressions passent de la surprise au choc. Les jambes de ma petite protégés semblent se dérober sous ses pieds, je la rattrape de justesse. Je passe une main derrière son dos et enserre sa taille pour l'aider à tenir debout. Elle nage en plein cauchemar. C'est comme si elle faisait face à un miroir qui lui renvoi sa propre image. Où plus précisément sa jumelle. Je ne l'avais jamais vu en chair et en os, seulement en photos que mon détective m'avait remis. Elle est effectivement le portrait craché d'Amé, avec un carré plongeant. Seules leurs coupes de cheveux les différencient. Je suis moi-même déboussolé par la scène. C'est extrêmement étrange de voir quelqu'un identique à la personne qu'on aime. Je jette un regard à cette dernière. Elle est livide, blanc comme un linge. Je peux entendre les battements de son cœur accélérer.

 

— C'est quoi ce bordel ?! s'exclame l'inconnue. Maman, hurle-t-elle.

 

Quelques secondes plus tard, une femme d'une quarantaine d'années apparaît aux côtés de sa fille. La ressemble entre la mère et ses enfants est frappante, on ne peut nier le lien familiale qui les unis. Ses cheveux châtains foncés sont attachés en queue de cheval. Elle porte un chemisier blanc et un pantalon noir. Ses yeux verts s'écarquillent lorsque qu'ils se posent sur Amé et sa petite couverture rose. Elle reconnait l'enfant qu'elle a lâchement abandonné devant ma porte, il y a vingt ans. Elle porte sa main devant sa bouche légèrement ouverte.

 

— Oh mon dieu, lâche-t-elle la gorge nouée par l'émotion.

 

Je jette un œil à Amé. Elle dévisage tour à tour, les deux femmes devant elle. Les lèvres pincées, les yeux humides, elle tente de retenir ses larmes. Elle vient de comprendre. Ses parents ont donnés naissances non pas à une, mais à deux jolies petites filles. Malheureusement, ils ont choisi d'en garder qu'une seule. Ils ont abandonné l'autre dont ils ne voulaient pas, elle. La vérité est parfois cruelle et injuste, Amé vient de l'apprendre à ses dépends. Elle était à milles lieux de la réalité, jamais elle n'avait pensé et imaginé avoir une sœur.

 

— Ma chérie, va préparer du thé. Je vais installer nos invités dans le salon. Entrez, nous invite-t-elle d'un geste.

 

Amé reste immobile, elle est encore choquée. Elle a visiblement beaucoup de mal à encaisser la nouvelle et je la comprends. Je lui caresse doucement le dos et la pousse délicatement à l'intérieur. On suit Madame Blanchard, dans le plus grand silence. On pénètre dans une pièce où se trouve deux canapés et trois fauteuils en cuir et une grande télévision. L'ambiance est chaleureuse. Le feu qui danse dans la cheminée apaise, mais il en faudrait plus pour détendre la boule de nerf qui se trouve à côté de moi. En ce moment, elle fait fasse à deux fortes émotions : la tristesse et la haine. 

 

— Je vous en prie, asseyez vous, nous invite Madame Blanchard.

 

Elle désigne une banquette et prend place sur celle en face. Son regard ne quitte pas Amé, mais cette dernière évite soigneusement tout contact visuel. Il règne un grand silence jusqu'à ce que la jumelle entre dans la pièce avec un plateau, qu'elle place au centre de la table basse. Sa mère se penche pour déposer une tasse de thé devant nous. La copie conforme d'Amé prends place auprès de sa génitrice avant d'observer d'un air mauvais et hautain sa sœur. 

 

— Bon, on m'explique pourquoi une fille qui me ressemble comme deux gouttes d'eau est assise dans notre salon ? ronchonne-t-elle. 

 

— Iris, je te présente ta sœur jumelle... s'interrompe-telle en m’interrogeant du regard.

 

— Améthyste, répondé-je simplement.

 

— Ta sœur Améthyste, répète-t-elle bêtement en souriant.Très jolie prénom.

 

Ma protégée relève les yeux et lance un regard noir à sa génitrice que celle-ci ignore. Je pense qu'elle ne doit pas apprécier qu'elle émette un jugement sur le prénom que je lui ai choisi.

 

— Et qu'est-ce qu'elle fait là ? demande-t-elle à sa mère avant de se tourner vers Amé. Tu es venue demander de l'argent ? Parce que si c'est ton but, tu peux repartir d'où tu viens ! Tu n'auras rien, pas un centime, crache-t-elle.

 

— Iris ! Surveilles tes paroles, la reprend Madamde Blanchard. Au lieu de dire des âneries, va donc chercher ton père.

 

La jeune fille quitte le salon et nous laisse seule avec sa mère. Personne n'ose parler, on pourrait entendre une mouche voler. Mon attention est portée sur Amé, elle n'a pas prononcé un seul mot depuis qu'on est entrer dans la maison. Elle reste silencieuse, perdue dans ses pensées. Finalement, c'est notre hôte qui brise le silence en s'adressant à sa fille.

 

— Comme tu as grandi, tu es devenue une très jolie femme, complimente-t-elle.

 

Amé la dévisage avant de rire nerveusement. Le compliment à du mal de passer. Sa mère se contente de la regarder, sans faire de remarque. Elle comprend que la situation est difficile et compliquée pour son enfant. Cette dernière retrouve son sérieux et se penche pour saisir sa tasse. Elle porte lentement la porcelaine à ses lèvres et boit deux gorgées avant de reposer son thé sur la table.

 

— Pourquoi ? demande-t-elle sèchement en la regardant droit dans les yeux.

 

Sa mère semble surprise et désorienter par la question. 

 

— Pardon ? s'excuse-t-elle sans comprendre où sa fille veut en venir.

 

— Pourquoi m'avez vous abandonnée ? M'aviez-vous seulement donné un prénom, ou seule Iris a eu droit à ce privilège ? crache-t-elle.

 

Un voile de tristesse apparaît dans le regard de Madame Blanchard. Elle semble embêtée et gênée par la question d'Amé. Alors qu'elle ouvre la bouche pour répondre, un homme pénètre dans la pièce suivit de près par sa fille. Ses cheveux châtains ont commencé à grisonner sur les côtés. Son visage est fermé, il affiche une expression sévère. Son mari n'a pas l'air d'un homme très marrant. Il n'a pas intérêt à avoir un geste ou une parole déplacés avec ma douce Amé, sinon il va le regretter amèrement. Il balaye la pièce du regard et ses traits durcissent lorsque son regard se pose sur son enfant abandonné. 

 

— Tu sais qui sont ces gens papa ? questionne Iris.

 

— Pour le jeune homme, je n'ai aucune idée de qui il s'agit. En revanche, je devine qui est cette jeune fille, lance-t-il d'un air méprisant.

 

 

— C'est effectivement votre fille que vous avez lâchement abandonné devant ma porte à sa naissance, affirmé-je.

 

 

Je l'observe attentivement. Il ne réagit pas à ma remarque. Ce type n'éprouve aucune honte ou gène face à son acte. Il s'en fou royalement, ce qui à le don de m'énerver. J'ai envie de le secouer pour reconnecter ses neurones visiblement défectueux. Comment ne peut-il rien éprouver face à Amé ? Il n'y a pas une once d regret ou remords dans son regard, contrairement à sa femme. 

 

— Et que nous vaut cette visite, vingt ans après ? demande-t-il.

 

— Je voulais vous rencontrer afin d'avoir des réponses. Pourquoi ai-je été abandonné par exemple.

 

Son père pousse un long soupir.

 

— Et à quoi ça te servirait de savoir ça, jeune fille ? Tu aurais mieux fait de nous oublier comme nous l'avons fait.

 

— Chéri ! intervient Madame Blanchard. 

 

Cette dernière lance un regard noir à son mari avant de se tourner vers Amé.

 

— Je vais tout te dire, tu mérite bien la vérité après tout, soupire-t-elle lasse. Quand je suis tombée enceinte, j'avais à peine vingt deux ans. C'était un accident, on ne voulait pas être parent aussi jeune. Nous n'avions pas vraiment d'argent pour élever un enfant. C'étais complètement inconscient de vouloir gardé le bébé, mais je ne pouvais pas avorter, j'en était incapable. Alors j'en ai discuter avec Samuel. Nous étions ensemble depuis quatre ans, nous savions que notre relation était stable et que nous nous aimions très fort, alors nous avons décider de ne pas avoir recourt à l'IVG. Malheureusement, il y a eu un imprévu. Lors que la première échographie, on nous a annoncé une grossesse gémellaire. C'était la catastrophe. Nous n'avions déjà pas beaucoup d'argent pour un enfant alors deux ? Comment allions-nous faire ? s'étrangle-t-elle les larmes aux yeux.

 

— Suzanne, chuchote son mari. Tu veux que je raconte la suite ?

 

— Non, ça va aller Sam, merci. Nous ne pouvions pas élever deux enfants, déjà un ça allait être difficile.

 

Amé parcours la pièce du regard, observant les signes de richesse de la famille comme le mobilier de luxe. Elle se rappelle de la façade de la maison et l'extérieur. Elle jette un rapide regard à ses parents et sa jumelle. Ils portent de beaux vêtements et des beaux bijoux. Suzanne esquisse un faible sourire.

 

— Nous n'étions pas aisés il y a vingt ans. Samuel n'avait pas encore créé son entreprise, nous étions de jeunes adultes. Je n'avais pas de travaille à l'époque, nous avions qu'un seul salaire pour subvenir à nos besoins. En y réfléchissant, même garder un seul enfant, c'était de la folie. La raison aurait voulu que j'avorte, mais le cœur s'y opposait. Alors nous avons pris cette décision lâche et cruelle. Nous avons abandonnés un des bébés après l'accouchement. Tu m'as demandé tout à l'heure, si je t'avais donné un prénom ? Oui, chuchote-t-elle après une courte pause.

 

Elle se pince les lèvres pour contenir l'émotion qui la submerge. Cette femme est émue, ce n'est pas facile pour elle de parler du passé. Elle tourne la tête vers le buffet, dernière le fauteuil où est assit son mari. Je mets quelques secondes avant de comprendre que c'est en fait le vase qui s'y trouve qu'elle fixe et non le meuble. Il contient de jolies fleurs blanches, dont je n'arrive plus à me rappeler le nom. Je l'ai pourtant au bout de la langue. 

 

— Lys, soupire Suzanne d'un air nostalgique. C'était le nom que nous t'avions donné, sourit-elle tristement.

 

Je jette un regard à Amé qui semble bouleversée. Elle fixe les fleurs d'un air triste, ses yeux se remplissent petit à petit de larmes qu'elle essaye de contenir en clignant des paupières. Je pense qu'elle a toujours pensé que ses parents n'avait pas pris la peine de lui donné un prénom. 

 

— J'ai honte du choix que nous avons pris Améthyste, je l'ai regretté chaque jour depuis que je t'ai abandonné sur ces marches. Je me suis posée mille et une question depuis que je t'ai laissé devant la porte de ce château. Ma fille est-elle encore en vie ? Comment se porte-t-elle ? Grandit-elle dans de bonnes conditions ? Est-elle bien entourée ? Donne lui t-on autant d'amour que je le fais avec Iris ? J'ai tellement honte, si tu savais. Je n'ai pas eu la chance de voir mon bébé devenir la belle jeune fille que tu es aujourd'hui, sourit-elle tristement.

 

Elle fait une pause pour essayer les larmes qui coulent sur ses joues. Je suis surpris des paroles prononcées par Madame Blanchard, je doute un instant de son honnêteté. On pourrait croire que tout ceci n'est qu'un tissu de mensonge et qu'il n'y a pas une once de vérité dans ses mots, mais c'est faux. Elle est sincère et je le sais mieux que quiconque. Les battements de son cœur ne mentent pas, leur rythme est régulier et constant.

 

— Tu vas gâcher ton maquillage maman, avertit Iris.

 

Je l'avais presque oublié celle-là. Elle n'a pas l'air ravie de voir sa mère dans cet état à cause d'Amé. Je sens de la jalousie mal placée venir de cette petite garde. Pour avoir un sale caractère comme ça, elle a dû être pourrie gâtée par ses parents et surtout par sa mère. Je pense que par culpabilité envers son enfant abandonné, elle a reporté tout son amour sur celui qu'elle avait décidé de garder. Cédant au moindre caprices de sa fille.

 

— Iris, je m'en fous de mon maquillage ! Mon mascara peut bien couler et me faire ressembler à un panda, c'est le dernier de mes soucis, dit-elle en lui lançant un regard noir. Tu n'es donc pas contente de savoir que tu as une jumelle ?

 

La jeune fille ne répond pas, mais ce qu'elle pense peut se lire sur son visage : "non". La pauvre chérie a peur que l’existence de sa jumelle change quelque chose et brise son petit cocon. Cette fille est née avec une cuillère en argent dans la bouche et a sans doute été sur-protégée depuis son enfance. Résultat, la vie qu'elle a eu et son éducation ont fait d'elle une égoïste, une capricieuse et une peste.

 

— Ta mère a beaucoup souffert de t'avoir abandonné. Je ne peux malheureusement pas en dire autant pour ma part. Je vais peut-être paraître cruel et méchant, mais je ne ressens rien pour toi Améthyste. Après tout, je ne t'ai pas connu et je n'ai pas eu le lien spéciale qui unis un bébé et sa mère. Suzanne t'as porté dans son ventre et t'as senti bougé. Elle t'a mise au monde, je conçois que ce n'est pas rien. 

 

Les mots qui sortent de la bouche de Mr Blanchard sont durs. Même si elle le cache, je sais qu'Amé est très touchée. Je la connais mieux que quiconque, j'ai capté ce changement d'expression même infime. Son visage s'est crispé pendant quelques instant avant qu'elle ne se reprenne. Ses paroles me mettent en rogne, je déteste plus que tout voir la femme que j'aime blessée. A l’instant même où je m'apprête à bondir du canapé pour m'occuper personnellement de ce con, je sens une main se poser délicatement sur la mienne. Je sursaute, légèrement surpris par ce geste. Je tourne la tête et croise le regard emprunt de tristesse d'Amé. Ses iris émeraude sont ternes, il n'y a plus cette lueur, cette petite étincelle qui la caractérise. Elle esquisse un faible sourire.

 

— Ca va, me rassure-t-elle.

 

— Non, ça ne va pas, m'emporté-je en fusillant son père du regard. Amé a rassemblé tout son courage pour venir rencontrer sa famille, pour avoir des réponses et qu'est-ce qu'elle a en retour ? Un père biologique froid comme une porte de prison et une petite peste en guise de jumelle ! craché-je.

 

Cette dernière écarquille les yeux et ouvre la bouche en laissant échapper un "Oh!". Monsieur Blanchard garde un visage inexpressif, impossible de savoir ce qu'il pense. 

 

— Vous pourriez et vous devriez mesurer vos propos à l'égard de votre fille. Je comprends tout à fait que vous ne ressentiez pas d'amour paternel envers elle ou autre, mais je vous interdis de lui cracher votre venin à la figure, menacé-je.

 

— Dra, arrête s'il te plait, me supplie Amé mal à l'aise.

 

Je ne l'écoute pas, mon regard ne quitte pas son père biologique. Ce dernier me toise quelques secondes avant de répondre.

 

— Pourriez-vous me rappeler qui vous êtes au juste Monsieur ?

 

— Je suis Dracula DE ROSNAY, je suis le propriétaire du château où votre femme a abandonné votre fille. Et je ne tolérer aucune parole déplacé à son égard. 

 

Monsieur Blanchard me dévisage un moment. Il semble surpris, presque curieux. Il réfléchit un instant et prend à son tour la parole.

 

— Vous êtes l'homme qui a recueillie mon enfant il y a vingt ans, c'est ça ? Pourtant vous semblez très jeune. Quel âge avez-vous ? Vingt-cinq ou peut-être vingt-huit ans? Comment auriez-vous pu élever ma fille Monsieur DE ROSNAY ? demande-t-il.

 

— Il ment papa, c'est un charlatan, intervient Iris.

 

Si cette écervelée pouvais la mettre en veilleuse... Ses parents ne lui ont pas appris à ne pas intervenir dans les conversations d'adulte ? En encore moins pour sortir des stupidités ! C'est officiel, cet homme et sa fille me sorte par le nez. Qu'est-ce que mon âge peut bien lui faire à ce guignole ? J'ai cent cinquante huit ans, je pourrais même le tutoyer et l'appeler jeune homme. C'est moi l'ancien ici, bon sang ! Mais si je lui répond la vérité, il va me prendre pour un taré.

 

— Mon âge ne vous regarde pas, répondé-je sèchement.

 

— Ma fille vie seule sous votre toit ? Avez-vous osé abuser d'elle ? s"offusque-t-il.

 

Je ne sais pas ce qu'il m'énerve le plus. Le fait qu'il semble retrouver son instant paternel à la mords-moi-le-nœud et s'inquiéter pour sa fille ? Où le fait qu'il ose sous entendre que je viole Amé ? Je lui lance un regard noir. Je tremble de rage, je me retiens pour ne pas bondir sur lui et l'envoyer valser à l'autre bout de la pièce. Mon sang pulse dans mes veines et mon cœur accélère. Je dois me contenir ou je vais commettre un massacre. Cette dernière semble s’apercevoir de mon état, elle enlace ses doigts avec les miens.

 

— Je vous interdis d’insinuer ce genre d'horreur sur Dracula. Sans lui à l'heure actuelle je serais morte de froid sur ses marches. Il n'a jamais eu un seul geste déplacé envers moi et le fait que vous y pensez, m'offense profondément. C'est un homme respectable avec beaucoup de valeur. Je ne devrais même pas répondre à votre question, mais je vais le faire. J'ai été élevée et éduquée par une personne merveilleuse, Anne. Elle m'a tout appris et elle s'est occupée de moi comme l'aurait fait une mère. Aujourd'hui je me suis rendu compte d'une chose. J'aurais pu vous haïr pour ce que vous m'avez fait, mais ce n'est pas le cas. Au contraire, je voudrais vous remercier de m'avoir abandonné. Car grâce à votre geste, j'ai pu rencontrer deux formidables personnes que j'aime du plus profond de mon cœur. Et surtout, je ne ressemble pas à cette peste d'Iris, si vous m'avez garder, j'aurais pu être elle ou comme elle. Je préfère cent fois être la personne que je suis aujourd'hui et avoir vécu sans mes parents biologiques. J'en ai beaucoup souffert par le passé, mais maintenant, je peux vivre en paix, sans regrets. Alors je le répète, mais, merci de m'avoir déposer devant ce château dans cette petite couverture rose.

 

Iris fusille sa sœur du regard tandis que Monsieur Blanchard, comme à son habitude, reste impassible. Suzane quant à elle, semble émue. Elle renifle à deux reprises et essuie quelques larmes.

 

— Je suis ravie pour toi Améthyste, tu as l'air d'avoir rencontrer de belles personne. Je ne connais pas cette Anne, mais de la façon dont tu en parles, je suis contente qu'elle ai pris mon rôle de maman, sourit-elle. Concernant Iris, commence-t-elle en jetant un regard à sa fille.

 

— Quoi ?! demande cette dernière en faisant les gros yeux.

 

— Tu as raison, soupire-t-elle en se concentrant à nouveau sur Amé. Nous l'avons beaucoup trop gâtée et elle est....

 

— Je suis quoi ? demande Iris en croisant les bras et dévisageant sa mère.

 

— Tu es ... Iris, sourit-elle. 

 

Traduction : Tu es une peste, mais je t'aime quand même car tu es ma fille. J'éprouve presque de la compassion pour Madame Blanchard. Vivre au quotidien avec ses deux sales caractères, cela ne doit pas être facile tous les jours. Elle a bien du courage de les supporter. A sa place, j'aurais abandonné Iris depuis bien longtemps devant la porte d'un internat. Ça ne lui aurait pas fait de mal, au contraire, cela lui aurait fait les pieds.

 

 

Iris fait la moue et croise les bras. Ça y est, le bébé boude et le fait savoir à tout le monde en émettant un petit "Hum". Amé dévisage sa jumelle quelques instants. Elle doit se dire qu'elle a eu de la chance, si elle n'avait pas été abandonnée à la naissance, elle aurait pu finir comme sa sœur. C'est-à-dire avoir beaucoup de qualités telles que:  égoïste, capricieuse, boudeuse, imbue de sa personne, malpoli et j'en passe. Je n'ai pas assez de mes dix doigts pour tout énumérer. 

 

— Je pensais que tu m'aimais... se plaint la jeune fille.

 

— Bien sûr que je t'aime, la rassure sa mère. N’interprète pas mal mes paroles.

 

 Iris esquisse un petit sourire et Madame Blanchard l'imite avant de reporter son attention sur Amé. 

 

—Tu as été très courageuse Améthyste pour venir nous rencontrer après autant d'années. Je suis ravie d'avoir pu te retrouver et je regrette de ne pas en avoir fait autant pour te retrouver. J'aurai dû être la personne qui frappe à ta porte et non l'inverse. J'aimerais qu'on se revoie de temps en temps, commence-t-elle avant de faire une pause pour analyser la réaction d'Amé.

 

Cette dernière semble surprise par la requête de sa mère et moi aussi. Je ne sais pas quoi en penser. Est-ce une bonne idée pour elle de renouer avec sa famille biologique ? Ne va-t-elle pas être encore déçue d'eux ? J'aimerais qu'elle évite de fréquenter la porte de prison qu'est son père et sa peste de jumelle. Ces gens-là ne lui apporteront rien dans la vie. Mais c'est à Amé de décider, ce sont ses choix.

 

— Je sais que c'est culotté de ma part de te demander ça, mais je prends le risque de le faire quand même. Je voudrais vraiment apprendre à connaître la jeune femme qu'est devenue ma fille. Si tu souhaites couper tout contact une fois sortie de cette maison, je respecterais ton choix. Je ne te forcerais à rien Amé, la rassure-t-elle.

 

— J'avoue que je ne m'attendais pas à ça. Je ne sais pas quoi dire, chuchote Amé. 

 

— Tu n'es pas obligé de répondre maintenant. Prends ton temps. Digère cette rencontre et les informations que tu as eues. Je n'ai pas vu ma fille pendant vingt ans, je peux encore attendre pour la revoir à nouveau, sourit-elle. J'attendrais que tu sois prête, et si tu ne t'en sens pas capable, je ferais avec tout en te souhaitant beaucoup de bonheur dans ta vie.

 

Iris lève les yeux au ciel, elle n'est pas très enchantée des mots qui sortent de la bouche de sa mère. Amé remarque le petit manège de sa sœur et cela semble l’agacer. Je crois que sa patience à atteint ses limites.

 

— Tu as un problème Iris ? sourit-elle.

 

Cette dernière dévisage sa jumelle avec un air outrée. Elle ne s'attendait pas à ce que sa sœur lui adresse la parole. Ses yeux s'assombrissent avant de lancer un regard noir à Amé.

 

— Ta naissance est un problème, crache Iris. 

 

— Iris, gronde simultanément ses parents. 

 

— Tu sais ce qu'on dit ? La méchanceté et la bêtise humaine sont des armes redoutables que les faibles d'esprit utilisent pour se sentir supérieurs, répond Amé en souriant.

 

Les deux filles se dévisagent, les yeux semblent se lancer des éclairs. 

 

— Bravo Amé, tu as bouffé un livre sur les citations au déjeuner ? tacle-t-elle.

 

— Désolé Iris, la bave du crapaud n'atteint pas la blanche colombe, rétorque la jeune femme.

 

— Faut-il encore que tu sois blanche comme neige...

 

Son regard de glace se pose sur moi. Qu'est-ce que j'ai fait ? Bien que j'ai une folle envie de l'encastrer dans un mur ou de la brûler dans la cheminée, je me retiens. Je ne sais pas comment, mais je résiste. On devrait me remettre une médaille ! Alors pourquoi est-ce qu'elle me fixe comme ça en affichant son petit sourire narquois ? Bon sang, que cette fille est horripilante. Je vais en faire des cauchemars cette nuit. 

 

— Si j'ai bien compris, cet homme t'as dépucelé depuis bien longtemps. Traînée, crache-t-elle.

 

Quatre paires de yeux s'écarquillent. Comment ose-t-elle insulter ainsi d'Amé ?! Parler ainsi d'elle me fous en rogne, encore plus alors qu'il ne s'est encore absolument rien passé entre nous. J'ai envie de la gifler. Cette fille n'est bonne qu'à cracher son venin !

 

Tout s’enchaîne si vite. Amé se lève du canapé en direction de sa jumelle, quand elle se fige sur place. Un bruit résonne dans la pièce. Iris se tient la joue et regarde son père avec surprise. Elle n'est pas la seule, sa sœur et moi même, sommes également étonné de la scène. Monsieur Blanchard a bondi de son fauteuil et a giflé sa fille. Il la dévisage d'un air mauvais, ce qui n'a jamais du arriver avant aujourd’hui. Je suis même sûr que c'est la première fois que son père lève la main sur elle.

 

— Mesure tes paroles jeune fille, averti calmement son père. Il y a des limites à ne pas franchir Iris. Tu n'aimes peut-être pas ta jumelle, mais tu lui dois le respect. 

 

Amé dévisage son paternel, la bouche ouverte. Je suis également surpris de la scène qui vient de se dérouler devant moi. Si on m'avait dit que c'est Monsieur Blanchard qui défendrait sa fille, je ne l'aurais pas cru. Iris se lève du canapé, les larmes aux yeux. Allez,bébé va aller bouder dans 3...2...1.

 

— Je vous déteste tous ! Allez en enfer, crache-t-elle avant de quitter la pièce en furie.

 

Son père se rassoit dans son fauteuil sous les soupirs de sa femme.

 

— Je suis sincèrement désolée des mots qu'Iris a prononcés Amé, s'excuse Suzanne. C'est inadmissible. Nous en reparler ce soir entre nous, pour que ça ne se reproduise plus à l'avenir.

 

Ma protégée se contente de hocher légèrement la tête en guise de réponse. Je pense qu'elle a atteint sa limite pour aujourd'hui. Elle a beaucoup d'informations à digérer et les méchancetés d'Iris à oublier. Elle va devoir également savoir ce qu'elle fait avec ses parents, à savoir garder ou non le contact avec eux. C'est à ce moment que je ressens une présence hostile, la même qu'au bal. Je suis sûr qu'il s'agit du meurtrier. Je tourne brusquement la tête vers la baie vitrée du salon, mais je ne vois personne. J'ai beau analyser le paysage extérieur, je ne perçois rien d'anormal. Le suspect à dû déguerpir, la présence maléfique s'est atténuer. Je ne ressens plus ces mauvaises ondes.

 

— Quelque chose ne va pas ? demande Suzanne.

 

Oui, le fumier qui a traumatisé ma douce Amé est dans le coin et je dois le retrouver. Je vais lui faire sa fête et m'en débarrasser afin de m'assurer qu'il soit hors état de nuire. Je ne peux laisser un danger pareil en liberté dehors. Je dois mettre la main dessus, coûte que coûte. Nous devons quitter cette maison au plus vite avant qu'il ne soit trop loin et qu'il m'échappe à nouveau.

 

— Nous allons y aller et vous laisser profiter du dimanche. Amé à besoin de réfléchir à tout ça, informé-je.

 

Cette dernière me dévisage, elle doit se douter qu'il se passe quelque chose. La jeune femme acquiesce d'un mouvement de tête et se lève en remerciant nos hôtes pour le temps qu'ils nous ont consacré. Nous suivons Monsieur et Madame Blanchard jusqu'à la porte d'entrée. Je leur adresse un simple "au revoir". Amé m'imite tout en esquissant un petit sourire par politesse.

 

—J'aimerais qu'on se fasse la bise, si ce n'est pas trop te demander, propose Suzanne timidement.

 

— Ça ne me dérange pas, la rassure Amé avant de l'embrasser sur la joue.

 

Sur ces rapides embrassades, nous sortons enfin de cette maison. Une fois devant la voiture, je tends les clefs à la jeune femme.

 

— Tu vas devoir rentrer sans moi, j'ai quelque chose à faire avant de rentrer.

 

— Qu'est-ce qu'il se passe ? demande Amé inquiète.

 

—Rien d'important, mens-je.

 

Elle fronce les sourcils, elle n'a pas l'air satisfaite de ma réponse. Je ne veux pas l'inquiété pour la faire paniquer, je préfère qu'elle ignore tout. Je m'en occuperais moi-même, car si comme je le pense, cette personne est un vampire, la police ne l'arrêtera jamais. Pour combattre un être assoiffé de sang, rien de mieux qu'un de ses confrères.

 

— Je ne peux pas venir avec toi ? insiste-t-elle.

 

— Non, répondé-je catégoriquement. Rentre à la maison retrouver Anne pour la rassurer de ta rencontre avec tes parents. Je n'en ai pas pour très longtemps.

 

Elle soupire et attrape les clefs avant de monter de la voiture. Elle claque la portière en me lançant un regard noir. Désolé Amé, je préfère te tenir à l'écart de cette affaire, même si tu mens veux. Elle met le contact avant de démarrer. Je regarde la voiture s'éloigner puis disparaître de mon champ de vision. 

 

Ce que je ne savais pas, c'est que j'allais regretter toute ma vie de ne pas avoir raccompagné Amé à la maison et de l'avoir laissé toute seule. Ce jour-là, je me suis fait avoir en beauté et je suis tombé bêtement dans son piège.

 

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Commentaires: 2
  • #1

    Bubulle (samedi, 08 décembre 2018 10:52)

    Coucou!
    Ça fait bien longtemps que je t’ai envoyé un message :/ les etudes è.é
    Je suis toujours avec beaucoup d’impatience tes histoires, tu écris avec beaucoup de talent, ça me rend heureuse ^^
    J’espere que tout ce passe bien pour toi :)
    Bisous bisous

  • #2

    Hanna (lundi, 10 décembre 2018 15:13)

    Coucou !!

    Oh merci pour ton joli commentaire :)
    AH les études je connais, ça prends du temps ! :/ Je suis bien contente d'en avoir fini XD
    J'espère que la suite te plaira également :)
    A très bientôt

    Bisous

    HAnna