One Shot

 

 

 

Avez-vous déjà eu des regrets ?

 

Oui.

 

Avez-vous déjà voulu remonter le temps pour changer le passé ?

 

Oui.

 

Vous êtes-vous déjà dit que cela aurait dû être vous ?

 

Oui.

 

Vous-être-vous déjà demandé si vous méritiez vraiment de vivre ?

 

Oui.

 

 

Moi, je me suis posé toutes ses questions un nombre incalculable de fois. Et les réponses sont toujours les mêmes.

 

Tous les ans, à la même date, je viens m’asseoir sur ce même banc en bois, dans ce parc. C'est une sorte de rendez-vous commémoratif, afin de ne jamais oublier. Elle et mes erreurs de jeunesse. Le 22 Décembre 20XX. Ce jour a changé la vie de beaucoup de monde. La mienne, celle de ma famille et de sa famille. Pire encore, sa vie s'est achevée alors qu'elle n'avait que 17 ans. Elle était encore qu'une gamine lorsque je lui ai enlevé son avenir, son futur. Oui, j'ai tué ma petite amie.

 

La neige tombe depuis déjà quelques heures, peu de courageux ont osé sortir pour se promener dans le parc. Les gens préfèrent rester au chaud chez eux et je les comprends. A leur place, c'est aussi ce que j'aurais fait. 

 

Pourquoi cet endroit ? Parce que nous aimions nous asseoir sur ce banc en profitant du paysage en fonction de la saison. Le printemps, nous regardions les cerisiers fleurir. L'été, nous mangions des glaces ou des crêpes. L'automne, cela nous amusait de voir les arbres perdre petit à petit leurs feuilles. Et enfin, l'hiver, la magie de Noël nous faisais rêver. La neige, les décorations et les illuminations réchauffaient nos cœurs. Alors c'est ici que j'ai choisi de me recueillir en sa mémoire.

 

Mais aujourd'hui, je suis seul. Tous les 22 Décembre, depuis 10 ans, j'honore ce triste rendez-vous glauque et funèbre. Je sais que cela ne sert à rien, que cela ne va pas la ramener et encore moins enlever la culpabilité qui me ronge depuis une décennie. Je devrais m'y résoudre, je vais devoir vivre avec toute ma vie.

 

— Je savais que je te trouverais ici, soupire une voix derrière moi.

 

Un homme aux cheveux couleur ébène s'assoit doucement à mes côtés. Ses yeux noirs me scrutent quelques secondes avant de fixer un point imaginaire devant lui. 

 

— Oublie-là Sasuke, ça fait dix ans maintenant... Tout le monde fait des erreurs, même toi. Tu n'es pas parfait. Je pense que tu t'es assez blâmé et puni comme ça, tu as le droit de te pardonner.

 

— Putain Itachi ! J'ai tué quelqu'un ! rugis-je. Ce n'est pas qu'une erreur, j'ai ôté la vie à quelqu'un, à ma petite amie !

 

Mon frère est bien gentil à vouloir me consoler et à minimiser mes actes, mais ça ne m'aide pas pour autant. Le poids de la culpabilité me ronge de l'intérieur et je ne sais comment m'en défaire. Je ne sais comment racheter mes pêchés.

 

— Tu n'es pas le premier et tu ne seras pas le dernier à tuer quelqu'un lors d'un accident, s’énerve Itachi. Arrête de vouloir porter toute la misère du monde sur ton dos, bon sang ! Grandis un peu ! Umé n'est pas la seule à être morte ce jour-là, moi, j'ai perdu mon frère. Tu es resté ce garçon de dix-huit ans, tu es resté bloqué à ce fameux jour. 

 

Il exagère. J'ai malgré tout avancé dans la vie, je me suis lancé corps et âme dans la médecine afin de devenir médecin et sauver des vies. C'est la façon que j'ai trouvé pour me racheter auprès d'Umé. Cela fait tout juste six mois que je suis médecin généraliste et que je me suis installé dans un cabinet. Mais il est vrai, que sentimentalement ma vie est un désert. Je n'ai plus jamais voulu aimer qui que ce soit. Plus aucune fille n'a suscité d’intérêt à part pour satisfaire, de temps en temps, les besoins de Sasuke Junior. Je ne me souviens plus non plus, de la dernière fois que j'ai rie ou souris. Je suis devenu quelqu'un de froid et grincheux.

 

— Itachi, j'ai pas besoin qu'on me fasse la morale.

 

— Non, c'est vrai. Tu as besoin de coup de pied au cul, sourit mon frangin.

 

Intérieurement, j'ai envie d'esquisser un petit sourire, mais mon visage reste impassible. 

 

— Autrefois tu aurais fait risette, note gentiment Itachi.

 

— Ça va, je ne suis plus un gamin, ronchonné-je. 

 

Un silence s'installe entre nous. Pas celui qui plombe l'ambiance ou qui met mal à l'aise, non, au contraire celui -ci apporte une certaine sérénité. Nous profitons du spectacle qui s'offre devant nous. La neige qui tombe lentement du ciel pour recouvrir petit à petit la pelouse, le chemin et les arbres. Je trouve cela très apaisant. Même si ça en étonne certain, l'hiver à toujours été ma saison préférée.

 

Cela me rappelle également le jour de l'accident, c'était en pleine soirée et les routes n'avaient pas encore été déneigée. Les gros flocons blancs avaient surpris tout le monde. Moi le premier, jeune permis depuis quelques jours, je m'étais pris pour un pilote de course. Grave erreur. Aujourd'hui, je me rends compte que j'étais un petit con, arrogant et stupide. Je pensais tout savoir de la vie, être le meilleur et le plus doué. Mon cul, oui. 

 

Un trou du cul. 

 

Voilà, ce que j'étais. Un putain de trou du cul ivre. Rond comme une queue de pelle. Mais j'étais persuadée de pouvoir conduire, d'être en état pour prendre le volant. Après tout, il n'y avait que dix petites minutes pour rentrer jusque chez moi. Umé devait dormir à la maison après la soirée, alors qu'elle avait dit à ses parents qu'elle allait chez une copine. Je ne vous dis pas le choc qu'ils ont dû avoir quand ils ont appris la vérité.

 

Par la suite, ils ont voulu porter plainte contre moi, mais mon père, grâce à ses relations a réussi à étouffer l'affaire. Quand ils ont vu qu'ils n'auraient jamais gain de cause, ils ont abandonné. 

 

 

— Tu viens fêter Noël chez les parents cette année ?

 

Itachi me pose cette question tous les ans depuis l'accident, sauf que ma réponse est toujours la même. Je n'ai aucune envie de fêter Noël en me goinfrant de dinde et de foie gras. Oui, j'aime sa magie et l'ambiance qu'il règne pendant ce mois de décembre, mais je n'ai pas la tête aux repas festifs. Je ne peux pas faire comme si de rien n'était. Le 25 décembre signifie pour moi l'enterrement d'Umé. Et je ne dois pas être le seul, j'imagine que j'ai ruiné les fêtes de fin d'année de sa famille. 

 

Je pense souvent à eux, bien qu'Umé n'en parlait que très rarement. Je ne les connais pas, à vrai dire je n'ai jamais rencontrer ses parents, ni même sa sœur. Je me souviens vaguement qu'elle l'a mentionné quelques fois. Mais je ne connais ni son prénom, ni son âge. On m'a tenu à distance de tout, je n'ai pas eu le droit d'aller assister aux funérailles de ma petite amie, je n'ai même pas pu lui dire au revoir. Je garderais toute ma vie comme dernier souvenir, son visage livide couvert de blessure et de sang. Je revois son nez et sa bouche ensanglanté et sa plaie ouverte à la tête.

 

— Sasuke, revient parmi nous les vivants, s'il te plait, lance Itachi.

 

— Désolé, j'étais dans mes pensées, m'excusé-je. Je ne viendrais pas, je n'ai pas la tête à ça...

 

Je lis de la déception dans le regard de mon frère, mais il ne dit rien. Il comprend ou tout du moins, il essaye. Il n'insiste jamais, il sait que je suis un vrai mulet et qu'il est inutile de perdre son énergie à me convaincre. Si je n'en ai pas envie, c'est peine perdue. Et j'ai fais une croix sur Noël depuis bien longtemps.

 

Je passe la main dans mes cheveux ébène pour enlever la neige. Itachi m'imite. Il serait peut-être temps de rentrer, la nuit est tombée depuis déjà plus d'une heure. La seule lumière provient des réverbères rouge qui éclairent le parc.

 

La sonnerie du téléphone de mon frère retenti dans le silence, ce dernier pousse un petit soupire.

 

— C'est maman, elle va encore me demander de te convaincre de venir à Noël, se plaint-il. Allo, maman ?

 

Itachi semble en pleine conversation, mon regard balaye lentement le parc. C'est alors que j’aperçois au loin une silhouette féminine approcher lentement vers nous. Elle porte une capuche qui d'où nous sommes, cache son visage. Le bouquet de rose blanche qu'elle tient d'une main attire mon regard. Tiens, c'étaient les préférées d'Umé. La jeune fille semble hypnotisée par son téléphone, la tête baissée et les yeux fixés sur l'écran. C'est sans doute pour cette raison, qu'en arrivant à notre niveau, elle n'a pas vu et évité mes longues jambes étendues devant moi. Elle trébuche et tombe sur les genoux en poussant un petit cri de surprise. J'aperçois son portable, qu'elle a dû laisser échapper pendant sa chute. Je me penche pour le ramasser avant de lui tendre.

 

— Tenez, dis-je gentiment.

 

Elle tourne lentement la tête vers moi. J'écarquille les yeux et me fige au moment où je distingue son visage. Je rêve, je dois être victime d'hallucination. Ce que je vois ne peut pas être vrai, c'est impossible. Pourtant, cela semble si réel. Son regard vert émeraude qui me fusille du regard lorsqu'elle aperçoit que l'écran de son téléphone est brisé. Elle me l'arrache brutalement des mains avant de replacer une mèche de cheveux derrière son oreille. Elle se redresse rapidement et fronce les sourcils en me dévisageant.

 

— Vous vouliez tuer quelqu'un en étendant vos grandes jambes ?! me sermonne-t-elle. Je devrais vous envoyer la facture pour la réparation de mon portable. Pfff.. Quelle journée de merde ! 

 

Cette voix... Si familière. Cette intonation qu'elle a quand elle est énervée ou agacée. Je l'ai si souvent entendu, puisque j'adorais la faire tourner en bourrique. Mais je pensais ne jamais l'entendre à nouveau. Les larmes me montent aux yeux, mais je les ravale. Ce visage, ses cheveux roses et cette voix. Je les reconnaîtraient entre mille. Umé ! C'est elle ! Mais pourquoi ne m'a-t-elle pas reconnu ?

 

Je jette un œil à la jeune fille qui s'est éloignée pendant que j'étais perdu dans mes pensées. Je suis sûr que c'est elle ! Oh mon dieu, elle n'était pas morte ! Comment est-ce possible ?! Je bondis du banc sous le regard surpris d'Itachi qui n'a rien suivit de la scène et je me précipite vers la mystérieuse femme. Je cours sous et sur la neige, manquant de glisser à plusieurs reprises. 

 

Je la rejoins en quelques secondes et l'attrape par le bras. Elle s'arrête brusquement et se retourne vers moi, confuse. Je sens mon cœur tambouriner dans ma poitrine lorsque ses jolis yeux émeraude se posent sur moi pour la deuxième fois.

 

— Vous voulez vraiment payer ma facture ? s'étonne-t-elle.

 

— Umé ! m'exclamé-je.

 

C'est à son tour d'écarquiller les yeux et de se figer devant moi. Son teint blêmi en quelques secondes, elle semble aux bords des larmes. Ça y est, elle m'a reconnu ?

 

— C'est moi, Sasuke, lancé-je.

 

— Sa...Sasuke ? s'étrangle-t-elle en chancelant.

 

Je lui attrape la main pour la serrer chaleureusement dans la mienne, mais elle la dégage brusquement, comme si elle avait été électrocutée. Son regard n'est plus le même, ses yeux sont froids et haineux. Elle m'en veut pour l'accident...

 

— Ne me touche pas avec tes sales pattes ! rugit-elle.

 

Je suis surpris par son rejet aussi brutal. Je peux sentir sa colère, son dégoût et d'autres émotions que je n'ai pas encore identifié. En y réfléchissant, c'est normal qu'elle m'en veuille, elle a eu un grave accident à cause de moi. C'est sans doute à sa demande qu'on m'a dit et fait croire qu'elle était morte. Elle n'a probablement plus voulu me voir et préféré faire une croix sur notre histoire. Je ne peux m'empêcher de ressentir une pointe de tristesse. Je ne suis pas habitué à ce comportement venant de sa part. Elle a toujours été souriante, avenante et gentille avec moi.

 

— Je comprends que tu m'en veuilles et je suis sincèrement désolé ! Cela fait dix ans que je me blâme et que je m'en veux d'avoir pris ce volant alors que je n'étais pas en état. J'aurais dû appeler mon frère pour qu'il vienne nous chercher, et nous n'aurions pas eu cet accident. Tu ne peux pas savoir le nombre de fois où j'ai refait l'histoire dans ma tête, où j'ai voulu revenir dans le passé. Mais je ne pouvais rien faire, à part culpabiliser et me détester chaque jour un peu plus. Tu te souviens de ce banc ? Celui où j'étais assis et où tu as trébuché ?

 

J'attends sa réponse, mais elle reste silencieuse. On dirait qu'elle analyse chacun de mes mots et qu'elle attend. On dirait un prédateur qui se demande si oui ou non elle va bouffer la proie qui se trouve sous son nez.

 

— Tu as peut-être oublié, dis-je tristement. Tu ne veux sans doute pas te rappeler des souvenirs qui nous concerne, mais moi, je n'ai jamais oublié. Je reviens ici chaque année, à la même date. Le 22 décembre. C'est ici que nous aimions venir pour admirer le parc. On mangeait des glaces, toi, tu prenais toujours le parfum chocolat, ton préférée.

 

Son regard se trouble. Les larmes lui montent aux yeux et elle les essuie de l'index.

 

— S'il te plait, arrête, me supplie-t-elle.

 

C'est dans ce parc que tu m'as demandé de sortir avec toi et que je t'ai dit oui. Je me souviens de ton visage s'est illuminé lorsque tu as entendu ma réponse.

 

— Arrête, cri-t-elle en se bouchant les oreilles.

 

Elle s'accroupie par terre en se recroquevillant sur elle-même. Je pose mes genoux à terre. La neige mouille mon jeans, mais je m'en fou. Il peut bien se mettre à pleuvoir des cordes, cela m'importe peu. Je pose mes mains sur les siennes et lui retire pour qu'elle écoute. Cette fois-ci, elle ne se dégage pas. J'ouvre la bouche pour parler lorsque me précède. 

 

— Je t'en supplie, ne me parle plus de ces souvenirs...

 

— Ses yeux humide m'implorent, la détresse que je lis dans son regard me surprend. Le passé est si douloureux que ça pour elle ?

 

D'accord, je n'en parlerais plus. De notre passé ou de nos souvenirs, je n'y ferais plus allusion. Mais laisse-moi te revoir. Je te pensais morte, tu ne peux pas savoir comment cela me fait plaisir de te voir là devant moi.

 

— Morte ? demande-t-elle surprise.

 

— Je n'ai même pas pu aller à ton enterrement, on ne m'a pas laissé y aller. Mes parents me tenu à l'écart de l'affaire.

 

— Enterrement ? Ecoute, je crois qu...

 

— N'en parlons plus. Tu ne veux pas parler du passé et moi de ta mort. Cela m'a rongé pendant des années... D'ailleurs, tu sais que je suis devenu médecin ? souris-je. C'est pour toi, je voulais sauver des vies après avoir pris la tienne. Enfin, pas vraiment puisque tu es là.

 

La culpabilité qui me bouffait de l'intérieur semble s'être légèrement atténuée en apprenant qu'Umé n'était en fait pas morte, mais belle et bien vivante.

 

— Ecoute, j'ai besoin d'un peu de temps, dit-elle en extirpant un rouge à lèvre de son sec à main en bandoulière. 

 

Elle l'approche de mon visage et je sens la pointe chatouiller mon front, puis mes joues. Elle esquisse un faible sourire.

 

— Appelle-moi dans trois jours et je te donnerais ma réponse. Si je veux qu'on se revoie ou non, dit-elle en se redressant. Petit conseil, rentre directement chez toi pour noter les numéros avant qu'ils ne s'effacent. A plus tard, Sasuke.

 

Mon prénom dans sa bouche sonne bizarrement, est-ce à cause de l'intonation qu'elle a eu en le prononçant ? Je la regarde s'éloigner en silence. Encore sous le choc de ce qui vient de m'arriver. Je me laisse tomber en arrière et m'affale sur la neige qui recouvre le sol. J'entends des bruits de pas s'approcher. 

 

Itachi me regarde avec étonnement.

 

— Tu m'expliques ce qu'il vient de se passer ? Les neurones de ton cerveau ont sauté ?

 

— C'est le plus beau jour de ma vie, Itachi. Si tu savais qui je viens de voir ! souris-je en me redressant pour m’asseoir.

 

— Angelina Jolie ? plaisante-t-il.

 

— Mais non, crétin. C'était Umé ! 

 

Le visage de mon frère blêmi.

 

— Sasuke, elle est morte. Ça ne pouvait pas être elle... 

 

— Je l'ai reconnu et elle aussi. C'est Umé, j'en suis sûr ! D'ailleurs, elle m'a laissé son numéro, dis-je en montrant mon visage. Note le, vite, avant qu'il ne s'efface !

 

Mon frère n'a sans doute pas fait attention à elle, trop occupé par sa conversation téléphonique avec notre mère. A ses yeux, j'ai poursuivi une inconnue avant de m'affaler dans la neige comme un fou. Septique, il recopie sur son portable les chiffres écrit au rouge à lèvre sur mon visage et m'envoie le texto. Je lis cinq fois le numéro inscrit pour le mémoriser, puis range mon smartphone dans ma poche en esquissant un sourire.

 

Itachi ne s'en rend peut-être pas encore compte, mais cette rencontre inattendue change tout. Elle remet en question mon passé et les dix dernières années difficiles que j'ai vécu. Celles où le poids de la culpabilité m'a écrasé au quotidien, celles où je ne pouvais cesser de me blâmer et de me détester lorsque j’apercevais mon reflet dans un miroir. Peut-être vais-je finalement pouvoir me pardonner ? Peut-être vais-je enfin pouvoir aller de l'avant et m'attacher à une fille. A Umé.

 

Du moins, c'est ce que je pensais. Car la vie nous réserve bien des surprises. Parfois ce que l'on croit voir et savoir n'est pas la réalité. C'est dans de drôles et affreuses circonstances, que j'ai fais la connaissance de Sakura.

 

 

 

 

 

 

 

Lorsque je franchis la porte de l'appartement, je me déchausse et enlève mon manteau avant de me diriger vers ma chambre. Je me jette sur le lit et enfonce ma tête dans la couette. Je laisse aller ses larmes que je retenais depuis plusieurs longues minutes. Je ne me rappelle plus de la dernière fois où je me suis autorisée à pleurer, mais cette fois, je peux. Cette rencontre était trop riche en émotion et à fait remonter beaucoup de choses.

 

Sasuke. J'ai fini par le rencontrer. Je connaissais son prénom, mais je ne l'avais jamais vu en chair et en os. Juste une seule et unique fois en photo. Ma sœur me bassinait toujours les oreilles avec son "Sasuke". Elle l'aimait son précieux petit ami, ça il n'y avait aucun doute. Au début, j'étais curieuse à son sujet, je me demandais quel genre d'homme il était. A quoi pouvait ressembler le garçon dont ma jumelle était folle amoureuse. Mais, je n'ai jamais pu. Elle n'a jamais voulu me le présenter et je sais très bien pourquoi. Elle nourrissait de nombreux complexes à mon égard, bien que nous soyons quasiment physiquement identiques. 

 

Elle enviait mes cinq petits centimètres de plus. Elle disait que j'étais plus drôle et plus appréciée des gens qu'elle, c'est d'ailleurs pour cette raison que j'ai choisi de ne pas aller dans le même lycée qu'elle. C'était mieux, elle s'était plus épanouie sans ma présence dans les parages. Je dois reconnaître que j'étais plus sociable et avenante, alors qu'elle était timide et discrète. Mais c'était son caractère et je l'aimais comme elle était.

 

Puis, la curiosité s'est transformée en haine.

 

Nous étions déjà tous couchés lorsque le téléphone portable de mon père a sonné ce soir-là. C'était la police. Ils nous informaient qu'Umé venait d'avoir un grave accident et qu'elle était à l’hôpital. Il était 23:24 lorsque le cauchemar a commencé. Tout s'est enchaîné très vite. Changement de vêtement, le trajet dans le plus grand des silences et l'interminable attente. Sur place, personne ne voulait nous renseigner. Nous ne savions pas dans quel état se trouvait ma sœur. "Attendre", "patienter", ils n'avaient que ces mots-là à la bouche. Est-ce grave ? Si oui, ils nous le dirait quand même non ?

 

J'ai passé les pires heures de ma vie dans la peur et l’ignorance. Je ne suis pas croyante, mais ce soir-là, j'ai prié de nombreuses fois, de toutes mes forces, en vain. Dieu avait déjà pris sa décision... Nous sommes restés, je ne sais combien de temps, assit et impuissants dans ce couloir blanc. Il n'y a rien de plus frustrant. Ma mère ne cessait de pleurer et mon père tentait de la réconforter du mieux qu'il pouvait. Il ne le montrait pas, mais il était lui aussi mort d'inquiétude. Quant à moi, je refusais d'admettre que ma sœur puisse me quitter. Elle allait s'en sortir, elle le devait. Qu'allais-je faire sans elle ? Sans ma jumelle ? Les gens ne comprennent pas, mais nous avions un lien spécial et indestructible. D'ailleurs, je me rappelle parfaitement avoir fait un drôle de cauchemar ce soir-là, avant d'être réveillée par ce coup de téléphone. Je ne cessais de mourir. Noyée dans un lac, étouffée par un parfait inconnu ou encore brûlée vive dans notre maison. J'avais beau me débattre ou essayer de m'en sortir, l'issue était toujours la même. Je mourrais, encore et encore.

 

 

L'attente à été interminable, je ne sais pas au bout de combien de temps, un médecin est enfin venu nous voir, mais pour nous annoncer la terrible nouvelle. Il a anéanti tous nos espoirs en une fraction de seconde. Ce n'est pas ma mère qui à le plus mal réagit au drame, mais moi. J'ai complètement perdu pied. Je me suis mise à hurler aussi fort que ma voix et mes poumons me le permettaient. L'homme en housse blanche a essayé de me calmer, sans succès. Je lui crier dessus en le traitant d'incapable, de meurtrier et d'autres vilains noms. D'autres personnes sont venues pour l'aider. Je me débattais, balançais des coups de pieds à gauche et à droite. Je griffais et mordais lorsque l'on me saisissait. Je leur aboyais dessus, je ne voulais pas qu'on me touche, qu'ils me touchent. Pour la première fois de ma vie, je me suis montrée violente et agressive. J'avais l'impression d'être un animal blessé prêt à manger n'importe qu'elle proie.

 

Puis, ce fût le trou noir. Ma mère m'a appris à mon réveil qu'ils avaient été contraints de m'injecter un sédatif. Que j'étais devenue dangereuse pour moi-même et pour les autres. Hum, ils avaient surtout eu peur pour leurs petits culs d’incompétents. J'ai été hospitalisé pendant deux jours ou des psychologues sont venus me voir toutes les deux heures. Le troisième jour, j'ai enfin pu voir le corps inerte de ma sœur. J'ai maudis cet hôpital et cette bande d'incapables qui m'ont empêché d’être prêt de ma jumelle plutôt. Aujourd'hui encore je les déteste et leur en veux terriblement.

 

C'est seulement un mois plus tard que j'ai appris la vérité sur l'accident. Mes parents refusaient de me dire quoi que ce soit, pas tant qu'ils m'estimaient trop instable et fragile mentalement. C'est précisément à partir de ce jour, que j'ai détesté et haïs Sasuke Uchiwa du plus profond de mon être. Il conduisait la voiture et il était sous l'emprise de l'alcool. C'était de sa faute ! Tout était de sa faute ! C'était lui le responsable ! J'ai voulu plusieurs fois entrer en contact avec lui et tenter de le voir pour lui mettre mon poing dans sa figure, mais je n'ai jamais réussi. Mes parents et les siens ont tout fait pour couper tout contact entre nos deux familles. A cette époque, je n'avais encore aucune idée de ce à quoi il ressemblait.

 

J'ai pu mettre un visage sur son nom, lorsque j'ai trouvé par hasard le journal intime de ma sœur. Elle y avait glissé une photo d'eux deux. J'ai fondu en larmes en voyant le sourire éblouissant qu'elle affichait. Je ne l'avais jamais vu aussi heureuse avec quelqu'un d'autre que moi. Elle était éblouissante, rayonnante. D'ailleurs, j'ai gardé cette photo précieusement dans mon porte feuille. J'ai longuement hésité à couper ou gribouiller le visage de Sasuke. Finalement, j'ai préféré ne pas abîmer la précieuse photo de ma sœur et puis comme ça, je n'oublierais jamais la tête de cet assassin.

 

La haine m'a consumée pendant cinq longues années avant que je décide de prendre le taureau par les cornes, en allant consulter régulièrement un psychologue. Je ne pouvais pas continuer à vivre dans les ténèbres et l'envie de vengeance plus longtemps. Je ruinais ma vie et ma santé mentale pour quelqu'un qui ne me connaissait même pas ! J'ai vu ce professionnel une fois par semaine pendant quatre longues années. La route pour me reconstruire à été longue et semé d’embûches. J'ai plusieurs fois fait des rechutes où je ne sortais plus de chez moi et ne faisait que pleurer en détestait le monde entier. Mes parents ont été très présents pour moi et faisais de leur mieux pour me venir en aide.

 

Ce soir-là, Sasuke n'a pas seulement brisé la vie de ma sœur, mais aussi la mienne. Tout mon monde s'est écroulé, du jour ou lendemain, j'ai perdu ma moitié. Le choc à été bien trop dur pour moi, d'autant plus que cela s'est produit brusquement . Je me pensais bien plus forte que ça physiologiquement. Finalement, face à la perte d'un proche nous sommes tous plus ou moins faible. Ma jumelle était mon talon d’Achille. Les séances avec le psy m'ont aidé à accepter doucement sa perte. Nous avons surtout parlé d'Umé les premières années, laissant Sasuke de côté. 

 

C'est bien plus tard que nous avons abordé le sujet délicat du responsable de l'accident. Et le pardon... Je n'y suis pas encore, mais avec le temps, j'ai appris à évacuer ma rancœur. Je n'avais plus cette haine viscérale avec laquelle j'ai vécu des années. Je ne faisais plus ses cauchemars où je me vengeais de mille et une façons. Petit à petit, les rêves sont revenues et les ténèbres ce sont effacés.

 

 

Lorsqu'il a prononcé son prénom, "Umé", j'ai cru que mon cœur allait s'arrêter. C'est la première fois depuis des années que je l'entendais en dehors de mes séances de psy. Ma respiration s'est soudainement accélérée. Cette personne connaissait ma sœur ? Il m'avait même prise pour elle.

 

Je ne l'ai pas reconnu tout de suite, bien qu'il n'ait pas vraiment changé. C'est juste, que mon cerveau n'avait jamais envisagé voir Sasuke apparaître sous mes yeux, en chair et en os. C'était improbable... Je ne l'avais jamais imaginé, même dans mes cauchemars les plus fous. J'avais même fini par faire une croix dessus, à le rencontrer un jour.

 

Lorsque qu'il s'est présenté et que j'ai compris qui il était, une multitude d'émotion m'a envahie. La colère à d'abord pris le dessus, encore plus lorsqu'il a posé sa main sur moi. Comment osait-il ? J'ai eu l'impression d'être brûlée à son contact. Parler de lui lors de mes séances n'avait rien de comparable à le voir en vrai. Je me suis souvent demandé ce qu'il était devenu, cet homme qui avait ruiné la vie de ma précieuse sœur. Pensait-il encore à elle ? Avait-il reprit le volant alcoolisé suite à cet accident ? S'en voulait-il un minimum ou vivait-il en toute insouciance en ayant complètement oublié Umé. Toutes ses questions sont toujours restées sans réponse, jusqu'à aujourd'hui.

 

J'étais persuadée qu'il avait effacé de sa mémoire ma jumelle et qu'il vivait comme si de rien n'était. Comme s'il n'avait jamais commit cette grave erreur, mais visiblement je me trompais. Il ne l'avait pas oublié du tout. Pire encore, il vivait dans la culpabilité et le remord. Il est même devenu médecin pour Umé, en sa mémoire. J'esquisse un faible sourire, elle serait ravie si elle apprenait la nouvelle. Il va falloir que je lui annonce, même si je n'aurais aucune réponse. Je lui rends souvent visite, j'aime lui parler pendant des heures même si je sais que c'est à sens unique. Je suis persuadée qu'elle m'entend et qu'elle m'écoute attentivement bien que ce soit le silence qui me réponde à chaque fois.

 

J'ai été surprise en apprenant que Sasuke se trompait à propos d'Umé. Visiblement, il ignore certaines choses. Devrais-je lui dire la vérité ? Je suis perdue, je ne sais pas quoi faire. Il m'a prise pour ma jumelle et pense qu'elle est revenue d'entre le mort. Cette situation craint. Je l'ai dit plutôt et je le redis : quelle journée de merde !

 

Deux émotions opposées se battent actuellement dans mon cœur. La colère qui me donne envie de me venger en me faisant passer pour ma sœur par exemple. Il mériterait que je me joue de lui et que je lui fasse payer son crime. Après tout, pourquoi Umé serait la seule à subir ça ? Il n'y a même pas eu de procès ou de jugement. Son père a tout fait pour étouffer cette triste affaire et faire taire mes parents. C'est beau d'avoir des relations et de l'argent ! On peut décider d’anéantir la vie d'une personne sans avoir à s'inquiéter de quoi que ce soit. On est les rois du monde... 

 

Et quel monde de merde !

 

C'est injuste !

 

Et je ressens aussi de la tristesse. La même que j'ai vu dans son regard. Je n'arrive pas à oublier la façon qu'il avait de me regarder... D'abord, avec effroi et surprise, on aurait dit qu'il avait vu un revenant. Puis de l'espoir. Celui de ne pas avoir tué sa petite amie et de la retrouver après dix ans. Les mots qu'ils a prononcés m'ont littéralement brisé le cœur. Le pire a été lorsqu'il a évoqué les souvenirs avec Umé, en me rappelant ce qu'elle aimait, comme la glace au chocolat. Sa préférée. Oui, je le sais moi aussi. Et je connais sans doute plus de choses sur elle que quiconque sur cette planète. Mais je n'ai pas besoin qu'on me rappelle tout ça, c'est trop douloureux. Je n'évoque jamais le passé, même lorsque je vais voir Umé pour lui parler. Je lui raconte mes journées ou les événements importants qui vont se produire dans ma vie. Mais je ne lui rappelle pas nos souvenirs, je préfère les laisser où ils sont. Mais ce visiblement pas le cas de tout le monde....

 

Sasuke semble lui vivre dans le passé plutôt que dans le présent. J'ai pu comprendre qu'il a souffert pendant des années lui aussi et que c'est encore très dur pour lui aujourd'hui. Il a choisi de vivre avec le poids de la culpabilité plutôt que d'aller de l'avant en se pardonnant. Dans un sens, c'est dommage, car je suis sûre qu'Umé aurait voulu qu'il soit heureux et épanoui. Elle l'avait tellement aimé..

 

Pourquoi ça m'arrive à moi cette situation de merde ! Si je dis à mon petit ami que je vais voir l'ex de ma sœur en empruntant l'identité de celle-ci, il va péter un câble ! Mais, une voix dans ma tête me dit que parler avec Sasuke pourrait m'aider autant que lui. Peut-être arriverais-je à atteindre la dernière étape ? Le pardon. Ou alors, si je me trompe, alors je sombrerais dans la vengeance. Si je juge que cet homme est un connard et que ces paroles n'étaient que mensonges...Je le détruirais. D'une manière ou qu'une autre, je lui ferais payer au centuple.

 

Saï peut bien râler, je m'en fous. Je dois clôturer cette histoire et pour ça, j'ai besoin de Sasuke. De savoir ce qu'est devenu l'homme qui a ruiné la vie de ma sœur. Ça ne va pas être facile, mais je dois le faire...

 

Ma décision est prise.

 

Et je ne reculerais pas.

 

Je n'ai plus qu'a patienter trois jours et lorsque Sasuke m’appellera, je lui donnerais rendez-vous.

 

Les dès sont jetés.

 

Pardon ou vengeance ?

 

 

Les jours suivants ma rencontre ont été monstrueusement longs. Je n'attends qu'une chose, la revoir. Mais pour ça, il faut que je patiente encore un peu et qu'elle me donne sa réponse. 

 

Le jour J, le 25 décembre, je lui envoie un message.

 

"Salut, c'est Sasuke. Je voulais savoir ce que tu avais décidé. Moi, je serais ravi de pouvoir te revoir et discuter après toutes ces années.

 

Il m'a fallu plus de trente minutes pour écrire ce minable petit texto. J'ai effacé le texte pour le réécrire je ne sais combien de fois. Je ne savais pas quoi dire et j'avais peur d'en faire trop. Au final, j'ai décidé de faire assez simple et d'aller droit au but. Je ne suis pas entièrement satisfait de mon message, j'ai l'impression de passer pour un crétin, mais c'est pas grave. A ce train là, j'y suis encore demain. 

 

Umé a mis exactement une heure et onze minutes à me répondre. L'attente m'a semblé interminable ! M'a-t-elle délibérément fait attendre ?

 

" On peut se voir samedi soir si tu veux. 21h00 au "Konaha Club" ?

 

J'ai relu au moins dix fois le message pour être sûr de ne pas avoir rêver. Elle acceptait qu'on se revoit ! Je pourrais lui dire oui et me contenter de ce qu'elle me propose, mais mon. Je suis quelqu'un d'exigeant et encore plus après toutes ses années. J'en veux plus. Plus de temps avec elle. Mais je ne suis pas sûr qu'elle soit d'accord. J'appréhende un peu sa réaction, mais je tente le tout pour le tout.

 

"Je t'invite au restaurant, "Les Ninjas d'Or". Comme ça, on pourra discuter tout en se remplissant le ventre."

 

Vingt et une minutes plus tard, je reçois enfin la réponse. Je commençais à croire que j'avais poussé le bouchon un peu loin et qu'elle allait faire la morte jusqu'à la fin de mes jours. 

 

"D'accord. 20h00, ça te va ?"

 

Alléluia !! Elle a dit oui ! 

 

Putain, calme toi Sasuke ! On dirait un ado prépubertaire ... Je me fais honte. Il faut que je me reprenne et vite.

 

"Parfait ! Je passe te prendre ? " répondé-je dans la foulée.

 

"Non. On se rejoint directement là-bas, c'est mieux."

 

 

***

 

Je me hais ! 

 

Je suis vraiment trop con ! Ah ça, on peut le dire. Un abruti de première. Je suis en retard pour mon rendez-vous, ce n'est pas sérieux. Heureusement qu'Umé est du genre patiente, enfin, peut-être le sera-t-elle moins après autant d'années.

 

 

Je pousse la porte du restaurant et entre dans la salle. Je sais qu'elle est déjà là, la ponctualité est son fort contrairement à moi. Je balaye la pièce du regard, mais aucun visage ne m'est familier. Merde. M'aurait-elle fait faux bond au dernier moment ? 

 

Une pointe de tristesse m'envahit et je sens mon cœur se serrer. Bordel, je venais à peine de la retrouver !

 

Soudain, quelque chose percute mon dos. Si c'est un serveur et qu'il m'a renversé je ne sais quelle sauce sur mon manteau, je le bute.

 

— Désolé. J'étais sur mon téléphone, je ne vous ai pas vu, s'excuse une voix féminine.

 

Je me retourne et je suis surpris de voir que je connais très bien la jeune fille qui vient de me rentrer dedans : Umé. Elle ne m'a pas planté finalement. Elle est venue.

 

— Oh, c'est toi. Désolé, je suis en retard, dit-elle en rangeant son téléphone dans sa poche.

 

— Pas de soucis, je n'étais pas en avance non plus, souris-je.

 

Je me dirige vers une table vide au fond de la salle et elle me suit. On s'installe et on se débarrasse rapidement de nos manteaux. On s'échange quelques regards dans le plus grand des silences, aucun de nous n'ose prendre la parole. Je voudrais dire quelque chose, n'importe quoi, mais rien ne me viens à l'esprit. Je me contente d'admirer cette superbe fille qui se trouve devant moi et que je pensais ne jamais revoir. Dire que je pensais l'avoir perdu pour toujours. 

 

— Hé, arrête de me regarder comme ça. Ce n'est pas moi ton repas, déclare-t-elle sèchement.

 

Désolé. C'est juste... que... j'ai du mal à réaliser que tu es en face de moi, Umé. Tu es vivante et tu ne peux pas savoir à quel point je suis heureux de te voir en chair et en os. 

 

Je crois percevoir un voile de tristesse dans ses yeux avant qu'il ne disparaisse. Son regard se durcit. 

 

 Ne te réjouis pas trop vite. Ça n'efface pas l'accident, assène-t-elle. 

 

— Je sais, soupiré-je. 

 

Je suis conscient qu'on ne peut pas changer le passé et que malheureusement, ce qui est fait, est fait. J'assume mes erreurs et je ne les reproduirais plus. Plus jamais.

 

Un serveur vient nous apporter les menus, mais je ne l'ouvre pas. Je sais déjà ce que je vais prendre. Cela fait des années que je choisis le même plat. 

 

 Qu'est-ce que tu prends ? Tu adorais le canard, non ? Tu devrais essayer leur magret, il est à tomber ! souris-je.

 

Elle lève les yeux du menu avant d'esquisser un sourire.

 

 Je suis végétarienne. Alors ton canard, tu sais où tu peux te le mettre ? 

 

 Oh, désolé.

 

Et bien, ce n'est pas gagné. Je ne sais pas si j'en suis la cause, mais Umé à l'air d'une humeur massacrante ! Super. Comment vais-je faire pour détendre l'atmosphère ?

 

Oh, je sais !

 

 Et bien, choisi un plat et je te suivrais. Peut-être que moi aussi je deviendrais une vache, dis-je en regrettant immédiatement mon dernier mot.

 

 Une vache ? répète-t-elle en clignant des yeux.

 

 Non, ce n'est pas ce que je voulais dire, balbutié-je. C'est que les vaches mangent de l'herbe et ... les végétariens beaucoup de légumes et... euh ... merde ! C'était maladroit, mais tu comprends ce que je veux dire, hein ? C'était pas méchant..

 

Ça ne fait même pas cinq minutes qu'on est là, et je pense qu'elle va plus jamais vouloir me revoir après ce repas. Putain, je viens de la traiter de vache. Niveau compliment, j'ai déjà fait mieux. Heureusement qu'Itachi n'est pas là, car il se foutrait ma gueule et il y aurait de quoi !

 

— C'est vrai qu'elle m'avait dit que tu étais maladroit, dit-elle dans un chuchotement.

 

 Elle ?

 

 Non, rien. J'accepte ton offre. Je choisis notre plat, dit-elle en esquissant un petit sourire sincère. 

 

Le premier sincère de la soirée ! C'est un bon début.... Après l'avoir insulté de vache, c'était pas gagné. J'ai plutôt bien rattrapé le coup, je crois.

 

— Choisi ! Tu as carte blanche, je mange de tout ! Je ne suis pas difficile. 

 

Elle me fixe pendant quelques secondes avant de replonger le nez dans le menu. Bordel, je donnerais tout pour savoir ce qu'il se passe dans sa tête en ce moment. Que pense-t-elle de moi ? De notre rencontre ? M'en veut-elle toujours pour l'accident ? Serait-elle d'accord pour nous laisser une seconde chance ?

 

 Tu sais, j'ai vraiment voulu prendre de tes nouvelles... mais tes parents m'ont dit que tu étais morte. Je..

 

 Arrête, me coupe-t-elle sèchement. Si tu parles encore de ce putain d'accident, je me lève et je m'en vais d'ici. Et tu ne me reverras plus jamais. Compris ?

 

 Umé...

 

 Ecoute. Tu n'es pas le seul à avoir souffert suite à cet accident, Sasuke. On a tous été détruits, dit-elle les larmes aux yeux. Si j'ai accepté de te revoir, c'est pour savoir ce que tu es devenu aujourd'hui. Pas refaire le passé, finit-elle après une courte pause.

 

— Je comprends, désolé.

 

Putain, je m'excuse beaucoup ce soir. J'ai l'impression de demander pardon à chaque fin de phrase. Je me rends compte que les cicatrices de l'accident sont encore très présente dans la vie d'Umé. Je pensais qu'elle serait passée à autre chose rapidement. Moi, j'ai vécu en pensant avoir tué quelqu'un, en le privant de son avenir. C'est ce qui m'a attiré dans cette spirale infernale. J'ai du mal à saisir pourquoi elle a l'air aussi traumatisée... J'ai l'impression qu'elle n'a pas l'air en meilleur état que moi et qu'elle est psychologiquement fragile. A-t-elle gardé de graves séquelles physiques ? A-t-elle une fausse jambe ? 

 

Je me penche pour regarder sous la table. Merde, elle porte un jeans. Je ne vois rien. D'autant plus que maintenant les prothèses sont très proche de la réalité. Soudain, j’aperçois la tête d'Umé.

 

 Je peux savoir ce que tu fous ? demande-t-elle suspicieuse.

 

 Rien du tout ! répondé-je en me redressant. 

 

— Tout va bien ? insiste-t-elle.

 

 Oui, parfaitement bien, souris-je.

 

Parfait. Alors maintenant, tais-toi que je puisse choisir nos plats, dit-elle. 

 

J’obéis et garde le silence pour lui laisser le temps regarder le menu. Après quelques minutes, elle le ferme.

 

 Alors ? demandé-je. 

 

 Tu verras, sourit-elle.

 

Un serveur arrive pour prendre notre commande. 

 

— Deux assiettes végétariennes. Avec beaucoup de parmesan pour la mienne, merci.

 

Il tape sur son boîtier et s'éloigne de la table. 

 

J'arque un sourcil et esquisse un sourire en coin.

 

— Très original, taquiné-je.

 

 Il faut dire que ton resto ne propose pas grand chose pour les végétariens, se défend-elle.

 

C'est vrai que de mémoire, il y a beaucoup de viande à la carte. Un plaisir pour les carnivores comme moi. J'ai un petit pincement au cœur quand je pense a mon magret de canard qui est en train de me passer sous le nez. Allez, c'est pour la bonne cause. Je me rattraperais la prochaine fois.

 

Tiens, maintenant que j'y pense...

 

— Mais, tu n'étais pas intolérante aux produits laitiers ? demandé-je étonné.

 

Umé garde le silence quelques instants.

 

 Ah bon ? Non, c'est juste que je n'aimais pas trop ça étant plus jeune. Je rattrape le temps perdu maintenant, c'est super bon ! 

 

Mes souvenirs me joueraient-ils des tours ? Je suis pourtant sûr qu'elle était intolérante et que ce n'était pas une histoire de goût. D'ailleurs, quelque chose me perturbe depuis que nous sommes ici. Je ne sais pas comment l'expliquer, mais j'ai l'impression qu'Umé est une inconnue. Je n'ai pas la même sensation qu'auparavant lorsque je suis avec elle. Peut-être est-ce parce que le temps a passé et que nous avons tout les deux grandi ? Après tout, cela fait dix ans que je ne l'avais pas revu. Elle n'est plus cette adolescente que j'ai connu, mais une femme. Je dois me faire des idées.

 

Pour la première fois depuis nos retrouvailles, je prends le temps de la regarder vraiment. Ses yeux émeraude sont toujours aussi beaux, je pourrais les contempler pendant des heures. Elle a coupé ses longs cheveux rose pour un carré qui lui arrivent aux épaules. Elle fait moins enfant et plus adulte comme ça. Mon regard s'arrête sur ses oreilles. 

 

 Tu ne portes pas de boucle d'oreilles ? demandé-je étonné.

 

 Non, je n'ai pas les oreilles percées.

 

— Les trous se sont rebouchés ? 

 

 Tu vas vraiment m'interroger sur mes lobes ? s’agace-t-elle. Tu ne voudrais pas s'avoir d'autres choses plus importantes ? Comme ce que je fais dans la vie par exemple.

 

 Tu as raison. Que fais-tu dans la vie ? demandé-je.

 

J'ai l'impression qu'Umé est sur ces gardes pour je ne sais quelle raison. Se méfie-t-elle de moi ? J'espère qu'elle ne pense pas que je lui veux du mal, car c'est tout le contraire.

 

 Je suis infirmière et toi, médecin si je me rappelle bien ce que tu as dit lors de notre première rencontre.

 

 Je vois. Tu aides les autres, ça ne m'étonne pas de toi. Effectivement, tu as bien retenu. Tu ne travailles pas à l’hôpital centrale de Konoha, je ne t'y ai jamais vu lors de mes gardes.

 

 Exact, je suis dans une clinique privée. 

 

 Oh, tu bosses à "La ligne bleue" ? C'est un établissement réputé. Mon meilleur ami travaille là-bas en tant que psychologue.

 

 Oui, on a plutôt une bonne réputation. Je suis dans le service de soin palliatif. Ce n'est pas tous les jours facile, mais bon...

 

 Pourquoi avoir choisi ce service ? demandé-je étonné.

 

Il faut être fort mentalement pour accompagner les personnes en fin de vie et mon instant me dit qu'Umé est une personne plutôt fragile à ce niveau-là. Je ne sais pas depuis combien de temps elle est dans ce service, mais je ne pense pas que cela s'étendra dans la durée. Elle n'a pas les épaules pour bosser dans un tel service. Cette sensibilité et cette fragilité que je ressens chez elle me donne envie de la protéger. Si je ne me retenais pas, en ce moment, je la prendrais dans mes bras.

 

 Ça, c'est un secret, répond-elle dans un faible sourire. Je peux te poser une question, Sasuke ?

 

Décidément, mon prénom sorti de sa bouche ne sonne pas comme dans mes souvenirs.

 

 Bien sûr.

 

 Que penses-tu des familles qui s’acharnent à maintenir un membre de la famille en vie ? Quelqu'un dont la vie la quitté depuis des années déjà.

 

 Je pense qu'il faut savoir laisser partir les gens qu'on aime, même si c'est douloureux. Pourquoi cette question ? demandé-je surpris.

 

Elle tourne légèrement la tête et fixe un point dans le vide avant de pousser un long soupir.

 

 C'est aussi ce que je pense. Cela empêche tout le monde d'avancer.

 

Au moment où j'ouvre la bouche pour parler, un serveur nous amène nos plats. Mauvais timing.

 

 Bon appétit. Bienvenue dans le monde des végétariens, dit-elle en esquissant un faible sourire.

 

 Ça à l'air bon ! Bon appétit.

 

Nous mangeons notre salade, que je trouve délicieuse au passage, en silence. J'observe discrètement Umé, qui semble aller de plus en plus mal. Bon sang, est-ce ma présence qui la met dans cet état ?

 

 Ça ne va pas ? risqué-je.  S'il y a quelque chose qui te travaille, tu peux m'en parler. Je t'écouterais.

 

 Tu as déjà aimé autant que tu as détesté une personne ? me demande-t-elle en plantant son regard dans le mien.

 

 Euh, oui. Mes parents, j'imagine. Parfois je les aime et parfois, j'ai une forte envie de leur tordre le cou. Notamment quand ma mère me demande de me trouver une copine.

 

— C'est vrai ça, comment se fait-il qu'un beau garçon comme toi n'ais pas de petite amie ? taquine-t-elle.

 

 La perfection effraye, je crois.

 

— Vantard, dit-elle en me lançant un coup de pied dans le tibia sous la table.

 

 Aie ! Je ne te connaissais pas aussi violente ! Dans mes souvenirs tu étais douce comme un ange.

 

— Tu ne me connais pas, Sasuke, sourit-elle.

 

Je ne sais pas pourquoi, mais je pense qu'il y a un sens caché dans ses mots, qu'elle seule semble comprendre. Je suis surpris de la voir appeler un serveur pour lui demander un verre de Mojito. Elle doit le voir puisqu'elle m'explique avoir besoin d'un petit remontant.

 

 Qui détestes-tu autant que tu aimes ? me risqué-je à demander.

 

Elle garde le silence un instant avant de répondre « Ma sœur ».

 

Je reste à mon tour silencieux quelques secondes, surpris par la révélation d'Umé. D'après mes souvenirs, qui ne semblent plus si bons que ça, elles s'entendaient bien. Qu'est-ce qu'il y a pu se passer pour que leur relation se dégrade ?

 

 Elle est partie loin d'ici, sans penser à notre souffrance. Je sais bien qu'elle n'a pas eu le choix, mais cela n'enlève pas la peine que l'on ressent. Cela a détruit tous les membres de notre famille, surtout ma mère.

 

  Il ne faut pas être si dramatique, elle est juste partie vivre sa vie loin du nid. Certaines personnes coupent le cordon ombilicale brusquement, mais c'est comme ça. Tu peux toujours la voir, pourquoi pas lui rendre visite ? 

 

  Effectivement, je peux toujours la voir, répète-elle. C'est ce que me répète aussi parfois mon copain.

 

  Ton copain ?! m'exclamé-je.

 

QUOI ?! J'ai mal entendu, là ? Son quoi ? Elle ne serait quand même pas venu manger au restaurant avec moi si elle était en couple, non ? Dire que moi, cela fait dix ans que je pense à elle... J'ai l'air d'un abruti avec un grave problème psychologique. Je devrais peut-être demander conseil à mon meilleur ami Naruto. Justement il est psy, il pourrait peut-être me faire une séance à l'appartement un jour.

 

 Oui. Tu ne pensais quand même pas qu'une femme parfaite comme moi serait seule ? La perfection n'effraye pas toujours, Sasuke

 

 Bah, si. Pour être honnête, je suis un peu surpris.

 

Je devrais peut-être aussi prendre un petit remontant. Là, j'en aurais bien besoin. Je nous imaginais pas marié et avoir des enfants, loin de là, mais j'espérais qu'on pourrait se revoir pour apprendre à connaitre les adultes que nous étions devenus. Mais ça semble compromis. Elle ne va jamais vouloir ! 

 

  Ça fait longtemps ? 

 

  Hum, un an, je crois. Enfin, c'est un peu compliqué. Tu sais, je commence à me demander si ce n'est pas le destin qui t'as mis sur ma route. Dix ans après l'accident, drôle de coïncidence, tu ne trouves pas ?

 

Si. Je pense aussi que nos retrouvailles n'est pas le fruit du hasard. Je pense que la vie nous offre une deuxième chance et je veux la saisir. Ce petit ami, qu'il aille au diable. Je l'évincerais. Umé retombera amoureuse de moi, j'en suis sûr. En tout cas, je ferais tout pour que ça arrive.

 

  Je suis persuadé que nous devions nous retrouver, affirmé-je. 

 

  Peut-être est-ce elle qui nous a réuni, lance-t-elle comme si elle se parlait à elle-même.

 

 Oui, c'est la vie.

 

  La vie ? ... Oui, sans doute. Dis-moi, Sasuke, c'est à cause de moi que tu as choisi d'être médecin, c'est ça ?

 

  Oui. A vrai dire, j'aurais aimé être chirurgien et sauvé des vies en opérant les patients, mais c'était impossible.

 

  Pourquoi ? s'étonne Umé.

 

  Le sang. Je ne supporte pas sa vue. Depuis que je t'ai vu, le visage en sang dans cette voiture, j'en ai la phobie. Je suis tétanisé, paralysé. Je sais, ce n'est pas très viril. Du coup, j'ai choisi médecin généraliste. Jusqu'à aujourd'hui, je n'ai jamais été confronté à ce problème. Je combats les vilains microbes et virus à l'aide de mon super carnet d’ordonnance.

 

  Je comprends, sourit-elle. Moi, je déteste les hôpitaux.

 

  Mais, tu travailles dans une clinique, m'exclamé-je surpris par sa révélation. 

 

  Oui, sourit-elle. J'ai une raison de bosser là-bas, pour l'instant. Dès que je pourrais, je partirais et me réorienterais. Peut-être assistante dentaire, qui sais.

 

Alors là, je suis perdu. Qu'est-ce qui peut bien y avoir là-bas pour qu'elle y reste ? Pas son petit copain, puisque visiblement, ça n'a pas l'air d'être l'amour fou. Qu'est-ce que tu me caches, Umé ?

 

Je perds pied. J'avais quitté la maison, déterminée et pleine d'ambitions. Mais tout s'est écroulé lorsque j'ai croisé son regard. Ses magnifiques yeux noir charbon. A quoi je joue ? Je pensais être forte, avoir dépassé tout ça, mais je me demande qui est le plus atteint entre Sasuke et moi.

 

Je crois qu'entre nous deux, il s'en sort mieux. Pas de beaucoup, certes, mais mieux que moi. Surtout, depuis qu'il pense que je suis Umé et qu'il ne l'a pas tué. Je vois bien qu'il s'est soulagé d'un poids alors que j'ai l'impression d'alourdir le mien. S'il pense avoir conditionné sa vie à cause de ma sœur, qu'il attente de savoir la mienne. J'ai tout construit autour d'elle, jusqu'à travailler dans une clinique avec ses couloirs blancs empestant cette odeur nauséabonde de désinfectant et multiples produits. 

 

A quoi, je joue bordel ?

 

 

Je l'ai beaucoup observé depuis notre arrivée dans ce restaurant. Je vois qu'il fait de son mieux avec moi, qu'il essaye de ne pas me contrarier. Je commence à comprendre pourquoi Umé est tombée sous son charme. Il a un côté attachant, même sa maladresse est touchante à sa façon. Le pauvre, il avait l'air au bord de la syncope quand le mot "vache" est sorti de sa bouche.

 

Il a frôlé à nouveau l'arrêt cardiaque lorsque je lui ai annoncé que j'avais un copain. Je l'ai dit au présent, mais j'aurais dû le dire au passé. Sai m'a largué à l'instant où j'ai décidé d'aller à ce rendez-vous. Il a essayé de m'en dissuader, mais il ne comprenait pas que j'avais besoin d'y aller. Je voulais rencontrer et connaître cette personne qui avait changé nos vies à tout jamais, en un instant. Méritait-il d'être en vie après ce qu'il avait fait à ma sœur ?

 

Peut-être bien. Umé, si tu savais. Ton Sasuke est devenu médecin et il a la phobie du sang. Plutôt marrant.

 

Il a remarqué des incohérences entre moi et ma sœur, évidemment. Je veux bien me faire passer pour elle, mais pas être elle. D'ailleurs, je me suis rendu compte que j'avais oublié des choses à son sujet. Je ne me rappelait même plus qu'elle était intolérante au lactose ou qu'elle avait les oreilles percées contrairement à moi. C'est ce que je déteste avec le temps, c'est qu'on finit par oublier beaucoup de choses. Les souvenirs disparaissent petit à petit. Je ne me rappelle plus de sa couleur préférée, de son plat préférée ou de son film préféré. 

 

Est-ce vraiment une bonne idée de venir ici en me faisant passer pour elle, finalement ? Sasuke n'a pas l'air d'être un mauvais garçon, il a déjà beaucoup de remords comme ça. J'aurais peut-être dû le laisser croire qu'Umé était en vie, mais ne jamais le revoir ?

 

 

Soudain, je ressens une violente douleur dans le tibia. Je sors de mes pensées sans comprendre ce qui vient de se passer.

 

  Oups ! Désolé ! Je t'appelais, mais ne tu répondais pas. Et j'ai voulu te ramener parmi nous en te mettant un petit coup de pied, mais je crois que j'ai pas senti ma force s'excuse-t-il.

 

Tu crois ? Tu m'as explosé la jambe, putain !! J'ai une furieuse envie de lui planter ma fourchette dans le front.

 

  Et après, c'est moi la violente, dis-je en me massant le tibia. Je crois que je vais reprendre un Mojito, pour passer l'envie de meurtre qui me titille depuis quelques secondes.

 

  Je crois pas que ça soit une bonne idée. Ils sont plutôt bien chargés ici, tu sais aussi bien que moi que conduire alcoolisé et une mauvaise idée....

 

  J'appellerais un Uber, t'inquiète, le rassuré-je en faisant signe à un serveur.

 

 Tu n'es pas venue en voiture ?

 

  Non, on m'a déposé.

 

Je ne précise pas que je n'ai pas le permis. On a tous développé des traumatismes suite à cet accident. Je n'ai jamais pu m’asseoir derrière un volant. Lors de la première heure de conduite, j'étais tétanisée sur le siège. Au final, j'ai fait une crise d'angoisse avant de perdre connaissance. Je n'ai plus jamais retenté l’expérience et j'ai décidé de faire sans voiture. Après tout, Konoha est assez grand  pour se débrouiller sans. Heureusement, je peux me déplacer pratiquement partout dans la ville grâce aux transports en commun. Je ne précise pas à Sasuke que je n'ai pas le permis. Il pourrait sans vouloir et se sentir responsable de savoir "qu'Umé" est incapable de prendre le volant à cause de l'accident. 

 

Ma mère m'a donc déposée devant le restaurant après notre séance de shopping. Bien évidement, elle ne sait pas que j'avais rendez-vous avec Sasuke. J'ai prétexter aller voir une amie. 

 

  Je peux te ramener, propose-t-il. Je n'ai plus eu d’accident depuis dix ans. Le seul et unique, d'ailleurs. J'ai mis quelques années avant de pouvoir reprendre le volant, c'était difficile... Mais je comprendrais que tu refuses de monter avec moi.

 

Je suis tentée de dire oui, mais honnêtement, je suis morte de trouille. Je repense à ce qui est arrivé à Umé et un frisson parcourt mon corps.

 

  Oublies ma proposition. C'était maladroit de ma part, s'excuse-t-il.

 

 Désolé, dis-je bêtement.

 

Le serveur m'amène mon Mojito. J'attrape le verre et le bois d'une traite. Mauvaise idée, je crois. Ouf, je suis a deux doigts de voir des éléphants roses. J'ai la tête qui commence à tourner légèrement. C'est vrai que ça fait un moment que j'avais pas bu, j'aurais peut-être dû y aller mollo. 

 

— Je suis désolé, mais je crois que je vais devoir écourter cette soirée, m'excusé-je. Je ne pourrais pas aller jusqu'au dessert ni même aller boire un verre après. 

 

 Je t'avais dit que c'était une mauvaise idée les mojitos, souffle Sasuke. Attends-moi là, je vais payer et je reviens te chercher. Je ne voudrais pas que tu t'ouvres le crâne sur une table, dit-il en se levant.

 

Les coudes sur la table et la tête dans la paume de mes mains, j'attends Sasuke. Les yeux fermés, j'inspire et expire lentement plusieurs fois. Des hauts le cœur me prennent et je me concentre pour ne pas vomir sur la table. Je ne voudrais pas me ridiculiser plus que je ne le suis déjà. Bon sang, je suis lamentable. J'ai l'impression d'avoir dix-huit et de prendre ma première cuite. 

 

  Ça y est, s'exclame une voix masculine.

 

  Merci pour le repas, et désolé pour la cuite, m'excusé-je en redressant la tête. 

 

Mes joues rougissent de honte. Désolé Umé, je crois que j'ai sali et cassé la belle image que ton ex copain avait de toi. Lui qui semblait vouloir me revoir, pas sûr qu'il y tienne toujours. Il doit penser que ma sœur est devenue une pochetronne. Je me lève en prenant appui sur la table. Oula, je tiens à peine sur mes jambes tellement j'ai la tête qui tourne. Je me sens vraiment mal, je ne comprends pas pourquoi je réagis aussi mal à deux verres de mojito.

 

Quand soudain un éclair de génie traverse mon esprit embrumé. Et merde. Je suis vraiment conne. Comment ais-je pu être si négligente et oublier ça ? J'ai honte.

 

  Anxiolytiques, soufflé-je.

 

  Quoi ? demande Sasuke.

 

  Je prends des anxiolytiques depuis deux jours. J'en prenais plus depuis des années mais...

 

J'en ai ressenti le besoin après notre rencontre.

 

  Tu plaisantes ? gronde Sasuke.

 

Mon corps frémit, c'est la première fois qu'il hausse la voix contre moi. 

 

  Et tu te dis infirmière ? Bordel Umé ! grogne-t-il.

 

  Oh ça va, tout le monde fait des erreurs ! J'avais oublié, gémis-je en titubant.

 

Sasuke passe un bras sous mon épaule et m'enserre pour me soutenir. Il attrape mon sac et m'aide à traverser la salle de restaurant sous les regards curieux des clients. Un serveur vient à notre rencontre visiblement inquiet.

 

  Qu'est-ce qu'il se passe ? demande-t-il.

 

  Ma femme ne se sent pas bien, déclare Sasuke.

 

Malgré mon état déplorable, je comprends où il veut en venir. Il est loin d'être bête. Il ne veut pas que le personnel pense qu'il m'a drogué pour abuser de moi. Il faut dire qu'on voit de ses choses de nos jours.

 

  Madame ? m'appelle le serveur.

 

Je rentre dans son jeu. Je ne voudrais pas attirer d'ennuis à Sasuke, après tout, il est en train de m'aider.

 

  Je vais bien. Chéri, ramène-moi à la maison, s'il te plait, dis-je en jouant mon rôle.

 

Le serveur semble rassurer et nous aide même à rejoindre la sortie. Une fois à l'extérieur, je respire une bonne bouffée d'air frais. Cela fait du bien. 

 

Soudain, je ressens un violent haut le cœur et que je ne peux retenir. C'est trop rapide et fulgurant. C'est impuissante, que je vomis sur les chaussures de Sasuke. Désolé Umé, mais je crois que c'est définitivement mort. Sasuke ne voudra plus jamais te revoir après ce soir.

 

Comment ruiner sans le vouloir, l'image angélique de ma jumelle dans l'esprit de Sasuke en une soirée.

 

Je cligne des yeux plusieurs fois. Je rêve où elle vient de vomir sur mes nouvelles chaussures ? Bordel. Comment a-t-elle pu oublier qu'elle prenait des anxiolytiques et boire de l'alcool ! Tout le monde sait que c'est interdit ! Et elle se dit infirmière ? Pas sûr que sa clinique apprécierait de savoir les cocktails que se fait leur employée en dehors du boulot. Ahlala. Umé, comment en es-tu arrivé là ? Elle a dit qu'elle n'en avait pas repris depuis des années, cela veut donc dire qu'elle en a déjà eu par le passé. 

 

Certains médecins, donc je fais partie, sont persuadés que les anxiolytiques et autres médicaments dans ce genre sont une des causes de la maladie d'Alzheimer. Ce n'est pas facile, mais on peut faire sans, il suffit d'un peu de volonté. Moi aussi, j'aurais pu tomber dedans, j'y ai souvent pensé d'ailleurs. Mais j'ai réussi à m'en passer sans empoissonner mon corps.

 

Par contre, je ne peux pas en dire autant d'Umé. Je dois me rendre à l'évidence, la fille joyeuse et insouciante que j'ai connu à mon adolescence n'existe plus. Aujourd'hui, j'ai devant moi une femme fragilisée par la vie et qui semble perdue. Je peux l'aider comme elle l'a fait en apparaissant devant moi il y a trois jours plus tôt.

 

  Oh mon dieu, se lamente-t-elle. Je suis désolé !  Je t'en rachèterais une paire, en dédommagement.

 

  Oublies, ça se nettoie. Assied-toi là contre ce mur, je vais aller passer un rapide coup d'eau dans les toilettes du restaurant. Ne bouge pas et attends-moi, ordonné-je avant de m'éclipser.

 

 

****

 

Lorsque je retrouve Umé, je suis content de voir qu'elle est restée sagement assise comme je lui avais demandé. Ça m’embêtait de la laisser seule, mais je ne pouvais pas monter dans ma voiture avec les chaussures couvertes de vomis. Plutôt mourir que de salir et empesté ma voiture. 

 

Je lui attrape le bras pour l'aider à se relever. Umé s'y accroche pour y prendre appui.

 

  Où habites-tu ? demandé-je. Je vais te raccompagner chez toi. Je sais que tu ne tenais pas à monter avec moi en voiture, mais je ne peux pas te laisser repartir seule dans cet état. 

 

Elle reste silencieuse un instant en me dévisageant. Elle doit se demander si elle doit accepter ou non mon offre. Ce qu'elle ne sait pas, c'est que c'est non négociable. Je ne la quitterais pas avant de l'avoir ramené chez elle, saine et sauve. 

 

  Je peux appeler un Uber, finit-elle par répondre.

 

  Umé, ton adresse ? dis-je d'un ton sans appel.

 

Elle pousse un soupire et m'indique la rue de son appartement. Je l'aide à tenir sur ses jambes tout en rejoignant la voiture. Je lui ouvre la portière et elle se glisse tant bien que mal sur le siège passager. Je fais le tour est m'installe à mon tour. Je jette un regard à Umé qui est très pale, aussi blanche que le cul d'un nouveau-né. 

 

 Je t'en supplie, ne vomis pas dans ma voiture, supplié-je. 

 

Je me retourne et attrape ma sacoche. Je la retourne pour vider le matériel de premiers secours qui se trouve à l'intérieur. Et oui, on est jamais trop prudent, mieux vaut être équipé en toutes circonstances. Puis je la tends à Umé. Cette dernière me fixe, surprise.

 

  Si tu sens que ça vient, vomis dedans.

 

  Mais, c'est du cuir ! Elle va être foutue ! s'exclame-t-elle.

 

  C'est pas grave, j'en rachetais une. Tout, mais pas ma voiture, compris ? 

 

Je n'ai rien d'autre sous la main, alors tant pis pour ma sacoche. Elle acquiesce en silence et je mets le contact avant de démarrer pour rejoindre l'appartement d'Umé. Je prie en mon for intérieur tout le trajet pour que le contenu de son estomac reste là où il est. 

 

Nous sommes arrivés devant l'immeuble. Je fais le tour pour lui ouvrir la porte et l'aider à sortir. A peine sorti, la voila qui s'écarte pour vomir sur le trottoir. Ouh, j'ai eu chaud. Ma sacoche et ma voiture ne sont pas passé loin du drame. 

 

Umé se redresse et esquisse un faible sourire.

 

  Merci de m'avoir raccompagnée et désolé pour ce laborieux spectacle. Je t'assure que c'est exceptionnel, ce n'est pas mon genre...

 

  Ton petit ami est là ?

 

  Non, nous n'habitons pas ensemble, répond-elle après une courte pause.

 

Je verrouille ma voiture et me dirige vers l'entrée de son immeuble.

 

  Alors je te ramène dans ton appartement et je resterais jusqu'au petit matin. Il est hors de question que tu restes tout de seule, ce n'est pas prudent. S'il t'arrivait quelque chose, car on ne sait jamais, tu serais bien embêtée.

 

 Tu veux venir chez moi ? s'exclame-t-elle.

 

Tiens, elle semble avoir repris des couleurs soudainement.

 

  Ne t'inquiète pas, je ne profiterais pas de la situation. C'est le médecin qui parle, et non l'homme, la rassuré-je.

 

Elle reste silencieuse un instant et finit par accepter mon offre. Elle sait aussi bien que moi que ce n'est pas prudent de rester seule dans ces conditions. Et puis, je ne suis pas un étranger non plus, nous nous connaissons depuis l'adolescence. Je l'ai rencontré en seconde, nous étions dans la même classe bien que je sois plus âgé. Car oui, je venais de repiquer mon année. Je n'étais pas un garçon bête, loin de là, mais je n'avais rien fait dans le seul but de mettre en rage mon père. La belle crise d'adolescence et de puberté quoi. JE me suis repris par la suite, mon but n'était pas non plus de foutre ma vie et mon avenir professionnel en l'air. Je voulais seulement emmerder un peu mon paternel et j'avais bien réussi. Je me suis pris une de ses roustes quand il a appris que je redoublais et qu'il a vu mon bulletin. En plus, j'ai passé des vacances d'été pourri cette année-là, j'ai eu interdiction de quitter la maison et mon père y veillait. 

 

  A quel étage tu es ? demandé-je.

 

  Au huitième, informe-t-elle.

 

  Et bien, heureusement qu'il y a l'ascenseur ! 

 

Elle blêmit soudainement. Dommage elle qui avait repris quelques couleurs.

 

  Il est en panne, annonce-t-elle dans un soupir.

 

Super .... Bon et bien aux grands maux, les grands remèdes.

 

Je ne la préviens pas et la soulève telle une princesse. Je l'aurais bien pris sur mon dos, mais j'aurais eu peur qu'elle me vomisse dans le cou. Je suis plutôt sympa, mais ça ne lui plaît visiblement pas cette soudaine proximité. Elle ne pense quand même pas prendre l'escalier jusqu'au 8ème dans son état ! 

 

  Repose-moi ! Tout de suite ! cri-t-elle en se débattant.

 

  Umé, ne sois pas stupide ! Il fera jour avant que tu poses le pied sur ton pallier. Alors maintenant, tu te tiens tranquille jusqu'à ce qu'on soit en haut, ordonné-je.

 

Elle m'énerve a faire sa tête de mule ! Mais au moins, elle s'est calmée. 

 

***

 

Arrivée à son étage, je la dépose sur la terre ferme ou plutôt sur le plancher en bois. Umé plonge sa main dans son sac et en ressort une clef qu'elle insert dans la serrure. Elle se retourne et m'adresse un regard sévère.

 

  S'il te venait à l'idée de fouiller ou de regarder plus que nécessaire mon appart, oublies. A moins de vouloir passer par la fenêtre, prévient-elle.

 

  Ok chef, dis-je dans un sourire.

 

Elle a oublié que je n'étais pas un adolescent en pleine puberté, mais un homme de vingt-huit ans. Et puis, je doute qu'elle ait la force nécessaire pour défenestrer un gaillard comme moi. Surtout dans son état.

 

Elle se radoucit et m'adresse à son tour un sourire avant d'ouvrir la porte de son appartement. Elle pénètre à l’intérieur et je la suis. Elle se débarrasse de son manteau avant de me demander le mien qu'elle dépose dans un placard dans l'entrée. Elle se déchausse avant d'aller s'affaler sur le canapé un peu plus loin. J'en profite pour jeter un œil en balayant la pièce du regard. Je suis étonné de voir que tout est très bien rangé et que rien ne traîne. La Umé de mes souvenirs était du genre bordélique. J'étais entrée dans sa chambre quelques fois lorsque ses parents étaient absents et c'était Bagdad. Sacré changement. Elle a l'air d'apprécier les plantes, il y a un peu partout. Son appartement est joliment décoré et chaleureux. Ce n'es pas le mien, mais je m'y sens bien. 

 

Je me dirige vers la belle aux bois dormant qui s'est visiblement assoupie sur sa banquette. Elle doit se sentir en sécurité avec moi pour s'endormir de la sorte, sans défense. Je pose ma main sur son épaule et la secoue légèrement.

 

  Umé, réveille-toi. Tu ne peux pas dormir ici, tu seras mieux dans ton lit. 

 

  Hum, laisse-moi, je suis fatiguée, chuchote-t-elle dans son sommeil.

 

Je serais tenté de lui enlever son pantalon pour qu'elle soit plus à l'aise, mais je risque de me prendre une claque au réveil. Je décide donc de la laisser comme ça. J'attrape le plaide posé sur le fauteuil à côté et l'étale sur elle.

 

  Bonne nuit Umé.

 

Sur ces mots, je prends place dans le siège à côté et j'observe cette jeune femme qui dort paisiblement. Je me rends compte qu'elle a énormément changé en dix ans, je ne reconnais très peu de choses chez elle aujourd'hui. Seul son physique semble inchangé, si on oublie sa coupe de cheveux. Mais, étrangement, cela ne me dérange pas. J'ai envie d'apprendre à la connaitre d'avantage. Et je suis sûr que je peux l'aider.

 

 

Il est huit heures du matin lorsque je quitte son appartement. Je n'ai pratiquement pas dormi de la nuit et ce n'est pas à cause d'une nuit de sexe intense. Maintenant, je suis sûr qu'elle ne risque plus rien et puis j'ai des consultations ce matin, mon cabinet ouvre dans une demi-heure. Je me raffranchirai le visage là-bas, je n'ai pas le temps de rentrer chez moi. 

 

La matinée me semble interminable. Vivement cette après-midi que je puisse faire une grosse sieste dans mon lit, mais avant ça, j'ai encore deux heures à tenir. Ma secrétaire fait entrer la patiente suivante. Une femme rousse, la petite quarantaine. Elle se débarrasse de son manteau qu'elle pose sur son siège. Elle porte un pull très moulant avec un décolleté qui laisse entrevoir une bonne partie de sa poitrine refaite. 

 

  Qu'est-ce qui vous amène ? demandé-je.

 

  Je crois que j'ai un rhume. J'ai mal à la gorge et du mal à reprendre mon souffle.

 

  Le nez qui coule ? 

 

  Un peu.

 

Je me lève pour attraper un abaisse-langue en bois et m'approche-t-elle pour regarder le fond de sa gorge. Elle ouvre la bouche en grand avant même que je lui demande. Hum, pas d'irritation. Après avoir écouté sa respiration avec mon stéthoscope, je constate que ses bronches ne sont pas prises du tout. Diagnostique ? J'ai à faire à une vilaine menteuse qui n'est pas malade. Elle me fait perdre mon temps.

 

  Vous n'êtes pas malade, dis-je en me rasseyant dans mon fauteuil. 

 

  C'est vrai, j'ai menti. Mon amie m'a dit que son médecin était un canon, et je voulais vous rencontrer. On pourrait aller boire un verre, pourquoi pas ce soir. Et vous pourriez venir chez moi, après pour qu'on joue au docteur version cochon, propose-t-elle d'une voix sensuelle.

 

Intérieurement, je pousse un gros soupir. Dieu merci, ce genre de chose ne m'arrive pas souvent. Même s'il n'est pas rare que je me fasse draguer par des patientes, elles ne vont rarement aussi loin. 

 

  Je ne suis pas dispo, je suis marié, répondé-je pour avoir la paix.

 

  Votre femme n'en saura rien.

 

Elle ne lâche pas le morceau celle-là. Elle veut vraiment me la sucer ou quoi ?

 

  Ecouter, Madame. J'ai des patients à voir et eux, ils sont vraiment malade. Alors, je vais vous demander de sortir, merci. 

 

  Vous êtes peut-être un beau gosse, mais vous n'êtes qu'un connard ! s'énerve-t-elle en se levant d'un bond.

 

Et vous, une grosse salope, ai-je très envie de lui répondre. Je la regarder sortir de mon bureau en furie. Bon débarras. Allez au suivant, encore une heure et quarante-cinq minutes. Courage Sasuke, que la force soit avec toi.

 

 

 

 

 

 

 

 

Lorsque j'ouvre les yeux, je suis éblouie pas les rayons du soleil qui traverse mon salon. Mon salon ? Qu'est-ce que je fous là ? Pourquoi n'ai-je pas dormi dans mon lit ? 

 

Je ferme les yeux et tente de me remémorer la vieille. Hum.. Le restaurant avec Sasuke, les Mojito, le vomi sur les pompes de Sasuke, sa voiture et.. Oh mon Dieu ! Il est venu ici ! Je l'ai laissé entrer ! Je repousse le plaid et bondi du canapé pour rejoindre ma chambre. 

Je jette un coup d’œil aux nombreux cadres qui trônent sur ma commode. A l'intérieur, des photos d'Umé et moi. Est-il venu ici ? Si oui, il les a forcement vu. En guise de précaution pour les fois prochaines, je décide de les cacher sous mes piles de pulls, dans le tiroir du bas.  

 

— Désolé Umé, c'est temporaire, m'excusé-je à haute voix. 

 

Sur ce, je rejoins le salon à la recherche de mon téléphone que je trouve dans mon sac à main. Je jette un œil à l'écran. Pas de message. Mon regard est attiré par l'heure : 11h15.

 

Attendez, on est quel jour déjà ? Ah oui, le 26 décembre. Samedi. Je prends le boulot dans un peu plus d'une heure. Va falloir que je me magne les fesses. Je sors des nouilles instantanées auxquelles je rajoute de l'eau bouillante, ça fera l'affaire pour aujourd'hui.

 

Après ce superbe repas, je file sous la douche. Cette fois-ci, je prends un peu plus mon temps et profite de l'eau chaude pour me réchauffer. Je laisse aussi mon esprit s'évader et repenser à la soirée d'hier. Étrangement, j'ai beaucoup apprécié la compagnie de Sasuke. Si fait abstraction de son erreur de jeunesse, on peut dire qu'aujourd’hui il est un homme accompli. Et il a un charme de fou, il est encore plus beau et charismatique que je le pensais. Il n'a plus rien avoir avec le gamin présent sur la photo d'Umé.

 

Est-ce qu'elle qui a provoqué notre rencontre ? Ou est-ce le fruit du hasard ?

 

Je ne sais pas quoi faire. Dois-je le revoir ? Est-ce vraiment une bonne idée ? Je crois que j'en ai envie... Umé ne m'en voudra pas, n'est-ce pas ? J'ai le droit de le voir,  non ?

 

Mais qu'en est-il de lui ? Veut-il toujours revoir la femme qui lui a vomi sur les chaussures ? Peut-être que oui, après tout, il est resté ici une bonne partie de la nuit. Je ne sais pas exactement à quelle heure il a quitté mon appartement, il n'est plus déjà plus là à mon réveil. Toutefois, il est hors de question que j'envoie un message ! C'est lui l'homme, c'est à lui de m'écrire s'il veut me revoir. D'ailleurs, maintenant que j'y pense, il s'est éclipsé comme un voleur. Aucun mot, aucun message. Quel mufle ! 

 

Je n'ai pas le temps de rêvasser plus. Je coupe l'eau de la douche et attrape ma serviette. Je dois me dépêcher, il est hors de question que je sois en retard.

 

Je suis dans le tram, en route vers la clinique. Il est midi passé, lorsque mon portable vibre. Je jette un œil et esquisse un petit sourire est voyant le nom de l'expéditeur.

 

"Je suis parti sans te dire au revoir ce matin, je ne voulais pas te réveiller. La matinée des consultations à été longue, je dirais même, interminable. Je vais profiter de l'après-midi pour faire une sieste, je manque de sommeil à cause d'une certaine personne dont on ne citera pas le nom."

 

Son message me fait plaisir, j'ai l'impression d'être redevenu une adolescente qui vient de recevoir un message de son amoureux. Alors que soyons clair, nous n'en sommes absolument pas là ! Ça doit être un effet secondaire de ma prise d'alcool associée aux anxiolytiques. Tiens, cela me fait penser que je n'en ai pas pris hier soir et bizarrement, je me sens plutôt bien.

 

"Chanceux. Moi je prends mon service dans moins d'un quart d'heure. Oh, c'est que tu as dû passer une nuit exceptionnelle pour ne pas avoir fermer l’œil de la nuit"

 

" On peut dire ça, j'ai veillé sur un bébé. Il a même régurgité sur mes nouvelles chaussures."

 

Non, elles étaient neuves ?! Oh, la honte !

 

"Désolé, je suis morte de honte..."

 

"Je te pardonne si tu acceptes qu'on se revoit"

 

Un sourire béat apparaît sur mon visage. Beurk ! Je me donne une petite tape sur la joue pour reprendre mes esprits. Un petit garçon en face de moi me regarde bizarrement. Il doit me prendre pour une folle.

 

"Ça peut se faire"

 

Ne jamais laisser croire au garçon que c'est du tout cuit. JAMAIS !

 

" Ce soir ?"

 

"Je finis trop tard ce soir, mais on peut se dire demain, c'est mon jour de repos. On peut aller boire un verre le soir"

 

SANS ALCOOL !! 

 

" Avec plaisir, j'ai hâte. A demain alors."

 

Je range mon téléphone en me demandant comment va se passer la soirée.

 

 

*** 

 

J'arrive à l'heure et même légèrement en avance au boulot. Je salue mes collègues et comme à chaque fois lors de mon arrivée, je rejoins la chambre 306. Je prends une grande respiration et toque à la porte. Je ne sais pas pourquoi je le fais, puisque je n'ai jamais de réponse. J'ouvre la porte et la referme derrière moi. 

 

 Salut, Umé. Je viens faire ta toilette, l'informé-je.

 

Normalement, cela ne fait pas partie de mon travail d'infirmière. Ce sont les aide-soignantes qui s'en occupent, mais j'ai insisté pour m'en occuper personnellement. Cela fait six ans que je m'occupe de ma sœur, chaque jour.

 

Je lui fais sa toilette tant bien que mal en évitant de trop la bouger à cause des machines et de ses branchements. Je pose mon regard sur ses paupières closes. Cela fait dix ans que je n'ai plus vu ses beaux yeux émeraude. 

 

 Tu sais que j'ai rencontré Sasuke, commencé-je en faisant une courte pause. Il a bien grandi, c'est un homme maintenant. Un médecin, ajouté-je en continuant la toilette. Ta jumelle est infirmière et ton ex petit copain, docteur. On peut dire que c'est toi qui nous a orienté dans cette voie. Tu veux savoir comment il va ? Il a l'air d'aller plutôt bien, depuis qu'il pense que tu es vivante. Oui, c'est une longue histoire. Il était persuadé que tu étais morte suite à l'accident et qu'on t'avait enterrée. Enfin, on peut dire que c'est en partie vrai.... 

 

Au début, j'en ai énormément voulu à Sasuke et pendant de longues années. Puis ce fut au tour d'Umé de s'attirer ma colère. Elle avait dix-sept ans et elle était loin d'être bête, alors comment a-t-elle pu accepter de monter dans la voiture d'un mec bourré ? A sa place, j'aurais refusé. Je me suis rendu compte avec le temps qu'il y avait deux coupables dans cette histoire. Sasuke, le conducteur et ma sœur, la passagère qui est montée dans le véhicule en toute connaissance de cause. 

 

Certes, cela m'a déstabilisé de rencontrer Sasuke par le plus grand des hasard ce jour-là, je n'imaginais pas le rencontrer un jour en chair et en os. Mais aujourd'hui, c'est à mes parents que j'en veux et surtout ma mère. Ils entretiennent ce rapport malsain avec ma jumelle. Ils ne veulent pas comprendre que si son cœur bat encore, c'est uniquement grâce à la machine. Bien sûr, on a l'impression qu'elle est encore vivante, on peut la toucher, lui prendre la main et lui dire bonjour, mais elle est en état de mort cérébrale. Cela veut bien dire ce que ça veut dire. Cerveau mort. Donc il n'y a plus rien à faire, et la maintenir en vie de la sorte, je ne cautionne pas. J'aime ma sœur plus que tout, mais là voir dans cet état, je ne peux plus. Je n'aimerais pas être à sa place, allongée dans un lit d’hôpital depuis dix ans. Mes parents l'empêchent de partir et nous, d'avancer. Ils n'arrivent pas à la laisser partir. Nous n'avons pas évolué d'un pouce en une décennie. Nous sommes tous coincés dans ce passé qui nous bouffe un peu plus chaque jour.

 

Les médecins dans tout ça ? Ils n'en n'ont rien à faire tant que le chèque de mon père arrive à la fin du mois. Tant qu'on paye... C'est d'ailleurs pour cette raison qu'Umé a atterri dans le service palliatif, c'est là où il y a le plus de place libre. Business is business.

 

Je me débarrasse du gant de toilette et des gants jetables sur la desserte à roulette. Je m'approche et pose délicatement ma main sur sa joue. Mes yeux se posent sur sa bouche ouverte. Un tuyau enfoncé dans la gorge lui permet de respirer, sans ça, elle ne serait plus là. Je ne compte plus le nombre de fois où j'ai voulu lui arracher pour qu'elle puisse enfin partir en paix. 

 

 Je suis désolée Umé... Tu sais, c'est papa et maman qui refuse de te laisser partir.

 

Je me penche pour lui déposer un baiser sur le front. 

 

 Je vais changer ta poche.

 

Je ne sais pas ce qui est pire entre ça et les couches... J'enfile mes gants avant de me mettre au boulot. J'ai encore ses perfusions à m'occuper et divers tests à effectuer. Il ne faut pas que je traîne, j'ai une tonne de patient à voir. 

 

Une fois tous les soins fini, je lui dépose un dernier baiser sur le front et lui chuchote à l'oreille.

 

 Je t'aime.

 

Puis je sors de la chambre en murmurant un "à demain". Même pendant mes jours de repos ou de congé, je viens une petite heure m'occuper d'Umé. Je n'ai pas assez confiance aux autres personnes pour qu'ils s'occupent d'elle. 

 

 

 

***

 

Il est passé vingt-trois heures lorsque je franchis la porte de mon appartement. Je suis épuisée, j'ai besoin d'une bonne nuit de sommeil pour être en forme demain. Je me dirige vers la salle de bain pour brosser les dents avant de filer dans ma chambre. Je me glisse sous la couette et m'endors en moins de cinq minutes.

 

 

***

 

La soirée avec Sasuke s'est très bien passé, il a même réussi à me faire rire. Nous avons discuté de son boulot, il m'a raconté quelques anecdotes sur ses consultations et certains de ses patients. Dont l'une très récente, avec une femme mature rousse qui lui avait fait du rentre-dedans. Les gens ne savent plus se tenir ou quoi ? En plus, elle n'était même pas malade. 

 

Nous avons aussi parlé de série et de film. Je me suis rendu compte que nous avions des goûts en commun. Et quelques différences. Il est inutile de compter sur lui pour aller voir une comédie romantique bien culcul. Même si je suis sûre que je peux le persuader de faire une acception. Je sais être persuasive quand je veux.

 

Il m'a taquiné parce que j'ai pris un cocktail sans alcool. Valait mieux pour lui et ses chaussures. Et puis, je ne tenais pas à avoir honte une deuxième fois.

 

Nous nous sommes revus quatre fois par la suite, le week-end, toujours dans un bar. Pour le moment, je préférais nous voir dans des lieux publics. J'ai pris l'habitude de parler de Sasuke lors de mes visites à Umé. Je sais qu'elle ne m'entend pas, qu'elle ne peux pas, mais je fais comme si c'était le cas. J'ai toujours aimé lui raconter ma vie, comme je le faisais avant. Je ne lui dis pas tout, je garde certaines choses pour moi. Comme par exemple le fait que Sasuke me plaise de plus en plus. Je pourrais lui en parler, mais je ne sais pour qu'elle raison, je suis gênée. C'est difficile à expliquer, mais j'aurais peur que ça ne lui plaise pas ou qu'elle soit jalouse. C'est stupide, puisqu'elle ne peut pas comprendre, ni même entendre ce que je dis. On n'est pas toujours très rationnel...

 

Nous avons pris l'habitude de nous écrire les soirs lorsque nous nous voyons pas. J'attends toujours avec impatience ses messages. Je suis blotti dans mon canapé, le plaid sur les jambes. Il est à peine vingt-deux heures. La télévision est allumée, mais je la regarde d'un œil distrait. Le téléphone dans les mains, je pianote un message avant de l'envoyé. J'ai beaucoup hésité, mais j'en ai très envie. Cela fait maintenant trois semaines que Sasuke est entré dans ma vie.

 

" Si tu es libre ce week-end, je te propose de venir à l'appartement. Dans mon immense bonté, je pourrais peut-être te cuisiner un plat."

 

 Ai-je une idée derrière la tête ? Peut-être bien. Sa réponse est presque immédiate.

 

"Avec plaisir, j'adorerais goûter ta cuisine."

 

"T'attends pas à grand chose non plus, hein."

 

Je sais cuisiner, mais je ne suis pas un cordon bleu. D'ailleurs, je vais devoir réfléchir à ce que je vais lui faire. 

 

"Souviens-toi, je ne suis pas difficile."

 

Heureusement.

 

 

***

 

 

Il est dix-neuf heures pile, lorsqu'on toque à ma porte. C'est sans surprise que je découvre Sasuke sur le pallier. 

 

  Quelle ponctualité, taquiné-je.

 

  Je me suis amélioré avec le temps, répond-il.

 

  J'ai souvenir d'un Sasuke en retard lors de notre premier resto, relevé-je.

 

 Tu l'étais aussi, Melle Haruno, dit-il en souriant.

 

  Touché ! 

 

Je me pousse pour qu'il puisse pénétrer dans l'appartement et je le débarrasse de son manteau que je range dans le placard. Je me retourne et prends le temps de l'admirer quelques secondes. Il porte une chemise blanche et un pantalon en jean. Simple et efficace. J'aime beaucoup. Son regard sombre se pose sur moi et je le vois qui me balaye rapidement de la tête au pied. A en juger par le petit sourire qu'il affiche, je dirais qu'il apprécie le spectacle.

 

J'ai fait un petit effort pour ce soir, j'ai mis une robe noir avec un col et des manches en dentelle. Elle m'arrive un peu au-dessous des genoux, j'espère que ça ne fait pas trop court. Je ne voudrais pas qu'il pense que je suis le repas de ce soir. Je me suis même légèrement maquillée les yeux pour l'occasion.

 

  Tu préfères qu'on mange sur la table de salon, ou sur la table basse devant un film ? demandé-je.

 

Honnêtement, j'ai une petite préférence pour la deuxième option. Cela fait moins sérieux et plus conviviale. 

 

  Va pour le canapé. Il avait l'air confortable, en plus. 

 

  Installe-toi, je nous apporte les assiettes, dis-je en lui indiquant le salon d'un geste de la main.

 

 

Je le rejoins rapidement avec un plateau contenant nos plats et des verres. Sasuke est assis en tailleur, je dépose son assiette devant lui. Je prends place à ses côtés.

 

  Paëlla ? 

 

 Végétarienne, ajouté-je. 

 

  Ça a l'air super bon ! 

 

  Merci. Mince, j'ai oublié les boissons. Qu'est-ce que tu veux ? J'ai coca, Ice Tea, eau gazeuse...

 

  De l'eau plate, ça sera très bien, me coupe-t-il. Sauf si tu as un Mojito, taquine-t-il.

 

  Tu sais où tu peux te le mettre ton Mojito ? lui répondé-je en lui lançant un coussin.

 

Je repars en cuisine chercher une carafe d'eau et j'en profite pour reprendre mes esprits. Je vois bien qu'il me mange des yeux depuis tout à l'heure et son regard de braise commence à me donner des papillons dans le ventre.

 

  Tu as besoin d'aide ? demande Sasuke depuis le salon.

 

Mes yeux se posent sur mon plan de travail et je l'imagine en train de me culbuter violemment dessus. Ouille ! Ça ne va plus moi, et pourtant, je n'ai pas encore bu une seule goûte d'alcool ! Ça promet, il va falloir que je calme mes hormones et freine mes ardeurs.

 

  Non, non. J'arrive !

 

Je prends une profonde et rejoins le salon.

 

La fourchette dans la bouche, je déguste l'excellente Paella végétarienne d'Umé. Cette dernière a insisté pour regarder Titanic, j'ai fini par céder pour lui faire plaisir. Après tout, cela fait au moins dix ans que je ne l'ai pas vu, alors pourquoi pas. J'avais souvenir avoir apprécié le film à l'époque.

 

Jack me tape sur le système dès sa première apparition. Lorsque "Oh, il est quand même trop sexy !" sort de la bouche d'Umé. Ouais, il est pas mal, mais je suis quand même au-dessus ! Je ne l'ai pas entendu dire "Ohalala, il est trop sexy ce mec" lorsqu'elle a posé les yeux sur moi dans le parc. Certes, elle me connaissait déjà, mais je pense avoir beaucoup changé en dix ans. Je suis passé d'un gamin à un homme. Un vrai. Viril et charismatique.

 

Elle aurait pu me dire que j'étais devenu un bel homme quand même...

 

Je trouve que Dicaprio apparaît un peu trop à l'écran à mon goût, Umé a les yeux fixés sur l'écran. Je pourrais m'endormir, qu'elle ne le verrait même pas. 

 

Après la dernière fourchette, je laisse l'assiette sur la table et m'assois confortablement sur le canapé. Je capte enfin le regarde de mon rencard, son regard émeraude se pose sur moi.

 

— Ça t'a plus ? 

 

 C'était très bon, répondé-je.

 

— Je vais débarrasser rapidement, dit-elle.

 

Elle se lève et attrape la carafe d'eau. Je reporte mon attention sur le film lorsque je sens un poids et quelque chose de froid au niveau de mon entre-jambe. Je baisse les yeux et découvre Amé, affalée à moitié sur mes jambes, à moitié sur le tapis. Ses mains sont posées sur mes cuisses, la cruche vide dans l'une d'elles. 

 

 Oh, je suis désolée. J'ai trébuché, explique-t-elle en se redressant d'un bond. 

 

D'abord, elle me vomit sur les chaussures et maintenant elle me gèle les couilles. Je vais choper un rhume des testicules ! 

 

 Tu vas attraper froid, enlève ton pantalon. On va le mettre sur le radiateur. Pour qu'il sèche, se sent-elle obliger de préciser.

 

N'ayant guère le choix, je m'exécute. Je déboutonne mon jean et le fait glisser le long de mes cuisses avant de lui donner. Cela me fait bizarre de me retrouver comme ça devant Umé après tant d'années. Pourtant, Dieu sait qu'elle m'a vu nu. Par contre, j'ai toujours aussi froid. Le problème est que mon caleçon est mouillé aussi.

 

 Tu veux un plaid ? demande-t-elle.

 

Avant même que je puisse répondre, elle me le pose sur les jambes. Alors qu'elle se redresse, je lui attrape le poignet et l'attire brusquement sur moi. Elle pousse un petit cri, surprise. C'est la première fois depuis nos retrouvailles que nos visages sont aussi proches l'un de l'autre. Mes yeux se perdent dans son regard émeraude.

 

Sasuke, chuchote-t-elle. 

 

— Ce n'est pas le plaid que je veux, murmuré-je d'une voix rauque.

 

Mon regard descend sur sa bouche, et je devine qu'elle fait de même. Je sens ma verge se tendre sous le tissu froid de mon caleçon. Ma main libre se pose sur sa nuque et je l'attire doucement à moi. Je ne rencontre aucune résistance. Elle se laisse faire, ce qui est plutôt encourageant. Nos bouches se frôlent doucement.Elles se rencontrent à nouveau après autant d'années, même si j'ai l'impression qu'il s'agit de la première fois. Doucement Sasuke, ne précipite pas les choses. Mais bordel, que c'est dur ! Je n'ai pas souvenir d'avoir ressenti autant de désir autrefois.

 

 Sasuke, souffle-t-elle contre mes lèvres.

 

Bordel !

 

Le dernier rempart tombe. J'appuie sur sa nuque pour que sa bouche s'écrase contre la mienne. Enfin. Je l'entends gémir à ce doux contact. Nos baisers sont d'abord timides, comme deux adolescents qui découvriraient les prémices de l'amour. Puis ils deviennent plus avides, plus langoureux. Elle entrouvre ses lèvres et j'en profite pour y glisser ma langue. La sienne ne tarde pas à venir à ma rencontre.

 

Je pose mes mains sur ses fesses et la presse plus près de moi. Elle est maintenant à califourchon sur moi et plus précisément sur mon entre-jambe. Vu l'état dans lequel se trouve Sasuke Junior, elle doit sentir mon pénis en érection à travers nos tissus. Mais, elle ne s'écarte pas pour autant. Ce qui me laisse penser qu'elle n'est pas contre ce qu'il se passe actuellement entre nous.

 

Je remonte lentement sa robe sur ses hanches, guettant sa réaction. Umé ne semble pas s'en rendre compte ou alors elle s'en fiche complètement. Sa bouche est toujours occupée avec la mienne et ses mains se perdent dans mes cheveux, les agrippant, les tirant parfois. Ses yeux sont clos, elle semble se laisser porter par ses envies. 

 

J'ai envie de prendre mon temps, de lui ôter ses vêtements un à un et d'admirer chaque partie de son corps. Mais entre ce que je voudrais et ce que je fais, il y a un monde. Mon désir prend le dessus, je ne suis plus très rationnel. Mon cerveau ne cesse de me crier "Fais lui l'amour ! Fais lui l'amour ". Cet idiot ne m'aide pas beaucoup, je dois lutter pour ne pas lui arracher son collant et son shorty pour entrer profondément en elle. Calme tes ardeurs Sasuke, tu n'es plus un adolescent prépuber et précoce.

 

 Sasuke, gémit Umé contre mes lèvres.

 

Ok. C'est mort. 

 

Cette voix sensuelle et presque suppliante à raison de moi. Je pose mes mains contre les fesses fermes et rebondies d'Umé et je tire d'un coup. Je commence à déchirer son collant avec force. Promis, je lui en rachèterais une paire.

 

Je pousse son sous-vêtement sur le côté et effleure son intimité du bout des doigts. Je suis ravi lorsque je constate qu'elle est aussi excitée que moi. Mais ça ne m'aide pas à garder mon sang-froid et à calmer mes ardeurs.

 

J'esquisse un sourire et écarte mes lèvres des siennes pendant quelques secondes.

 

 J'en peux plus, dis-je qu'une voix rauque. Je vais m’enfoncer profondément en toi, là, dans moins d'une minute. Je ne serais peut-être pas très doux alors si tu n'en a pas envie, dis le moi tout de suite. Gifle-moi même si tu veux.

 

Mais pas trop fort, pensé-je.

 

Umé esquisse un petit sourire et m'embrasse tendrement en chuchotant un "Je reviens". Elle se lève en quatrième vitesse et disparaît quelques instants avant de revenir. Elle se replace à califourchon sur moi et me tends un petit objet que j'identifie très rapidement. Un préservatif. 

 

Bordel, dans l'action, j'ai faillis oublier ce putain de bout de latex.

 

C'est le feu vert.

 

Je déchire le plastique avec les dents et attrape la capote. Je sors ma verge durci de mon caleçon et enfile délicatement la protection. Je place ensuite mon pénis et le place à l'entrée du vagin d'Umé. Je respire un bon coup et m'enfonce profondément en elle, lui arrachant un soupir d'aise. Je ne bouge pas, je profite quelques instants de ce merveilleux contact intime. C'est finalement elle, qui prend l'initiative de bouger en premier. Elle monte et descend lentement le long de mon sexe tendu. Un doux supplice. Mais mon instinct primaire et animal reprend le dessus. J'ai envie de la pénétrer rapidement et brutalement. J'ai envie qu'elle cri et hurle de plaisir sous mes coups de rein. Je ne veux pas recevoir aujourd'hui, je veux donner. 

 

Je romps notre baiser et ouvre les yeux. Ceux d'Umé me fixent, surpris. 

 

  Lève-toi et mets-toi à quatre pattes, juste à côté, là, ordonné-je en montrant la place à côté de moi.

 

 Hum, en levrette ? Ça me plaît, dit-elle avec un petit sourire. 

 

 On obéit et en silence, Femme ! taquiné-je en lui claquant la fesse droite. 

 

Elle rigole tout en se plaçant comme je lui ai demandé, sur le canapé.

 

 Fais pas trop le malin, Sasuke. Je te laisse croire que tu as les commandes, pour le moment. Maintenant, tais-toi et prends moi, ordonne-t-elle en se cambrant.

 

C'est qu'elle serait directive la chipie. Mais ça me plaît, beaucoup même. On verra qui porte la culotte ici et mon petit toi me dit que c'est un Uchiwa.

 

Je place ma verge contre les lèvres intimes d'Umé et la titille sans jamais la pénétrer. Mon gland flirt avec l'entrée de son vagin, encore et encore. Oui, je m'amuse un peu avec elle. C'est une petite vengeance made in Sasuke. Je pose mes mains sur ses hanches pour prendre appui et continue de la faire attendre. Aller, encore quelques petites minutes.

 

 C'est pas mon nombril, hein ? Tu peux y aller et me la mettre, râle-t-elle.

 

 Je rentrerai quand je l'aurais décidé, dis-je en appuyant sur le "je".

 

Je ne la vois pas, mais je devine qu'elle monte ses yeux au ciel. J'en mettrais ma main a couper.

 

  Ah ouais ? Si tu ne la rentre pas maintenant, je vais voir le voisin qui lui sera ravi de me la mettre, dit-elle en appuyant sur le mot "ravi".

 

Ok, elle a gagné. Une forte jalousie s’empare de moi et je l'empale sur le champ d'un grand coup de rein, lui arrachant un cri. 

 

  Contente, Madame l'impatiente ? grogné-je en imprimant un mouvement de va-et-vient.

 

 Oui, gémit-elle.

 

  Ça fait quoi de se faire attaquer par un anaconda ?

 

  Sasuke ferme-là et baise-moi, gronde-t-elle. Et en silence.

 

Je me retire et la pénètre à nouveau d'un lent coup de rein. Nos bassins se rejoignent bientôt et nous gémissent à l'unisson. Je la fais languir un peu en gardant cette cadence quelques secondes. Je me force à garder mon calme avant de perdre le contrôle, ce qui ne tarde pas à arriver. Elle pousse un cri quand j'accélère brusquement le rythme des va-et-vient. A ce moment, je ne lui fais plus l'amour. Je la baise, comme elle me l'a si gentiment demandé. Nos respirations accélèrent, mon cœur tambourine bruyamment dans ma poitrine. A chaque coup de rein, elle cri. De plaisir. Parfois, mon prénom s’échappe de ma bouche. Et J'adore ça. Dis-le, encore. Encore. 

Elle descend une de ses mains jusqu'à son entre-jambe et je devine qu'elle se caresse le clitoris pendant que je la pénètre. Cela m'excite encore plus, bien que je doute que cela soit possible.

 

Va-y, touche-toi. Va y, murmuré-je d'une voix rauque.

 

Je la sens proche de la jouissance. J'ai envie d'éjaculer, mais je me contrôle. Je veux qu'elle jouisse avant moi en criant mon nom. Mon nom.

 

 Umé, gémis-je.

 

Soudain, je la sens se tendre et se crisper sous moi. Est-ce mon imagination ? Probablement. Je continue quelques mouvements de va-et-vient, quand je vois un bras d'Umé passer derrière son dos et tenter de me repousser. Elle ne gémit plus, elle ne crie plus. 

 

 Arrête Sasuke. Stop, supplie-t-elle d'une voix tremblante. 

 

Je me fige instantanément. Je la vois sanglotante sous moi. Je ne comprends pas ce qu'il se passe, qu'est-ce qu'il y a pu se passer ? Je lui ai fait mal ? Je me retire lentement. Umé se redresse et se blotti contre le coin du canapé en attrapant le plaide pour se couvrir. Je croise son regard, embué de larmes, qui quelques secondes plus tard, coulent le long de ses joues. Je suis sous le choc, et je m'en veux terriblement. J'ai forcement fait un truc, même si j’ignore quoi. 

 

— Je suis désolée, bégaye-t-elle. Pardon. Pardon. Pardon.

 

Elle ne cesse de répéter ce dernier mot. Pourquoi s'excuse-t-elle ? Elle n'a rien fait de mal. Je me dirige lentement vers elle et la prends dans mes bras. Elle tremble de tout son corps, sa respiration est très bruyante, presque sifflante. Je lui caresse doucement le dos et lui répète que ce n'est rien. 

 

— Inspire et Respire. Doucement. Inspire, respire. Voilà, comme ça. Continue. Inspire, Respire.

 

Après quelques minutes, doucement, elle se calme. Sa respiration redevient régulière. J'avance lentement ma main de son visage et essuie ses larmes du pouce. Son regard croise le mien et j'y lis de nombreuses émotions. De la reconnaissance, de la honte et d'autres que je n'arrive pas à identifier clairement. Que me caches-tu Umé ?

 

 Ce n'est rien, ça arrive. Tu n'as pas à t'en vouloir. Je suis plutôt quelqu'un d'imposant et d'intimidant, souris-je.

 

J'essaye de détendre l'atmosphère, je ne voudrais pas qu'elle s'en veuille ou qu'elle se sente mal à l'aise face à ce qu'il s'est passé. J'aimerais lui demander ce qui l'a mise dans cet état, mais je sais que c'est une mauvaise idée et qu'elle me dira rien. Pas pour l'instant en tout cas. Elle s'est refermée comme une huître.

 

— Je suis désolée, j'espère que tu ne m'en voudras pas, mais je voudrais être seule...

 

Ça m'embête de la laisser dans cet état, mais elle est grande et si elle veut que je parte, je le ferais. Je ne veux pas être le mec lourd qui force en s'imposant. C'est son choix et je le respect. Je réajuste mon caleçon et attrape mon jean encore mouillé et l'enfile. Je jette un coup d’œil à Umé qui est toujours recroquevillée. Elle ne m'adresse pas un seul regard, son regard semble perdu dans le vide. 

 

Je pousse intérieurement un soupir et attrape mon manteau. 

 

— N'hésite pas à m'écrire si tu as besoin de quoi que ce soit, je te laisse. Dormir te fera du bien, l'informé-je gentiment, bien que je ne sois pas sur qu'elle m'entende.

 

J'enfile mes chaussures et quitte l'appartement d'Umé en refermant la porte derrière moi. J'espère qu'elle ne coupera tout contact suite à ce qu'il vient de se passer. Je vais croiser les doigts pour qu'elle m'écrive dans les prochains jours et si ce n'est pas le cas, je pourrais toujours aller là voir chez elle. 

 

Je sais qu'il est tard, mais je suis sûr qu'il est dispo. Après tout, il est seulement un peu plus de vingt-deux heures. J'envoie un rapide message à mon meilleur ami. " T'es dispo ? J'ai besoin d'une séance et de tes talents de psychologue".

 

Sa réponse est presque immédiate. "Bien sûr, viens !"

 

 

Un quart d'heure plus tard, je pénètre dans l'appartement de Naruto, qui m'accueille avec un grand sourire. 

 

— Je dérange pas trop ? 

 

— Non, t'inquiètes. Hinata voulait se coucher tôt, elle a une migraine. Du coup, elle est dans la chambre. Viens t'allonger sur le canapé, s'exclame joyeusement le blondinet. 

 

Je me dirige vers le salon et m'installe confortablement sur la banquette. 

 

— Faut que je ferme les yeux ? demandé-je bêtement.

 

— Comme tu le sens, répond-il en haussant les épaules.

 

— Tu fais vraiment allonger les patients dans ton cabinet ? dis-je septique.

 

Le blondinet éclate de rire et s'assoit dans le fauteuil à côté.

 

— Non, mais j'ai toujours voulu essayer. Bon alors, dis-moi ce qui t'amène à cette heure si tardive ?

 

 J'étais avec une fille. En pleine action, si tu vois ce que je veux dire. Et d'un coup, elle s'est mise à pleurer, soupiré-je.

 

 Wouah, tu fais si mal que ça l'amour ? s'exclame Naruto.

 

— Ta gueule ! Ça n'a rien à voir avec Sasuke Junior. Je ne comprends pas, je lui ai peut-être fait mal sans le vouloir... Toi, ça ne peut pas t'arriver avec ton petit orvet, mais moi... avec mon gros Anaconda... 

 

Je reçois un coussin en pleine tête.

 

 En bref, elle pleurait. Je l'ai calmé et je pensais rester la nuit avec elle, mais elle m'a demandé de partir. Elle voulait rester seule alors, je suis parti.

 

 La queue entre les jambes, ajoute mon ami.

 

 Ta gueule.

 

 Comment as-tu rencontré cette fille ? 

 

Je pousse un soupir. 

 

 Crois-le ou non, mais c'est Umé.

 

Je le vois cligner des yeux. Il semble perdu et je le comprends.

 

— Mais, elle est morte....

 

Naruto ne connait pas Umé, puisque je l'ai rencontré plus tard, mais il connait l'histoire. Notre histoire, pour lui avoir expliqué autrefois. Je commence donc à lui raconter les derniers événements. Notre fameuse rencontrée inopiné sous la neige, ma stupeur lorsque j'ai aperçu son visage si familier. Notre premier rendez-vous en n'oubliant pas l'épisode du vomi sur mes pompes. Et tout le reste. Il m'écoute attentivement, toujours assit sur son fauteuil.

 

 Ça me fait bizarre de la revoir après autant d'année, d'autant plus que je la pensais morte. Tu n'imagines pas le poids que ça m'a enlevé, le soulagement de savoir que je ne l'ai pas tué. Je suis content de l'avoir retrouvé, même si elle me semble si différente...

 

 Hum, dis-moi en plus ?

 

 Je ne sais pas comment l'expliquer. C'est elle, sans être elle. Après tout, c'était une adolescente quand je l'ai quitté et maintenant, c'est une femme.

 

 Tes impressions ?

 

 Bah, elle a grandi et beaucoup évolué depuis. Après tout, ça fait dix ans et moi aussi j'ai changé. En fait, le plus étonnant serait qu'elle soit toujours la même. L'accident l'a profondément changé, aujourd'hui encore elle semble avoir encore des séquelles. 

 

 Mais encore ?

 

 Bah j'en sais rien, on en a pas parlé. Elle ne veut pas parler de l'accident... Parfois, elle semble même ailleurs...

 

 Hum, dis-moi en plus ?

 

Je lève les yeux au ciel et me redresse d'un bond. 

 

— Dis donc, tu te fous de moi là ? C'est à ça que te paient tes patients ? A dire "Hum, dites-moi en plus", "Vos impressions" et "Mais encore" ?

 

— J'ai jamais dis que la psychologie était difficile, rit le blondinet. Parfois, je ne dis pas un mot de la séance, je me contente d'écouter. C'est ce que veulent la plupart des gens. 

 

Je pousse un soupire et me rallonge.

 

— Je crois que je suis en train de tombé amoureux mec. 

 

—  C'est bon l'amour, rit Naruto. 

 

Je décide d'ignorer la taquinerie de mon ami et de poursuive.

 

—  J'ai envie de la protéger et de la prendre dans mes bras tout le temps. Ça m'en a coûté de la laisser seule chez elle aussi vulnérable... Je pense qu'on pourra se rapprocher plus sérieusement lorsqu'elle m'aura enfin dit ce qu'elle me cache. Je ne sais pas ce que c'est, mais ça la bouffe au quotidien.

 

—  Elle t'en parlera quand elle sera prête. Et puis, peut-être que cela n'a rien à voir avec l'accident et que tu te trompes sur toute la ligne. 

 

—  Peut-être... Dis, ça te dérange si je pionce sur ton canapé ce soir ? 

 

— Pas de soucis. On se fait quelques petites parties de Fifa avant le dodo ?

 

— Ok. Mets le jeu.

 

 

 

Trois heures plus tard, je me couche enfin sur la banquette de Naruto. Ce dernier m'a gentiment prêté un oreiller et une couette. Confortablement installé, je repense aux événements de ce soir. Je revois le visage en larme d'Umé. La pauvre, je ne comprends toujours pas ce qu'il a pu se passer. Je décide de lui envoyer un petit message.

 

"J'espère que tu vas mieux. Tu dois être probablement en train de dormir, alors fais de beaux rêves Je vais seulement m'endormir, je suis passé chez mon meilleur ami faire des matchs de Fifa. A bientôt."

 

Plutôt que d'être allongé sur le canapé de Naruto, j'aurais préféré être dans le lit d'Umé, à ses côtés. Elle aurait pu dormir au chaud, dans mes bras musclés. Je pousse un soupir. C'est bête, mais elle me manque. Je me remémore les traits de son visage, ses beaux yeux émeraude lorsqu'il me vient une idée. 

 

J'ouvre Facebook et je tape dans la barre de recherche "Haruno Umé". Zéro résultat. Hum. Je ressaye, mais sans le prénom cette fois. Cinq personnes apparaissent, mais une attire mon attention. Sur sa photo de profil, je reconnais son visage, mais cette fille semble s’appeler Sakura. Bordel, ce n'est pas seulement une sœur qu'à Umé, mais une jumelle ! Une jumelle ! Je n'ai pas souvenir qu'elle est précisée ce détail. Curieux, je clique pour accéder à sa page.

 

Mon regard s'arrête sur l'image de la jeune femme. C'est fou, c'est vraiment son portrait craché ! S'il n'y avait pas écrit Sakura, j'aurais été persuadé d'être sur le profil d'Umé. 

 

Quelque chose plus bas m'interpelle. Dans ses informations, il est écrit : "Infirmière à La ligne Bleue". Les deux sœurs travailleraient dans la même clinique ? Impossible. Umé m'a dit que sa frangine était parti loin. Est-ce un faux profil ? Je prends plusieurs minutes afin de fouiller plus en détail le compte. Née le 28 mars 19XX. Je peux voir que nous n'avons pas été dans le même lycée, mais cela ne m'étonne pas, je savais déjà que sa sœur n'avait pas étudié dans le même établissement qu'Umé et moi. Les diverses photos, auquel j'ai accès, semble tout à fait normal. Des amis à elle en ont même commenté plusieurs. Son mur Facebook présente plusieurs messages de ses potes dont certain me sont familier. Ok, tout est en règle. Ce compte n'est pas un fake. C'est bel et bien une jumelle qu'a Umé.

 

Je suis sous le choc, je ne m'attendais pas à ça. Elles ont dû bien se marrer plus jeunes, en se faisant passer l'une pour l'autre. C'est le genre de blague que j'aurais adoré faire moi en tout cas.

 

 

Soudain, une idée folle me vient à l'esprit. Et si, je faisais fausse route depuis le début, depuis notre fameuse rencontre sous la neige.  Et si, ce n'était pas Umé, mais sa sœur jumelle Sakura que j'avais rencontrée ce jour-là assis sur le banc. Après tout, je l'ai toujours trouvé différente depuis nos retrouvailles. Dans ce qu'elle aime, son comportement ou alors son caractère. J'ai souvent pensé avoir affaire à une autre personne, mais j'ai mis ça sur le dos de la maturité et des années passées.

 

Que serait donc devenue Umé ? Serait-elle partie loin d'ici pour refaire sa vie ? 

 

Ce que je ne comprends pas, c'est la raison pour laquelle Sakura aurait endossé le rôle de sa sœur auprès de moi. Plus j'y pense et plus je me dis que je suis fou et que c'est impossible. Mais mon instinct me crie le contraire. Que dois-je faire ? La prendre entre quatre yeux et lui faire avouer ? Non, ce n'est pas une bonne idée. Si j'ai vu juste, ce secret la bouffe à petit feu. Je suis persuadée qu'elle me dira tout bientôt, quand elle sera prête. J'ai envie de savoir, mais je ne veux pas brusquer les choses surtout si je fais fausse route. Après tout, avant de la revoir, j'avais l'impression d'être une coquille vide. Je vivais avec un poids constant sur mes épaules et n'avait plus aucune envie. Je me contentais de soigner les gens comme pour expirer mes pêches, mes erreurs de jeunesse. Mais depuis que j'ai rencontré cette fille, j'ai repris goût à la vie. Qui que ce soit, Umé ou Sakura, j'apprécie sa présence. J'aime beaucoup la femme que j'ai devant les yeux et j'ai envie de connaître cette personne, qu'importe son prénom. J'ai envie de la revoir et de passer du temps à ses côtés.

 

 

C'est la tête comme un chou-fleur, des idées pleins la tête que je m'endors.

Recroquevillée sur mon lit, je fixe un point imaginaire au loin. Tout se bouscule dans ma tête, j'ai l'impression que mon cerveau va exploser. J'ai honte, qu'est-ce que j'espérais ? Je me fais passer pour Umé depuis le départ, mais je me rends compte que je suis probablement la personne qui souffre le plus de cette usurpation. Depuis qu'il est entré dans ma vie, il l'a complètement chamboulé. Je n'ai jamais été certaine de mon avenir, mais une chose est sûre, il n'a jamais fait parti de l'équation. Je l'ai détesté par le passé, et aujourd'hui, je commence à m'attacher à lui. Je n'aurais jamais cru cela possible, mais étrangement, j'aime sa présence à mes côtés. Et j'ai honte de ce que je ressens. Ce n'est pas bien

 

Umé n'approuverait sans doute pas, n'est-ce pas ? Elle me détesterait de fréquenter son Sasuke. Une partie de moi me dit que je dois l'oublier et le sortir de ma vie. Définitivement et pour toujours. Même si je ne suis pas sûre qu'il me laisse faire.

 

Et l'autre, me pousse à aller vers lui. A le voir, à lui parler de tout et de rien. J'aime voir son visage dans mon champ de vision, entendre le son de sa voix ou encore croiser son regard ténébreux. Mais je veux plus. Je ne veux plus être une pâle imitation d'Umé à ses yeux, juste être moi. J'ai envie qu'il me découvre et qu'il apprenne à connaitre Sakura et surtout qu'il m'appelle par mon prénom. 

 

Maudit prénom... Tout allait bien jusqu'à ce qu'il le prononce. Trois lettres. U. M. E. Il ne l'avait pas dit depuis un moment, alors pendant un court instant, j'ai oublié. Oublié que je prétendais être une autre personne, que je n'étais pas Sakura à ses yeux. Juste ma jumelle. Ouais, pendant quelques minutes, j'avais oublié que j'usurpais l'identité de ma sœur.

 

Lorsque le mot "Umé" est sorti de sa bouche, ce fut la douche froide. Un pincement au cœur. J'ai repris mes esprits en moins de cinq secondes et je me suis sentie affreusement mal. Sale. J'avais l’impression d'être la projection de ma sœur. Ce n'était pas réellement à moi que pensait Sasuke pendant qu'il me pénétrait. Ce n'était pas moi. Mais ma jumelle. 

 

Je n'ai pas supporté. C'était trop cruel de faire l'amour avec quelqu'un qui me prenait pour une autre.

 

J'attrape un mouchoir dans la boite à côté de moi et me mouche bruyamment pour la énième fois. J'essuie mes larmes d'un revers de la main et attrape mon téléphone. Je ne sais pas quelle heure il est, mais je m'en fou, j'ai besoin de parler. J'ai besoin de soutien et de réconfort. J’appelle ma mère qui décroche à la cinquième sonnerie.

 

— Sakura ? dit-elle surprise

 

— C'est moi, sangloté-je.

 

— Tu as vu l'heure qu'il est ?! s'exclame-t-elle.

 

Je jette un rapide coup d’œil à mon réveil sur la table de chevet : 00:15. Cela fait donc si longtemps que je me morfonds sur mon sort ?

 

— J'avais pas vu désolé, m'excusé-je. J'avais besoin de

 

— Bon sang, reprends-toi, me sermonne-t-elle en me coupant la parole. Dans quel état tu vas être demain matin pour t'occuper de ta sœur ? Ou plutôt, tout à l'heure car c'est dans quelques heures seulement. Tu es irresponsable Sakura ! On ne peut pas compter sur toi, soupire-t-elle.

 

La bouche ouverte, mais aucun son ne sort. Une larme coule le long de ma joue et s'écrase sur ma cuisse. Je suis stupide de l'avoir appelé. Qu'est-ce que j'attendais de sa part ? Du réconfort ? Je devrais le savoir pourtant, c'était peine perdue. Depuis l'accident d'Umé, je ne suis bonne qu'à m'occuper de cette dernière. A croire que sa vie ne dépend que de moi. Mais mes états d'âmes, à moi, on s'en fou.

 

La tristesse s'efface pour laisser place à la colère. Raccroche Sakura, raccroche avant de regretter ce qui va se passer. Ne dis rien... Prends sur toi, comme d'habitude.

 

Mais les mots sortent sans que je ne puisse les arrêter.

 

— C'est moi, l'irresponsable ? Qui est-ce qui refuse de débrancher Umé pour la laisser reposer en paix ? Qui s’acharne à la maintenir en vie ?Qui ? crié-je au téléphone.

 

— Je t'interdis de dire ça Sakura. Ta sœur est en vie, son cœur bat, rétorque-t-elle calmement.

 

J'ai de la peine pour elle, de s'accrocher autant désespérément à sa fille, mais elle oublie trop souvent qu'elle en a une deuxième. Pourquoi ne la laisse-t-elle pas partir ? Je ne suis pas assez bien ? Je ne lui suffit pas ? Je suis pourtant bel et bien en vie, mon cœur et mes poumons respirent sans l'aide de personne. Je suis là, maman. Mais tu ne le vois pas. A ses yeux, je ne suis qu'une infirmière qui m'occupe de sa chère et tendre Umé.

 

— A cause d'une putain de machine, hurlé-je en pleures. 

 

— Tu racontes n'importe quoi, rétorque ma mère dans un reniflement. Visiblement, tu n'as pas les idées claires. Tu devrais aller dormir. Bonne nuit Sakura, dit-elle en raccrochant.

 

— Va te faire foutre, explosé-je en envoyant mon téléphone valser à l'autre bout de la pièce.

 

Mon portable s'écrase avec fracas contre le mur gris de ma chambre.

 

Soudain, je retrouve un peu mes esprits. La colère s’atténue pour laisser la place à la tristesse. Merde ! Je bondis de mon lit et me précipite vers mon smartphone explosé. Bordel ! Bordel ! Bordel de merde ! Me voilà bonne pour me racheter un téléphone... Ma première pensée est pour Sasuke. Son numéro. Je l'ai perdu. Il va me contacter, n'est-ce pas ? 

 

Il va le faire. 

 

Oui, tout se passera bien.

 

— Sasuke, aide-moi, supplié-je dans un sanglot.

 

***

 

La sonnerie stridente du réveil m'annonce qu'il est l'heure de se lever. Je me frotte les paupières et pousse un long soupir.  Bordel, il est déjà huit heures ? Je dois sortir du lit, je dois m'occuper d'Umé. Je pousse un soupir et repousse les draps. 

 

— Quand faut y aller, faut y aller, dis-je pour me motiver.

 

Dimanche... Ce n'est pas aujourd'hui que je vais pouvoir m'acheter un téléphone. Si Sasuke m'écrit, je ne pourrais même pas lui répondre et après les événements d'hier, je ne voudrais pas qu'il se fasse des idées. Comme par exemple que je l'ignore intentionnellement. Oh, mais il est peut-être sur Facebook ! Devrais-je le chercher et l'ajouter ? Ou cela serait-il bizarre ?

 

Etant donnée qu'il ne sait pas que j'ai explosé mon téléphone, il va sans doute me trouver lourde, non ? Il va penser que je suis à fond sur lui et que je vais mater toutes ses photos. Non, on n'est plus des gamins après tout. Je pourrais toujours y jeter un œil bien sûr, mais sans mettre aucun "j'aime". Ni vu, ni connu.

 

Oh, mais attends, qu'est-ce que j'ai comme photo ? Je n'ai pas de truc étrange au moins ? Oh mais, un moment.... Quelle conne. Et avec quel putain de compte je vais l'ajouter ?! Sakura grosse cruche ! Tu as failli le demander en amis avec ton propre Facebook ! Ohlalala, on n'est pas passé loin de la catastrophe ! Devrais-je en créer un exprès ? 

 

Non cela va être très louche, il va voir de suite que le compte date d'aujourd'hui. Bordel, pourquoi j'ai explosé mon téléphone ! Ça m’apprenais à ne pas contrôler mes émotions. Je n'ai plus qu'à prendre mon mal en patience.

 

Il faut que j'arrête de rêvasser et que je me dépêche avant d'être en retard au boulot. Enfin, aujourd'hui, je ne travaille pas vraiment, je dois juste m'occuper d'Umé et cela va me prendre une bonne partie de la matinée. J'espère que ma mère ne va pas débarquer à la clinique pour me faire la morale et vérifier comment je m'occupe de ma sœur. Je n'ai pas la motivation à écouter ses sermons.

 

 

 

Il est onze heures passé lorsque je m'affale sur une chaise dans la salle des infirmières. Il ne me reste plus qu'à changer les perfusions d'Umé, je le ferais tout à l'heure. Je me repose un peu.

 

 Saku, tu peux venir m'aider à changer Mr Koto de la chambre 315 ? 

 

Ino Yamanaka, collègue et amie depuis quelques années maintenant. Ce n'est pas dans mes tâches normalement, mais il arrive parfois que je la dépanne pour qu'on puisse papoter un peu. 

 

— J'arrive. 

 

Je me lève et la suis dans le couloir. Quand soudain, j’aperçois une silhouette familière à l'autre bout du couloir. Au fils des pas, je finis par distinguer les traits de son visage. Sasuke ? Non, c'est impossible. Que fait-il ici ? Il arrive à ma hauteur et m'adresse un petit sourire. La première chose qui me vient à l'esprit est mon téléphone. Je dois lui dire qu'il ne marche plus.

 

 Tiens, que fais-tu là ? demandé-je surprise.

 

— Je passais voir mon meilleur ami, tu sais celui qui travaille en psychologie. Du coup, j'ai fait un petit détour pour te voir.

 

 Tu as de la chance. Elle ne travaille pas aujourd'hui normalement, mais comme

 

 Mais on est dimanche, dis-je en coupant la parole à mon amie.

 

Une montée de stress m'envahit. Je ne peux pas gérer ce qu'il sort de la bouche d'Ino et je suis morte de trouille à l'idée qu'elle fasse une gaffe. Comme mentionner ma sœur ou pire encore, m'appeller par mon prénom.

 

 Il est de garde, finit par répondre Sasuke après une courte pause. Tu n'as pas répondu à mon message, j'espère que ça n'a rien avoir avec hier soir...

 

 Oh, non ! Justement, j'ai un souci avec mon téléphone, commencé-je.

 

 Cette idiote a explosé son téléphone, rit mon amie.

 

— Ino !

 

— Quoi ? C'est vrai ! Et je te comprends, avec la mère que tu as, elle pourrait être reconnaissante au lieu de te faire des reproches, soupire mon amie.

 

 Ino n’embêtons pas Sasuke avec mes histoires de famille, hein ? Donc voilà, je suis sans téléphone jusqu'à demain, j'irais en acheter un.

 

— Je vois, me voilà donc rassuré, sourit-il. 

 

Il fouille dans sa poche et me tend un bout de papier avec quelques lignes d'écriture. Je le prends et comprends qu'il s'agit d'une carte de visite. La sienne.

 

 Écris-moi quand tu auras ton nouveau portable. Ah moins que tu ais Facebook peut-être.

 

Facebook ? Euh oui, euh non. Non ! 

 

— Non, rétorqué-je précipitamment. Désolé, je n'ai pas.

 

Dommage. Hum, Sakura ?

 

Je blêmis et me liquéfie sur place. Ai-je bien entendu ? Non, impossible. Je dois souffrir d'hallucinations, il ne peut pas avoir prononcé mon prénom. Il ne le connait même pas. 

 

— Pardon ? bégaye-je.

 

 C'est ce qui est écrit sur ta blouse, dit-il en la montrant du doigt.

 

— Oh, je l'ai emprunté à une collègue. La mienne est sale, un patient m'a vomi dessus ce matin, expliqué-je dans un rire nerveux. 

 

Instinctivement, je cache mon étiquette avec ma main. Je dois dégager d'ici, Ino semble perdue et je sens la gaffe arrivée à grand pas. 

 

— Je suis désolé, on doit vraiment y aller. Je suis contente de t'avoir revu, je t'écris dès que j'ai mon téléphone ! A plus !

 

Sur ce, je choppe Ino par le coude et la traîne pour qu'on s'éloigne. Nous entrons dans une chambre vide et je referme la porte derrière nous. Ino s'adosse à celle-ci et croise les bras avant de me toiser du regard. 

 

— Tu m'expliques ce qu'il vient de se passer, Sakura ? Car aux dernières nouvelles, c'est ton nom, non ? 

 

Je pousse un soupire et me laisse glisser le long du mur. 

 

— Je me suis mise dans une galère pas possible, si tu savais...

 

Et je commence à tout lui raconter. Ma rencontre avec Sasuke, mais aussi qui il est. L'ex petit ami de ma jumelle, celui qui conduisait la voiture le soir de l'accident. Mais aussi, le fait qu'il m'ait confondu et prise pour ma sœur. Que j'ai accepté de jouer le jeu et je me suis faite passer pour elle, et que bien sûr, il ignore tout de la condition d'Umé. Nos rendez-vous, nos échanges par téléphone. Et l'attachement que j'ai commencé à développer pour lui.

 

— Tu dois lui dire Sakura. Pour lui, mais aussi pour toi. Tu te fais passer pour ta sœur morte.

 

— Elle ne l'est pas, contré-je.

 

 Oh, on croirait entendre ta mère. Tu es de mauvaise foie là, Sakura.

 

 Je sais, soupiré-je. Je ne sais même pas comment lui dire, j'ai vraiment peur qu'il le prenne mal. Comment il va réagir en découvrant la vérité sur Umé ? Il la pense en pleine forme. Quand je l'ai rencontré, tu aurais dû voir son regard Ino. Il était comme vide, sans vie. Il portait un lourd poids sur ses épaules et vivait avec la culpabilité de sa mort jusqu'à notre rencontre. J'ai peur que la vérité lui fasse beaucoup de mal... Qu'il s'en veuille de l'état d'Umé... Ce n'est pas mon but.

 

— Ça, s'est son problème, Sakura. Et puis, c'est une erreur de jeunesse, il doit apprendre à vivre avec tout en se pardonnant. Je suis sûre que ta jumelle serait ravie que vous preniez soin l'un de l'autre. Elle vous aimait tous les deux et elle voudrait que vous soyez heureux. 

 

 Je ne sais même pas comment lui avouer... 

 

— Tu as toute la soirée pour trouver, sourit-elle. 

 

Je ne sais pas si cela va suffire pour trouver la solution. Au moins, je n'ai plus de téléphone jusqu'à demain et donc je n'aurais plus de contact avec Sasuke. Cela va me laisser le temps de réfléchir pour trouver les bons mots. Dois-je juste lui avouer sans lui dire l'état de santé d'Umé ? Cela me semble compliqué, il va certainement me demander ce qu'elle fait et je ne peux pas redémarrer notre relation sur de nouveaux mensonges. Dans quel pétrin je me suis fourrée !

 

 Mais ne t'inquiète pas, tu n'es pas la seule à mentir.

 

— Pardon ? m'exclamé-je perdue.

 

— Son ami ne travaille pas aujourd'hui, c'est impossible.

 

Je la dévisage surprise et attends impatiemment qu'elle poursuive.

 

— Le psychologue de garde aujourd'hui est une femme. 

 

J'ai eu des nouvelles d'Umé, ou plutôt devrais-je dire Sakura dès lundi soir. Cette dernière vient d'avoir son nouveau téléphone après avoir cassé l'ancien. Pourquoi ? Je n'ai pas trop saisi. Si j'en juge par les propos de sa collègue, elle aurait eu un accrochage avec sa mère et des reproches de cette dernière. A propos de quoi ? 

 

De moi ? Sait-elle qu'elle me fréquente ? 

 

En tout cas, je ne regrette pas de lui avoir rendu visite dimanche. J'ai inventé une visite à mon ami Naruto, dans le seul but d'espérer croiser Umé/Sakura. Je n'étais pas sûr de pouvoir la voir, mais le destin fait bien les choses, puisqu'elle était là malgré que cela soit son jour de repos.

 

Mais je n'imaginais pas une seule seconde, que j'allais avoir une confirmation à toutes mes questions. Quelle chance !

 

Il était inscrit quelque chose de très particulier sur l'étiquette accrochée à sa blouse. Le prénom "Sakura", écrit noir sur blanc. Elle a été décontenancé pendant quelques secondes avant de se reprendre en trouvant une excuse. Elle a prétexté l'avoir emprunté à une collègue et j'aurais pu la croire, si je n'avais pas déjà des soupçons sur son identité. J'aurais gobé son mensonge, s'il y avait d'écrit tout autre prénom à part Sakura sur son badge. Cela n'a fait que m’indiquer que j'avais raison et que mes doutes étaient fondés. J'étais maintenant sûr que ce n'était pas à Umé que j'avais a faire depuis le début, mais à sa sœur jumelle. Ce scénario que je pensais fou et tiré par les cheveux, est on ne peut plus réel. 

 

Je sais désormais que je ne me faisais pas d'idée et que je n'avais pas perdu la tête. Maintenant, une tonne de questions me brûle les lèvres, mais je dois attendre avant d'avoir les réponses. C'est drôle, mais depuis notre rencontre, j'ai l'impression de passer mon temps à patienter.

 

Bon sang, pourquoi ? Pourquoi as-tu fait ça Sakura ? Pourquoi as-tu endossé l'identité de ta sœur ? Quel est le but de cette supercherie ? Qu'est-ce que cela t'as apporté ? Pourquoi, putain !

 

A-t-elle eu un coup de foudre en me rencontrant ? Après tout, je les fais toutes tomber avec mon charme irrésistible !

 

Hum, soyons sérieux deux secondes. Honnêtement, je ne pense pas que ça soit le cas. Si je me souviens bien de notre première rencontre, elle n'avait pas l'air du tout enchantée de me voir. Bien au contraire... Son regard était glacial, ça, j'en suis sûr. A-t-elle voulu me jouer un mauvais tour ? Une blague de jumelle ?

 

Hum... Non. Je ne pense pas. Je ne peux pas dire que je la connait bien, mais je pense savoir cerner les gens.Si j'en juge nos échanges et nos rencontres, il ne s'agit pas d'une vulgaire plaisanterie en se faisant passer par sa sœur. Il y a autre chose, c'est certain. Mais quoi ?

 

Pourquoi Sakura ? Pourquoi te fais-tu passer pour Umé ? Quel est ton but ? Quel est l'intérêt ? Qu'as-tu à gagner dans cette histoire ? J'ai tellement de questions à lui poser, mais cela devra malheureusement attendre. J'ai dit que je ne la brusquerais pas, alors elle me dira tout quand elle sera prête. Enfin, je l'espère.

 

Je relis une nouvelle fois son message avant de répondre.

 

"Salut, j'ai mon nouveau téléphone. Je vais enfin pouvoir me poser dans le canapé après cette rude journée."

 

Sa banquette.... Des images salaces me reviennent en tête. Je revois son corps, penché en avant, subissant mes assauts. Malheureusement, la suite, on la connaît... 

 

Je suis un peu déçu qu'elle ne propose pas qu'on se voit, cette fille est née pour me faire languir je crois. Je décide de prendre les devant. Comme Marseille, je vais droit au but.

 

"On se voit quand ?"

 

Ah oui, je n'y vais pas par quatre-chemins. A quoi bon ? Je meurs d'envie de la voir, d'être à ses côtés, d'entendre le doux son de sa voix. J'aime quand elle me regarde de ces yeux émeraude, ou quand elle ouvre la bouche pour prononcer mon prénom. Au début, cela sonnait bizarre lorsqu'elle le prononçait, mais maintenant, ça me plait beaucoup. Quand elle replace délicatement ses cheveux derrière son oreille, je trouve ça trop craquant. Son sourire aussi, qui est magnifique. J'ai l'impression qu'il illumine la pièce. Elle est mon petit soleil rose bonbon.

 

Bordel, écoutez-moi parler. J'ai l'air d'un amoureux transit, un neuneu. Il manquerait plus que j'écrive Sasuke + Sakura, entouré d'un cœur sur un post-it. Il faut que je me retienne un peu là...

 

Amour ... Je crois que je suis dans la merde... Comment je vais m'en sortir dans cette histoire ? Je suis en train de me lancer dans un sacré bourbier. J'imagine plus tard, quand nos enfants nous demanderons comment nous nous sommes rencontrés.

 

Rien que d'y penser, j'en ai mal au crâne. Je crois qu'on zappera le problème d'identité. Papa et maman se sont rencontrés lors d'un soir d'hiver, quelques jours avant Noel. La neige tombait et recouvrait doucement le paysage de son beau manteau blanc. Soudan, Maman est tombée devant papa qui était assit sur un banc avec tonton. Elle a ramassé ses affaires et elle est partie en oubliant son téléphone. Papa, en grand gentleman, l'a poursuivi pour lui rendre. Il lui a attrapé le poignet et l'a forcée à se retourner. Et la papa et maman ont eu le coup de foudre et sont tombés amoureux.

 

C'est bon, hein ? C'est un beau résumé, grosso modo, c'est ce qui s'est passé. 

 

Bordel ! A quoi je suis en train de penser moi ! Reprends toi Sasuke, t'es loin d'en être aux enfants. Je te rappelle que tu as foiré l'étape de la procréation l'autre soir. Les gosses, ça ne sera pas tout de suite.

 

Déjà, dans un premier temps, je dois éclaircir l'identité de cette mystérieuse maman. Umé ou Sakura ? Mon instinct me cri la deuxième.

 

D'ailleurs sa réponse ne tarde pas.

 

"Je te manque déjà ?"

 

Oui. Mais si je luis dit, elle va plus se sentir et je serais un pioupiou qui lui picore dans la main. Non, je vais la laisser un peu maronner. 

 

"Peut-être"

 

Voilà, quelque chose de mystérieux comme ça. Un peu énigmatique. 

 

"Je sais que tu mens ! Je te manque tellement que tu viens me voir au travail. Tu es trop mignon Sasuke ! "

 

Aie. Coup dur. Mignon et Sasuke dans la même phrase. Sérieux ? Ce n'est pas du tout un compliment pour un mec ! Viril, beau gosse, charismatique, séduisant, élégant. TOUT mais pas mignon. Mon égo en à pris un coup là.

 

" Je voulais consulter pour être sur de ne pas avoir de séquelle à l'entre-jambe. Une étourdie me les a congelée ce week-end."

 

" Oh, quelle cruche !"

 

"Je te le fais pas dire. Je pensais qu'elle se ferait pardonner en me refaisant un petit plat maison...."

 

"Malin et rusé, ce cher Sasuke".

 

Ah, voilà. J'aime ce genre de compliment.

 

"Comme un renard ! Alors, ce plat ?"

 

"Demain soir, 19h30. Ne sois pas en retard, nous avons rendez-vous avec la suite de Titanic".

 

"Encore cette pédale de Dicaprio ?"

 

"C'est ça ou Harry Potter. Tu choisis.

 

"Ouais, c'est full tapette blonde quoi. Dur."

 

"Respecte ce cher Jack Dawson et Drago Malefoy, où tu ne rentreras pas dans mon appartement. Tu as quoi contre les blonds toi ?"

 

"Rien, j'ai hâte de continuer notre film !"

 

 

Nous continuons à parler de tout et de rien. Je lui raconte ma journée et elle, la sienne. Je passe ma soirée devant un épisode de Game of thrones tout en envoyant des messages. Je souris en imaginant la soirée de demain, le simple fait de passer du temps avec elle me rend heureux. Cela fait longtemps que je n'attendais plus rien de la vie, jusqu'à cette fameuse rencontre. Aujourd'hui, j'ai l'impression de revivre. Elle est ce petit rayon de soleil qui avait disparu et je remercie le destin de l'avoir mise sur ma route. 

 

Une semaine s'est écoulée et je n'ai toujours pas craché le morceau. Nous nous sommes vu deux soirs avec Sasuke. Il est venu manger à l'appartement. Il n'y a pas eu de contact physique, il n'a rien tenté et j'ai fait très attention à ne pas me vautrer sur lui cette fois-ci. Je veux régler cette histoire avant d'aller plus loin. Je veux qu'il sache qui je suis, mais je n'arrive pas à lui avouer. Pourtant, je suis pleine de volonté ! Je suis remontée à bloc, mais une fois qu'il franchit le pas de la porte, mon courage s'évapore. Je me dégonfle. Je ne trouve pas les mots et je ne sais pas par où commencer. 

 

Peut-être devrais-je écrire une lettre ? Mouais, ça fait quand même légèrement méthode de lâche. Le mieux serait quand même que je prenne le taureau par les cornes et que je fonce. Je suis signe astrologique bélier, ça devrait le faire non ? 

 

Je me suis foutue dans cette galère toute seule. Qu'elle idée j'ai eu de me faire passer pour Umé. Non. Ce n'est pas ça. Ce n'est pas ici que j'ai merdé. Le ciel m'est tombé sur la tête pour que je tombe sous le charme de Sasuke. Ce n'était absolument pas prévu au plan initial. 

 

De toute façon depuis quand mes plans marchent ? J'ai toujours été nulle pour faire des choix et prendre des décisions. Y a qu'à voir la situation avec ma sœur... Je sais que ce n'est pas bien que je m'occupe moi-même d'elle, je devrais la laisser à une collègue, mais je ne peux pas. Et puis, j'ai ma mère sur le dos, n'oublions pas. 

 

Je pousse un soupire et sort de la douche. Il faut que j'arrête de refaire le monde sous l'eau, sinon la prochaine facture va faire mal au cul. J'enfile un chemisier blanc et un jeans avant de brosser ma chevelure. Je suis en repos aujourd'hui et Sasuke doit passer dans...

 

  17h20 ?! m'exclamé-je en regardant mon téléphone. 

 

Merde ! Il va arriver d'une minute à l'autre et je n'ai pas eu le temps de ranger l'appartement. Enfin si, j'aurais largement pu, mais j'ai préféré jouer à Final Fantasy. Oui, je choisis mal mes priorités, mais ce n'est pas nouveau. Je l'ai dit, je prends toujours les mauvaises décisions. Je cours au salon mettre un peu d'ordre et embarque les nombreux emballages de gâteaux qui traînent sur le canapé. Bordel, j'ai autant mangé que ça ?! Faut que j'arrête de grignoter n'importe quoi ! 

 

Mon regard se pose sur mon ficus, qui ne semble pas super en forme. Mince, quand est-ce que je l'ai arrosé la dernière fois ? Hum, aller, je vais lui verser une cruche d'eau. Je me précipite vers la cuisine pour remplir le récipient et me dirige vers le salon. 

 

Tout se passe si vite. Le torchon oublié au sol, mon pied, une perte d'équilibre et une Sakura vautrée par terre. La carafe s'écrase sur le carrelage et se brise en déversant l'eau. J'hésite entre hurler et pleurer.

 

—  Putain de merde ! grogné-je.

 

La sonnerie de l'appartement retenti. Je pousse un long soupir et pose le front contre le sol mouillé. Le pire timing du monde.

 

   Hello ? appelle Sasuke derrière la porte.

 

 — Entre. C'est ouvert, crié-je en me redressant. 

 

Sasuke apparaît. Son regard surpris se pose sur moi, assise sur le sol, entourée d'eau et de débris de verre. 

 

 — J'ai eu un petit soucis, comme tu peux le voir...

 

 — Faut que tu arrêtes avec les cruches Sa.. ça ne te réussis pas, dit-il en s'approchant.

 

Il s'accroupit à mes côtés et attrape un morceau.

 

 — Ne touche pas, je vais ramasser ça tout de suite, dis-je en lui prenant le verre de la main.

 

Aie ! Mais ce n'est pas possible, on m'a maudite ou quoi ? Je n'en loupe pas une ! J'ai la vague impression d'avoir la poisse depuis ces dernières semaines. Je soupire intérieurement en portant à mon index blessé à la bouche. 

 

 — Va t’asseoir sur la banquette, je m'en occupe avant que tu te tues, se moque-t-il gentiment. 

 

 

Quelques minutes plus tard, il n'y a plus aucune trace de ma mésaventure. Je suis sur le canapé lorsque Sasuke me rejoint. Il prend place à mes côtés et m'ébouriffe le dessus du crâne.

 

— Me décoiffe pas ! protesté-je en lui attrapant la main.

 

— C'est vrai, tu t'étais faite belle pour moi, sourit-il. 

 

— N'importe quoi ! Je vais aller mettre un jogging, alors, dis-je en me relevant.

 

— Non, tu es très bien comme ça, proteste-t-il.

 

Il m'attrape le poignet et me force à me rasseoir. Il ne me lâche pas, même une fois mon tendre fessier poser sur le sofa. Son regard ténébreux me scrute attentivement. Je donnerais cher pour savoir ce qu'il pense en ce moment. Mes yeux émeraude sont hypnotisés par les siens, je n'arrive pas à couper le contact visuel. 

 

J'ai envie de regarder sa bouche, mais je me retiens. J'aurais peur de craquer. J'ai pris des résolutions et je dois m'y tenir. Avouer la vérité et après, on s’envoie en l'air et je grimpe au rideau. Lui ne se prive pas, je vois et sens son regard se poser sur mes lèvres. Instinctivement, je les humidifie en passant délicatement ma langue dessus avant de me mordre la lèvre inférieure.

 

Je perçois la main libre de Sasuke bouger doucement. Je ne sais pas ce qu'il fait ou ce qu'il se prépare à faire. Va-t-il m'attraper le cou et m'embrasser langoureusement ? 

 

Soudain, sans que je m'y attende, je reçois un coussin en pleine figure. Je cligne des yeux, surprise.

 

 Non, mais ça va pas ? râlé-je en lui renvoyant.

 

 Tu.... tu avais un moustique sur le nez et je déteste ces bestioles là, se justifie-t-il.

 

Il ne croit quand même pas que je vais gober son excuse à deux balles ? Pourquoi n'avoue-t-il pas qu'il est juste trop déstabilisé par sex-appeal et ma sensualité.

 

— Tu pouvais pas l'enlever plus délicatement ? lui dis-je en lui pinçant la cuisse.

 

— Fais gaffe... Tu sais ce qu'on dit ? 

 

 Non, quoi ? demandé-je.

 

— Jeux de main, jeux de vilain, prévient-il.

 

Il approche lentement son visage du mien. Ses yeux sombres sont ancrés dans les miens, il ne détourne pas le regard. Sa bouche vient frôler délicatement mes lèvres. Ce simple contact, de quelques secondes vient titiller mes sens et mes émotions. J'ai envie de le toucher, de le sentir et de l'entendre gémir. J’éprouve en ce moment énormément de désir, mon entre-jambe ne cesse de se contracter. Mon vagin me crie de lui déboutonner le pantalon et de le débrailler pour m'empaler sur son membre dur, au contraire de mon cerveau. Ce dernier m'ordonne de rester sage et de ne pas gâcher mes récents efforts. Je dois résister à la tentation. Je ne dois pas céder.

 

Si on pouvait me venir en aide, la maintenant tout de suite. Les lèvres de Sasuke effleurent une nouvelle fois les miennes. Oh mon Dieu, sortez-moi de ce pétrin, maintenant ou je vais faire une grosse bêtise. Que je vais regretter juste après.

 

Et Dieu m'entendu. Un bruit soudain nous fait sursauter. Je m'écarte brusquement et reprends mes esprits. Le coup retenti à nouveau. Mon cerveau met quelques instants à comprendre de quoi il s'agit. 

 

La porte ! Quelqu'un toque à la porte de mon appartement. Mais... qui ? Je n'attends personne. Dieu se serait-il déplacé en personne pour me sauver les fesses.. euh le vagin ?

 

Sasuke m'interroge du regard. Pour toute réponse, je hausse les épaules. Je suis pas devin moi et je n'attends personne. Il était mon seul invité, je ne donne pas encore dans les plans à trois à ce que je sache.

 

Nouveau toc. Bon, la porte ne va visiblement pas s'ouvrir toute seule. 

 

— J'arrive, crié-je.

 

Je me lève du canapé et me dirige d'un pas rapide vers l'entrée. J'ouvre et referme instinctivement la porte au nez de la personne. Et merde ! Qu'est-ce qu'elle fout là ?! Elle ne vient jamais me rendre visite alors pourquoi se pointe-telle précisément à ce moment ? Sasuke ! Et merde ! Va-t-elle le reconnaître après toutes ses années ? Je ne peux pas prendre le risque de les faire se retrouver.

 

La galère... Je sens une bouffée de chaleur m'envahir et la crise de nerf se profiler à l’horizon. 

 

—  Sak..

 

—  Oui, maman ! la coupé-je avant qu'elle ne finisse son mot. 

 

—  Tu me ferme la porte au nez maintenant ? me gronde-t-elle. Et ne lève pas les yeux au ciel, je ne t'ai pas éduqué comme ça petite ingrate ! 

 

Elle m'assène un coup de sac à main dans le bras. Je ne dis rien, inutile de se donner en spectacle devant mon invité.

 

—  J'ai quelqu'un là, c'est pas le moment... Je pourrais t'appeler ce soir, non ?

 

—  Je croyais que ton petit ami t'avais largué ? dit-elle en arquant un sourcil.

 

Je lève les yeux aux ciel. Ça y est, elle m'agace. Cela fait même pas deux minutes qu'elle est là, et elle m'énerve déjà. Ma main me démange affreusement. J'ai envie de fermer cette putain de porte et de ne plus voir sa tête, mais je ne le fais pas. Je suis la gentille fille. La pauvre qui dit oui à tout et qui n'ouvre jamais sa bouche. Évitons tout conflits...

 

—  Ça va, de toute façon je ne l'aimais pas. C'était tout récent.

 

—  Le médecin m'a appelée aujourd'hui. Il veut nous rencontrer demain. Qu'est-ce que tu as été lui dire ? hurle-t-elle. 

 

 Qu'il était temps que tout s'arrête et il n'est pas contre. Il faut prendre parfois des décisions difficiles dans la vie maman.

 

—  Tais-toi ! Petite sotte ! rugit-elle en me donnant un nouveau coup de sac à main. On ne peut vraiment pas compter sur toi ! C'est ta sœur, comment oses-tu lui faire ça ?! Tu n'as vraiment pas de cœur !

 

S'en est trop. Les larmes que je retenais, coulent maintenant le long de mes joues. Après tout ce que je fais pour sa précieuse fille, comment ose-t-elle me dire qu'on ne peux pas compter sur moi. Je donne passe mon temps, tous les jours à m'occuper de ma sœur. Pas un jour de repos.

 

Pourquoi ? Pourquoi faut-il toujours qu'elle me crie après. Je n'en fais jamais assez, ce n'est jamais assez bien. Je n'y suis pour rien moi si Umé a eu son accident. Alors pourquoi est-ce toujours à moi qu'elle s'en prend ? Au cas où elle ne le saurait pas, elle n'a pas le monopole de la souffrance ! 

 

J'ai honte. Mon appartement n'est pas très grand et ma mère parle tellement fort que Sasuke doit tout entendre depuis le salon. 

 

—  Arrête maman, soufflé-je d'un ton lâche.

 

Elle m'attrape les épaules et me secoue violemment. Je me faire telle une poupée de chiffon.

 

—  Pourquoi ce n'est pas toi ?! hurle-t-elle.

 

J'écarquille les yeux, stupéfaite. Je le savais au fond de moi, mais l'entendre, c'est autre chose. Elle ne l'avait jamais dit jusqu'à aujourd'hui, mais je m'en doutais. Umé était complexée par rapport à moi, parce que j'étais plus mince, j'avais plus d'amis etc.. Mais elle a toujours été la préférée dans le cœur de notre mère. Cette dernière n'avait d'yeux que pour ma sœur. Je l'ai toujours enviée en secret. J'aurais aimé avoir ne serais-je que la moitié de sa considération et de son attention.

 

Je peux comprendre qu'Umé était la numéro un pour maman, mais de là a vouloir que nos rôles soit inversés. Elle aurait aimé que ça soit moi qui ai eu l'accident et qui sois allongée aujourd'hui dans le lit blanc de l’hôpital. Mais comment peut-elle l'avouer ouvertement en face de moi ? Me cracher son venin en pleine figure comme si de rien n'était ? Ne se rend-elle pas compte de la portée de ses mots ? Pourquoi ne se réjouie-t-elle pas plutôt de savoir qui lui reste une fille. Je suis là, vivante. Mon cœur ne bat pas grâce à une machine, je respire à plein poumon, je parle, je ris, je pleure. Je suis en vie, tout simplement. Mais ça, elle n'en a rien à faire. Elle ne voit que sa tendre Umé allongée inerte depuis dix ans. Moi je ne suis bonne qu'à prendre soin de ma jumelle. Je ne suis que son infirmière personnelle et attitrée.

 

Je suis triste, dévastée. J'ai le cœur en miette. Elle vient de le jeter au sol et de le piétiner sans ménagement. Mais bientôt, un autre sentiment vient s'ajouter.

 

La colère.

 

Et elle monte rapidement.

 

Pourquoi est-ce que je dois subir tout ça ? Pourquoi MOI, j'ai une mère comme ça ? Égoïste, nombriliste, méchante, colérique, impulsive et j'en passe. Une chose est sûre, je ne tiens pas d'elle. Je n'ai rien en commun avec elle, si ce n'est l'amour pour ma sœur et mon père. D'ailleurs, je me demande comment ce dernier la supporte encore. Elle est devenue invivable. Toute sa vie ne tourne qu'autour d'elle et Umé.

 

Je laisse éclater ma colère et me dégage violemment dans son étreinte.

 

— Tu es la pire mère qu'on puisse avoir ! Je te déteste ! craché-je. Tu ne penses qu'à ta petite personne, si tu refuses de prendre la décision, ce n'est pas pour elle, mais pour toi ! C'est un choix que tu fais par pur égoïsme !

 

—  Espèce de sale petite ingrate ! Après tout ce que j'ai fait pour toi ? rétorque-t-elle sèchement.

 

Elle lève sa main et s’apprête à me gifler de toutes ses forces. Je ferme les yeux et me crispe en attendant le coup, qui n'arrive jamais. J'ouvre d'abord un œil, puis deux, avant de les écarquiller. Je fixe stupéfaite le dos de Sasuke, planté devant moi, entre ma mère et moi. 

Il lui tient fermement le poignet. 

 

Elle semble surprise par cette interruption inopinée. 

 

 Que ... qui êtes-vous ? De quoi vous mêlez-vous ? s'offusque-t-elle.

 

 Vous devriez-vous calmer. Je voulais intervenir plutôt, mais ce n'était pas mes affaires. J'avais peur que ça dérape et je surveillais silencieusement de derrière la porte. Je n'avais pas l'intention de m'immiscer, mais quand j'ai vu que vous leviez la main sur votre fille pour la gifler, je n'ai pas pu m’empêcher de m'interposer. Vous deviez avoir honte de parler ainsi à votre propre enfant, accuse-t-il.

 

 Ne vous mêlez pas de ça ! rétorque-elle en essayant de se dégager en vain.

 

 Maman arrête... supplié-je.

 

 Vous n'avez pas de leçon à me donner sur mon éducation avec ma fille, rétorque-t-elle. Mais... Attendez, je vous ai déjà vu...

 

 Sakura, rentre à l'intérieur, ordonne-t-il.

 

— Oui, répondé-je machinalement.

 

Je fais un pas en arrière avant de me figer sur place. Minute. Sakura ? Comment ? Ais-je bien entendu ? Ce n'est pas possible, mes oreilles me jouent des tours. Il ne peut pas m'avoir appelé par mon vrai prénom. Ça ne se peut pas...

 

Je fixe stupéfaite le dos de Sasuke. Que sait-il exactement ? Depuis quand ?

 

 Oh ! s'exclame ma mère en se couvrant la bouche. Vous êtes... Oh mon dieu ! 

 

 Sakura, rentre à l'intérieur, répète-t-il en se retournant. Je m'occupe de ta mère.

 

Ses yeux marrons croisent les miens qui sont toujours grands ouverts par le choc. Son regard est doux et chaleureux. Il esquisse un faible sourire. 

 

 Sakura ! hurle-t-elle. C'est quoi ces histoires ! Qu'est-ce que tu fous avec lui ? Qu'est-ce qu'il fait chez toi ? Comment oses-tu !! hurle-t-elle à plein poumons. Après ce qu'il a fait à ta sœur, à notre famille ! Sale petite traînée !

 

 Madame un mot de plus et je vais vraiment me mettre en colère, menace Sasuke. 

 

 Et tu vas faire quoi ? Me tuer comme tu as tué ma fille ? Assassin, explose-t-elle en lui donnant un coup de sac à main.

 

Je vois Sasuke se figer et se tendre sur place. Il est livide. Ses forces semblent le quitter, il a lâché le poignet de ma mère qu'il tenait fermement il y a encore quelques secondes. Oh non, tout, mais pas ça ! Il ne mérite pas de l'apprendre comme ça, pas de cette façon. Et encore moins de la bouche de cette langue de vipère.

 

Je me précipite devant Sasuke comme pour faire rempart et le protéger à mon tour. Je lance un regard noir à la femme devant moi et l'attrape par le coude. 

 

— Ça suffit ! Dégage de mon immeuble et rentre chez toi ! 

 

Je la tire dans les escaliers un peu plus bas et la pousse gentiment pour qu'elle continue à descendre les marches d'elle-même. Je remonte sur mon pallier et rejoint Sasuke qui n'a pas bougé d'un pouce. Le regard dans le vide, il ne semble pas s’apercevoir de ma présence. Je lui attrape délicatement le coude, ce qui le fait sursauter. Ses yeux croisent enfin les miens. Il n'y a plus de douceur ni de chaleur, mais de l’incompréhension et de la peur. Je soupire intérieurement avant de le traîner à l'intérieur de l’appartement. Je referme la porte derrière nous et tourne la clef dans la serrure, au cas où ma mère reviendrait à la charge. Cette fois elle trouvera porte close.

 

 On devrait parler. Je crois qu'on a des choses à se dire, dis-je à voix basse. 

 

Sasuke hoche la tête et se dirige vers le salon, où il prend place. Je m'assois à ses côtés et reste silencieuse le temps de trouver les mots.

 

 Elle est morte ? 

 

— Pardon ? 

 

 Umé ? Elle est morte, c'est ça ? C'est ce qu'a dit ta mère, que je l'avais tué. Est-ce que c'est vrai ? me demande-t-il.

 

Son regard et son visage me brisent le cœur. En ce moment, il souffre de tout son être. L'espoir que je lui avais donné, s'est envolé et il se retrouve à nouveau avec la culpabilité sur ses épaules. 

 

 Ecoute, c'est plus compliqué que ça... On devrait commencer par le début. Apparemment, tu sais déjà qui je suis, depuis quand ?

 

Pour la première fois depuis que nous sommes rentrés, il me regarde vraiment. Ses yeux ne sont plus perdus dans le vide. Il me fixe pendant quelques secondes avant de détourner le regard. Il pousse un soupir et se penche en avant. Il pose ses avant-bras sur ses cuisses et joint les mains devant lui. 

 

 Depuis le jour où tu m'as gelé l'entre-jambe. Je suis allée chez Naruto après t'avoir quitté, nous avons parler et geeker ensemble. Puis je suis resté dormir chez lui le soir. Je n'arrivais pas à dormir, je pensais à toi. Alors il m'est venu une idée. Je t'ai, non, j'ai cherché Umé sur Facebook, mais tu te doutes bien que je ne l'ai pas trouvé. Mais je n'ai pas fats chou blanc, un autre profil à attiré mon attention. Le tien. J'ai été stupéfait de voir une personne ressemblant trait pour trait à mon ancienne copine. Je savais qu'elle avait une sœur, mais j'étais loin de me douter que c'était une jumelle... J'avais sous les yeux le profil de Sakura Haruno. Ton profil, dit-il en se redressant pour plonger son regard dans le mien. Par curiosité, je suis allée dessus et j'ai été interpellé de voir dans les informations que cette fille, qu'elle travaillait comme infirmière à la clinique "La ligne bleue". Il était impossible que vous exerciez le même métier dans le même établissement. J'ai épluché la page plus en détail et j'ai compris, que ce profil n'était pas un fake et qu'il appartenait à la jumelle d'Umé. Je ne t'ai rien dit et ne t'ai pas demandé d'explication parce que j'ai pensé que tu devais avoir une bonne raison pour avoir pris l’identité de ta sœur. J'avais décidé d'attendre que tu sois prête à m'en parler...

 

Merde, j'avais été trahi par mon propre Facebook. Pendant que je me triturais les méninges pour trouver une façon de lui avouer la vérité, lui était déjà au courant de mon identité. Je suis touchée qu'il ait décidé de me laisser le temps de lui expliquer moi-même, il ne m'en a pas voulu et ne s'est pas mit en colère. Je suis soulagée maintenant qu'il sait mon identité. Ce n'était pas ce que j'appréhendais le plus, non, ce que je redoute, c'est surtout la suite. Comment vais-je lui dire pour Umé et comment va-t-il le prendre ?

 

— Tu ne m'en as pas voulu ? demandé-je malgré tout.

 

 Non. Après tout, c'est moi qui t'ai couru après et t'ai pris pour Umé. Je suis celui qui a insisté pour qu'on se revoie. Je suis désolé, ça a dû te mettre mal à l'aise...

 

 Avant de parler de ma sœur, je voudrais t'expliquer pourquoi et comment je me suis retrouvé dans cette situation. Je ne m'attendais absolument pas à tomber sur toi, ce jour-là. Et aucun n'autre jour d'ailleurs. J'ai été choquée d’entendre le prénom de ma sœur sortir de ta bouche et encore plus que tu me prennes pour elle. Enfin, en y réfléchissant, c'est pas étonnant, nous sommes des sosies. Sur le moment, j'ai été prise au dépourvu et je ne savais pas comment réagir. Des émotions négatives que j'ai ressentis par le passé sont remonté à la surface lorsque je me suis retrouvé en face de toi. Mais j'étais dérouté par ton discours. Tu semblais tellement soulagé de croire que  tu avais Umé devant toi et tu te trompais sur de nombreux points concernant ma sœur. J'ai hésité à accepter ta demande de se revoir... Et puis finalement, je me suis dit que j'allais pouvoir savoir qu'elle genre de personne tu étais devenu. Étais-tu toujours de gamin fêtard et immature qui avait blessée gravement Umé ? Tu m'as d'abord surprise en m'annonçant que tu étais médecin. Je n'ai pas pu m'empêcher de penser que finalement nous n'étions pas si différents l'un de l'autre. Ma sœur a beaucoup impacté nos vies et nos choix... C'est pour elle que je suis devenue infirmière. 

 

 Qu'est-elle devenue ? Etait-elle ... morte ? finit-il par dire difficilement.

 

 Non, pas vraiment... Mais elle n'est plus elle même depuis l'accident. Je pense que le mieux serait que tu la voit... 

 

 Je peux ? demande-t-il.

 

— Oui, mais il faut que tu saches que ça ne serai pas facile... Par contre, tu dois savoir que même si j'ai pris l’identité d'Umé, je ne t'ai jamais menti. Tout ce que je t'ai dit sur moi, comme le fait que je sois végétarienne était vrai. Et lorsque tu parlais de l'accident ou des souvenir avec ma sœur, si je te demandais de te taire, c'est parce que c'était douloureux. Mais également parce que ça me m'étais mal à l'aise.

 

 J'ai compris pourquoi tu me semblais si différente du passé. Tu n'étais pas celle que je pensais.... Tu sais, tu aurais dû me mettre une claque dans la figure et me dire qui tu étais, ça aurait été plus simple.

 

— Je peux peut-être le faire maintenant si tu insistes. 

 

 Trop tard, y a prescription maintenant, sourit-il. Dis, ta mère a toujours été comme ça ? 

 

A l'évocation de ma génitrice, je me crispe. Ses paroles dures et cruelles me reviennent en mémoire. Je me concentre pour ne pas craquer devant Sasuke et éclater en sanglots.

 

 Umé a toujours été sa préféré, elle ne voyait qu'elle, mais elle n'était pas aussi méchante avec moi à l'époque. Elle a changé suite à l'accident. Tu l'as entendu, elle aurait préférée que ça soit moi, chuchoté-je en baissant les yeux.

 

 Elle n'aurait jamais dû dire ça ! Tu mérites de vivre ta vie et d'en profiter comme tu l'entends. J'ai appris à te connaitre par de drôle de circonstances, mais je peux dire que tu es une bonne personne. 

 

 C'est gentil, dis-je en esquissant un sourire. Tu ne regrettes pas que je ne sois pas Umé ?

 

Il garde le silence un instant, il semble réfléchir avant de prendre la parole. Ma respiration et les battements de mon cœur s'accélèrent. Je me suis toujours demandé s'il n'aurait pas préféré partager ses moments avec ma sœur plutôt qu'avec moi. Après tout, elle est son ancienne petite amie et il l'aimait.

 

— Non, répond-il calmement. J'étais amoureux d'elle, oui, mais depuis mes sentiments ont changés. J'étais content quand j'ai pensé qu'elle était en vie, car je vivais avec un énorme poids sur la conscience. C'est dur de savoir qu'on a pris la vie d'une personne, encore plus lorsque c'est quelqu'un à qui l'on tenait. S'en était devenu une obsession. Cette culpabilité qui nous ronge, jour après jour, sans jamais nous laisser de répit. Je voulais savoir ce qu'Umé était devenue et lorsque je t'ai vu, j'ai ressentis un grand soulagement. C'était beau de me dire que je retombais sur le charme de mon premier amour, mais en même temps, tout était si différent. J'avais l'impression de vivre beaucoup de première fois avec toi et je comprends mieux pourquoi. Mon prénom ne sonnait pas pareil dans sa bouche et dans la sienne. Au début, ça me paraissait bizarre, mais aujourd'hui, ça me parait normal. Je ne me suis pas attaché à toi parce que je pensais que tu étais Umé. Si j'ai voulu qu'on se revoir et passer du temps ensemble encore et encore, c'est parce que c'était toi. C'était avec la personne que j'avais sous les yeux que je voulais être. Tu étais différente d'Umé par bien des aspects et ça me plaisait beaucoup. Enfin, ça me plait beaucoup. Qu'importe ton nom, c'est ta personne qui m'a séduit. Ton vomi sur mes chaussures, ta cruche d'eau sur mes grosses couilles

 

 Stop ! protesté-je en lui couvrant la bouche de mes mains. Tu n'es pas obligé de me rappeler ses épisodes. Notamment, le premier. J'essaie d'oublier ces humiliations et tu ne m'y aide pas !

 

— Ça fait de bons souvenirs, je trouve.

 

 Même si je fais ma timide et ne le montre pas, son discours m'a beaucoup touché. Il a trouvé les mots justes et a été très honnête. Je suis rassurée et j'ai envie d'apprendre à le connaitre encore d'avantage. 

 

—  Et toi ? demande-t-il.

 

—  Euh... Et bien, je partais avec beaucoup d'a priori. Comme tu t'en doutes, je n'avais pas une très belle image de toi et je t'en ai voulu pendant des années. Avant de me dire que ma sœur avait aussi sa part de responsabilité, en montant dans cette voiture sachant ton état. Néanmoins, j'étais méfiante lors de notre premier rendez-vous. Et puis, j'ai appris à te connaitre. J'ai découvert un Sasuke que je ne soupçonnais pas l'existence. Un médecin généraliste, maladroit dans ses paroles qui essayait de faire de son mieux et racheté son erreur de jeunesse. Tu ne m'as pas laissé et ne t'ais pas fâché lorsque j'ai ... vomis sur tes chaussures et tu m'as même ramené chez moi. Même si tu pensais que c'était Umé à ce moment, je suis sûre que tu m'aurais raccompagné si j'avais été une fille lambda. J'ai pu voir que tu étais quelqu'un de gentil sous tes airs grognons. J'ai passé de très bon moments avec toi et crois-moi que ce ... mensonge sur mon identité me pesais de plus en plus. Je ne voulais pas continuer à être Umé, mais simplement que tu me connaisses en tant que Sakura. Je ne supportais plus entendre son prénom sortir de ta bouche lorsque tu t'adressais à moi. J'avais envie de te crier que tu te trompais et qu'il y avait erreur sur la personne, mais je n'arrivais pas. Je ne savais pas comment t'annoncer la chose. J'avais peur. Peur que tu le prennes mal et que tu m'en veuilles, mais aussi ... soufflé-je en faisant une courte pause.

 

J'hésite... Le problème, c'est que j'ai commencé et qu'il est difficile de faire marche arrière maintenant. Je m'apprête à aborder la partie la plus sensible de l'histoire. Notre lien, le point en commun que nous avons qui nous a permis de nous connaitre. Je me lève et me dirige vers mon sac à main. J'attrape mon porte-monnaie avant de revenir m’asseoir aux côtés de Sasuke. Ce dernier m'observe attentivement, il doit se demander ce que je suis en train de faire. Je prends une grande inspiration et l'ouvre pour y extirper un bout de papier que je lui tends. Il me fixe un instant et s'en empare. Il se crispe et me lance un regard surpris. Il doit s'interroger sur le pourquoi du comment je possède cette chose dans mon porte-feuille.

 

—  C'est une photo de toi et Umé. Enfin, ça tu le sais. Je l'ai trouvé quelques mois après l'accident lorsque je suis tombée par hasard sur son journal intime. Elle y avait glissé cette photo de vous deux. J'ai fondu en larmes, dis-je d'une voix basse. Le sourire qu'elle affiche, c'était la première fois que je la voyais aussi heureuse avec une autre personne que moi. Elle était éblouissante. C'était dur de se dire que je ne la verrais plus comme ça.

 

Une larme que j'essaye de contenir s'échappe et coule le long de ma joue. Je l'essuie d'un revers de la main. Je sais que c'est aussi dur pour moi que pour lui. Et contrairement à moi, lui porte le point de la culpabilité.

 

—  C'est vrai qu'elle est jolie cette photo. Mais je suis étonné que tu m'ais pas gribouillé ou brûlé, ironise Sasuke.

 

—  Honnêtement, j'ai longtemps hésité, ris-je. Mais... Je ne voulais pas abîmer la précieuse photo de ma sœur, dis-je en reprenant mon sérieux. C'est d'ailleurs ce jour-là où j'ai enfin pu mettre un visage sur ton nom. D'ailleurs, je te la rends, elle est à toi. Je n'ai aucun droit de la garder.

 

—  Je... pense que pour toi comme pour moi, nous devrions nous séparer de cette photo. Les souvenirs, je les ai dans ma tête, je n'ai pas besoin de cette photo. 

 

—  Si tu es d'accord, j'aimerais la garder encore un peu alors...

 

—  Si tu veux.

 

Je voudrais l'enterrer au fond de mon jardin lorsque j'aurais ma maison. Elle reposera en quelque sorte près de toi. 

 

 Pour en revenir à Umé, tu peux venir la voir demain après ton boulot si tu le souhaites... 

 

Il ne répond pas tout de suite et prend quelques secondes de réflexion.

 

— Je peux me libérer pour dix-sept heures, finit-il par dire. 

 

— Je t'attendrais, viens au bureau des infirmières et je t'accompagnerais. 

 

 Ça marche, acquiesce Sasuke.

 

Je discerne une pointe de stress et d'appréhension au son de sa voix. Et je le comprends. Moi-même je me sens envahir par l'anxiété en cet instant. J'appréhende la confrontation et le moment où il découvrira la vérité. Est-ce vraiment raisonnable de ne rien lui dire et lui laisser découvrir l'état d'Umé sur place ? Peut-être devrais-je quand même le prévenir une fois devant la porte avant de pénétrer dans la chambre. Sinon, j'ai peur que le choc soit trop grand.

 

Je jette un coup d’œil à Sasuke qui semble perdu dans ses pensées. J'en profite pour ranger la photo à sa place et je me lève quand on me retient par le poignet. Mon regard croise le sien, qui semble perdu. J'éprouve un pincement au cœur et je m'en veux de lui avoir donné de faux espoirs. Il était persuadé qu'Umé était belle et bien vivante, en pleine forme. Le pauvre, il a fait un ascenseur émotionnel et je suis la seule coupable. J'espère néanmoins que je n'ai pas fait plus de mal que de bien. Je ne voudrais pas être la cause s'il sombrait. Je dépose mon porte-monnaie sur la table basse et j'enserre la taille de Sasuke pour le prendre dans mes bras. J’aimerais le rassurer par des mots, mais je ne sais même pas quoi lui dire. Je ne veux pas mentir en sortant des phrases comme "Ça va allez", "Ne t'inquiète pas, ça va passez" ou encore "Tu vas oubliez avec le temps". Car non, ça n'ira pas quand il découvre Umé allongée dans son lit et il vivra avec toute sa vie. 

 

Il m'enlace à son tour, un peu trop fort, mais je ne dis rien. Il pose sa tête dans le creux de mon épaule tandis que je lui caresse doucement le dos. 

 

 Je suis là, chuchoté-je. Je t'aiderais.

 

— C'est si horrible que ça ? J'ai autant ruiné sa vie que je le pense ? murmure-t-il à mon oreille.

 

Oh oui, et encore plus que tu ne le penses... 

 

— N'y penses pas pour l'instant.

 

Nous restons de longues minutes dans cette position, enlacés. Je crois même sentir quelque chose d'humide contre ma peau à certains moments, peut-être des larmes ? Au bout de je ne sais combien de temps, Sasuke s'écarte lentement et ses yeux larmoyants plongent dans les miens. Aucun de nous deux ne détourne le regard. Est-ce vraiment le bon moment pour s'embrasser ? Je n'en sais rien, mais je sais que nous en avant autant envie l'un que l'autre. Cela fait des jours que nous nous retenons et maintenant qu'il est au mourant pour mon identité, pourquoi continuer à se torturer. J'avance lentement mon visage du sien sans détourner le regard et me rapproche de sa bouche que je meurs d'envie d'embrasser depuis plusieurs jours. Nos lèvres s'effleurent doucement. Une fois, deux fois, trois fois.

 

 Tu aimes me faire languir, chuchote Sasuke d'une voix rauque. 

 

 Je suis née pour ça, souris-je.

 

 C'est justement ce que je commençais à me dire, rit-il à quelques millimètres de ma bouche.

 

Sasuke semble beaucoup moins patient que moi puisqu'il cède le premier en écrasant ses lèvres contre les miennes. Je savoure ce délicieux contact et réponds avidement à son baiser. Les premiers sont doux avant de devenir plus langoureux, plus passionnés. Est-ce la frustration accumulée depuis ses dernières semaines qui fait que nous nous mangeons littéralement la bouche. Nos langues se retrouvent et profitent de ce merveilleux moment. Nos mains ne sont pas en reste, les miennes se débarrassent de son pull tandis que les siennes s’attaquent à ma chemise. Sasuke n'a visiblement pas le temps, puisqu'il attrape le tissu et fait sauter tous les boutons avant de l'envoyer valser au loin. Il ne le sait pas encore, mais il m'en doit une nouvelle. Cela ne peut rester impuni sinon je vais finir à poil sans rien pouvoir me mettre avant la fin de l'année.

 

Sa bouche délaisse la mienne pour venir me déposer une multitude de baiser dans le cou.

 

 Si tu ne veux pas, dis-le maintenant. Après, je ne suis pas sûr de pouvoir m'arrêter, prévient-il.

 

Est-ce que j'ai l'air de vouloir stopper nos étreintes ? 

 

 Alors ne t'arrête pas, répondé-je dans un murmure.

 

Je sens Sasuke sourire contre la peau de mon cou. Mon accord est peut-être un signal à aller plus loin pour lui. Sa main descend pour déboutonner mon pantalon.

 

  Mets-toi debout.

 

/!\ Le Lemon va commencer. #TeamLemon, vous êtes là ?! 

 

Je m'exécute en silence. Il fait glisser mon jean le long de mes jambes et je m'en débarrasse d'un geste du pied. Je m'approche pour m'attaquer à sa ceinture, puis à ses boutons. Il soulève légèrement le bassin pour que je puisse lui ôter son vêtement. Nous sommes maintenant à égalité. Lui en boxer, moi en soutien-gorge et shorty. Mon regard s'ancre dans le sien. J'y lis de la passion, de l'impatience et beaucoup de désir. Je m'avance doucement pour m’asseoir à ses côtés. J'attrape l'élastique de son boxer et le descend jusqu'aux cuisses. Je prends délicatement sa verge dressée dans la paume de ma main et active de lents mouvements de va-et-vient. Sasuke ferme les yeux pour profiter des caresses. 

 

Puis j'incline ma tête pour prendre dans ma bouche son érection. Mes lèvres vont et viennent le long de son membre dur tandis que ma main suit le mouvement. Des petits gémissements parviennent à mes oreilles, accentuant mon ardeur. J'aspire son sexe avec plus de pression et d'avidité. Ma langue titille et lèche son gland avant de parcourir le long de sa verge. J'alterne les rythmes, lentement puis rapidement. Je jette un regard à Sasuke qui ouvre les yeux au même moment. Il me fixe intensément avec envie et désir. Je continue ma fellation pendant quelques minutes lorsqu'il m'arrête d'un geste de la main.

 

 Sakura, il faut que tu arrêtes ou je vais jouir maintenant dans ta bouche. Et Dieu sait, que je meurs d'envie de m'enfoncer en toi, lâche-t-il d'une voix rauque.

 

Je fais un dernier va-et-vient sur sa verge et me redresse avant de m’éclipser dans ma chambre. Je reviens quelques secondes plus tard, sans shorty, mais avec un petit quelque chose en latex. Je déchire l'emballage et attrape le préservatif pour le dérouler le long de son sexe. Je grimpe sur ses genoux et cale sa verge à l'entrée de mon vagin. Je m'amuse encore un peu avec lui en entrant son gland de quelques centimètres avant de le ressortir. Puis je recommence ce manège plusieurs fois. Son regard sombre me fixe intensément, et j'y lis de la malice. Sa main descend vers mon entre-jambe et effleure mon intimité.

 

 Je crois que je ne suis pas le seul excité ici, sourit-il.

 

Il insère un doigt en moi, puis deux avant d'entamer des va-et-vient. Mon corps réagit à ses caresses. Des papillons dans le ventre, la respiration haletante, les pupilles dilatées, je suis en train d'être prise à mon propre jeu. Je sens mes tétons se durcir contre le tissu de mon soutien-gorge. Sasuke doit lire dans mon esprit puisqu'il le dégrafe d'une main experte, libérant ma poitrine de son étau. Cette fois ce sont mes gémissements qui emplissent la pièce. 

 

 S'il te plait, prends-moi. Maintenant, supplié-je.

 

Un sourire s'étire sur ses lèvres. Il retire ses doigts trempés et je vois qu'il le porte à sa bouche avant de lécher le résultat de mon plaisir, sans me quitter des yeux. Il place ensuite son sexe dur et imposant à l'entrée de mon vagin et je me laisse glisser le long de sa verge. Je m'accroche à ses épaules musclées pour mieux prendre appui. Je monte et descends en alternant le rythme, lent et rapide. Je ferme les yeux pour mieux savoureux les sensations et j’entends des râles de plaisir se mélanger à mes gémissements. Les mains de Sasuke agrippent fermement mes fesses pour accompagner mes mouvements. Des frissons parcourent mon corps tandis que ma respirations se fait haletante. 

 

Je le chevauche et c'est moi qui donne le tempo. Des mèches mouillées de sueur se collent à mon visage. Je sens que la jouissance n'est pas loin et d'après ce que je peux en juger, Sasuke n'ont plus.

 

 Stop, ordonne-t-il dans un murmure.

 

Je m’immobilise sur sa verge et le regarde surpris. 

 

 Lève-toi, intime-t-il.

 

J'obéis et glisse le long de sa verge pour me redresser. Il bondit du canapé et m'attrape le bras. Il se dirige vers la baie-vitrée du salon et tire le rideau qui nous offre maintenant une vue sur une partie la ville.

 

  Les voisins de l'immeuble d'en face pourrait nous voir, protesté-je. Éteint au moins la lumière.

 

  Avoir des spectateurs me dérange pas, souffle-t-il.

 

Il me pousse et un petit cri s'échappe de ma bouche lorsque mon corps entre en contact avec la vitre froide. Son corps se presse contre le mien et je sens son sexe dur et chaud contre ma hanche. 

 

  Je vais te prendre et te faire jouir ici, contre cette fenêtre.

 

 Je sursaute et pousse un gémissement lorsqu'il me pénètre d'une traite, s'enfonçant profondément en moi.

 

Le front collé contre la vitre, je profite de la vue nocturne et illuminée de la ville, tandis que je suis assailli par les coups de bassin de Sasuke. Soudain, mes yeux se posent sur une terrasse.

 

  Oh mon Dieu ! Sasuke ! Il y a un homme sur son balcon ! Il va nous voir ! m'exclamé-je légèrement en panique.

 

Mon amant intensifie ses va-et-vient. Ses mouvements sont plus brutaux, sauvages. La situation à l'air de l'exciter énormément et je dois avouer que je ne suis pas reste. Je suis surprise de voir que cette situation amplifie mon désir et mon envie. J’aperçois l'homme sur sa terrasse tourné vers nous. La lumière du salon nous éclaire parfaitement, il n'y a pas de place au doute sur ce que nous faisons. S'il regarde notre fenêtre, il doit voir clairement que je suis en train de me faire baiser contre la vitre.

 

— Qu'il profite donc du spectacle. Regardes-toi, petite coquine. Tu mouilles encore plus depuis que tu as vu qu'il y avait un public, chuchote-t-il au creux de mon oreille.

 

Et il a raison. Je suis toute excitée de savoir que l'on nous regard en plein ébat. Je garde une main posée contre la vitre pour garder appuie et passe l'autre entre mes jambes pour caresser mon clitoris. Sasuke a posé les siennes sur mes hanches afin d'imprimer de rapides et brutaux coups de rein.

 

 C'est ça, touche-toi, susurre-t-il d'une voix rauque.

 

J'imprime des mouvements circulaires sur mon petit bouton sensible tandis que vagin se fait malmener par l'imposant sexe de mon amant. Ma respiration se fait haletante, j'éprouve même des difficultés à rester debout. Je sens que je suis proche de la jouissance. Mon cœur tambourine violemment dans ma poitrine compressée contre la vitre froide. 

 

 Sasuke, gémis-je. Je... J'en peux plus... 

 

Mon corps se met à trembler, un bruit entre un gémissement et un cri sort de ma bouche. L'orgasme explose au creux de mon ventre et me submerge. Sasuke me suit quelques minutes plus tard en jouissant dans un râle de plaisir.

 

LEMON FINI

 

 

*** 

 

Nous sommes enlacés dans les bras l'un de l'autre, sous un plaid, sur la banquette devant Titanic. Après nos ébats, nous avons commandé des pizza pour reprendre des forces. Une quatre fromages pour Sasuke et une végétarienne pour moi. Une fois le ventre bien rempli, nous avons mis la suite du film. Arriverons-nous à la fin un jour ? 

 

 On va encore le voir longtemps le blondinet là ? râle-t-il.

 

— C'est un des personnage principal Sasuke, ris-je. Donc tu n'as pas fini de le voir.

 

Je sens sa main caresser mon sein droit avant de titiller mon téton. J'esquisse un petit sourire. 

 

 Qu'est-ce que tu fais ?

 

 Oups, ma main a bougé toute seule... Fais gaffe, ça pourrait être autre chose de plus gros bientôt.

 

 Que dirais-tu de laisser ce bon vieux Jack pour que je te présente mon lit ? proposé-je.

 

 J'adorerais, sourit Sasuke.

 

Je repousse le plaid et prends sa main pour le diriger vers ma chambre où une nuit de folie nous attends.

 

 

 

 

Il est sept heures lorsque mon réveil sonne. J'ouvre difficilement les yeux et découvre une crinière rose contre moi. C'est vrai que je me suis endormi chez Sakura, c'est la première fois que nous passons la nuit ensemble -si on oublie la soirée du vomi où j'ai couché sur le canapé-. Je dois repasser chez moi pour me changer avant d'aller au cabinet. J'aimerais flâner encore un peu et l'admirer en plein sommeil, mais je dois me dépêcher. 

 

 Sakura, je dois y aller, lui chuchoté-je en la secouant doucement.

 

Elle ouvre doucement les paupières et je découvre ses magnifiques yeux émeraude. Elle esquisse un sourire lorsqu'elle me voit. 

 

 Bien dormi ? me demande-t-elle après un bâillement.

 

— La nuit a été merveilleuse mais je pense que je manque un peu de sommeil, souris-je.

 

 Moi aussi. La journée va être longue.

 

— Il faut que je file, je dois passer chez moi me changer. On se voit ce soir. Dix-sept heures au bureau des infirmières ?

 

 Oui. A tout à l'heure.

 

Je dépose un baiser sur ses lèvres et me lève pour aller récupérer mes vêtements éparpillés aux quatre coins de la pièce dans le salon.

 

*** 

 

La journée est monstrueusement longue comme l'avait prédit Sakura. J'ai eu la tête ailleurs une bonne partie du temps. J'ai beaucoup pensé à la soirée d'hier. Je suis content de savoir enfin la vérité et je ne suis pas déçu que ça ne soit pas Umé. Qu'importe son prénom, j'aime passer du temps avec elle et je ne compte pas m'arrêter là. J'ai été surpris de son échange avec sa mère. Je ne pensais pas qu'elles avaient d'aussi mauvais rapports et je me suis senti désolé du discours qu'elle lui a tenu. Comment une maman peut-elle dire des mots aussi durs à sa fille ? Je ne suis pas sûr qu'elles puissent avoir une relation stable un jour.

 

Mes pensées sont aussi allées vers Umé. Qu'est-elle devenue ? Pourquoi m'a-t-elle traité d'assassin ? L'ais-je réellement tuées ? Non. Sakura m'a dit qu'elle n'était pas morte, mais que c'était compliqué. Peut-être est-elle dans un fauteuil et qu'elle ne peut plus marcher. Peut-elle a-t-elle été grièvement brûlée pendant l'accident ? Je me suis imaginé une multitude de scénarios possibles avant de me forcer à lâcher l'affaire. Cela ne sert à rien de se triturer le cerveau, je saurais tout ce soir. Je vais la voir avec Sakura et j'espère pourvoir m'excuser en face de la bonne personne cette fois.

 

Je prends mon portable et envoie un message à Sakura entre deux patientes.

 

"Je peux venir dormir chez toi ce soir ? "

 

Je reçois sa réponse une dizaine de minutes plus tard.

 

"Bien sûr."

 

J'ai hâte de m'endormir avec elle dans les bras. 

 

 

*** 

 

Il est dix-sept heures et quelques minutes lorsque j'arrive devant le bureau des infirmières. 

 

 Oh, mais c'est le beau gosse de l'autre jour !

 

Je reconnais tout de suite la collègue blonde qui était avec Sakura la dernière fois.

 

 Je vais la chercher, sourit-elle.

 

 Merci.

 

Quelques secondes plus tard Sakura sort et esquisse un petit sourire en me voyant. 

 

 Ta journée s'est bien passée ? demande-t-elle.

 

 Oui, un peu longue et toi ? 

 

 Ça a été.

 

Soudain, son sourire disparaît de son visage.

 

 Tu es prêts ?

 

 Oui. On va où ?

 

 Nulle part. On reste à la clinique.

 

 Quoi ? m'exclamé-je surpris. Umé est ici ? 

 

 Oui.

 

Sa collègue sort du bureau est nous regard à tour de rôle.

 

 Oh, vous allez voir Umé ? Tu lui passeras le bonjour Saku' ! 

 

Puis elle s’éclipse à l'autre bout du couloir. Hum, elle lui a demander de la saluer, c'est qu'elle doit être un minium en forme. C'est bon signe. Ça va aller. Tout va bien se passer. 

 

 Allons-y.

 

Je suis Sakura dans les couloirs, en silence. Elle semble étrangement nerveuse. Appréhende-t-elle nos retrouvailles ? Elle a peut-être peur que je retombe sous le charme de sa jumelle. Elle n'a pas de soucis à se faire, c'est elle qui a su faire fondre la glace autour de mon cœur et qui l'a réparé doucement avec sa gentillesse et sa tendresse. Elle n'a rien à craindre.

 

Elle s'arrête devant une chambre qui porte le numéro 306. Elle se retourne pour me faire face et je suis frappée par sa pâleur. Elle est presque aussi blanche que les murs de la clinique. 

 

  Il faut que tu saches certaines choses avant de rentrer.

 

Ses yeux s'embuent, ses mains tremblent et j'ai l'impression que sa respiration s’accélère. 

 

  Je.. Je ne sais pas par où commencer. Depuis plusieurs semaines ,j'appréhende ce moment. Umé...

 

Des larmes coulent le long de ses joues. Je ressens un pincement au cœur, je meurs d'envie de les essuyer et de la prendre dans mes bras.

 

  Umé ne s'est pas sortie indemne de l'accident, Sasuke. Elle est arrivée à l’hôpital avec un traumatisme crânien, une hémorragie cérébrale et un hématome au cerveau. Apparemment, elle était inconsciente puis a été semi-consciente pendant deux jours avant de sombrer à nouveau. Je n'ai pas vu tout ça, ce sont les dire de mes parents, car lorsque nous sommes arrivées sur place, le soir du drame, j'ai perdu les pédales. Ils ont dû m'injecter un sédatif pour me calmer. Je n'ai pu la voir qu'après trois jours et elle était dans le coma. Avec le temps et les traumatismes de l'accident, ses organes se sont dégradés. Mes parents ont donné beaucoup d'argent pour essayer de la sauver, mais... tout ne s’achète pas. Ils n'ont rien pu faire pour elle, finit-elle dans un sanglot.

 

Je reste choqué et abasourdi par les révélations de Sakura.

 

  Elle est ... morte ?

 

  Pas tout à fait.

 

Elle ouvre la porte et pénètre à l’intérieur. Je rassemble tout le courage que je possède et la suis. 

 

J’aperçois d'abord les machines un peu partout autour du lit, et enfin Umé. Je m'approche doucement, mais garde un minimum de distance. Elle est allongée dans des draps blancs et reliée à des moniteurs un peu partout. Sa bouche ouverte est intubée. Ses cheveux sont plus courts que dans mes souvenirs.

 

  C'est moi qui m'occupe d'elle tous les jours. Ce n'est pas le boulot, mais j'ai insisté pour le faire personnellement. Si je suis devenue infirmière et que je suis entrée dans cette clinique, c'est pour elle.

 

Elle s'avance et dépose un baiser sur le front de sa sœur. Comment peut-elle être en charge de sa jumelle, c'est malsain ! Comment le chef de service ou le directeur de cet établissement ont pu laisser faire ça ! 

 

  Coucou Umé, dit-elle en lui prenant la main. Sasuke est venu te voir. 

 

  Salut, dis-je bêtement. 

 

  Umé est resté un moment dans un coma de stade II avant de sombrer au stade III. Et il y a sept ans, elle est passée au stade IV, appelée également mort cérébrale. On a l'impression qu'elle respire, mais c'est la machine qui fait soulever sa poitrine. Son cerveau n'a plus aucune activité.. Les médecins ont voulu la débrancher, mais mes parents... ma mère refuse. Pour elle, Umé est toujours là et se réveillera un jour.

 

Un poids se forme au creux de mon ventre, j'ai envie de vomir. Sa mère avait raison, je suis un assassin ! Mais elle aussi, comment peut-elle laisser sa fille comme un legume pendant autant d'années.

 

  Je l'ai tué, soufflé-je.

 

Sakura se retourne. Ses yeux sont baignés de larmes. Elle lâche la main de sa sœur et s'approche de moi. Elle esquisse un sourire et pose ses mains sur mes joues.

 

 Umé est aussi coupable que toi. Elle était grande et elle choisie de monter avec toi de son plein grès. Crois-moi, je l'ai tellement détesté d'avoir été aussi insouciante... Tu as fait une erreur qui lui a été fatale, oui et tu vivras avec toute ta vie. Mais tu peux justement faire en sorte de te faire pardonner. Tu soignes des gens toute l'année, tu les aides. Tu es quelqu'un de bien Sasuke. Tu as merdé, oui, mais tu dois vivre avec. Et je t'aiderais. Je serais là. Umé t'aimais sincèrement et elle ne voudrait pas que tu sois malheureux, au contraire, elle voudrait te savoir heureux et épanouie.

 

  Non, elle doit me détester. Comment voudrait-elle que je fréquente sa jumelle ? 

 

Je m'appuie contre le mur et me laisse glisser le long.

 

  Sasuke ! 

 

Sakura se précipite et m’encercle de ses petits bras.

 

  Voila pourquoi je ne voulais pas te le dire. Je t'en supplie ne cache pas et ne remets pas tout en question.

 

  Je l'ai tué, Sakura, hurlé-je en la repoussant.

 

Je comprends mieux les réponses de Sakura lors de notre première rencontre maintenant. Lorsque je l'ai prise pour Umé et que je lui ai dit que je le pensais morte, elle avait été étonnée. Idem, lorsque je lui ai parlé de son enterrement. Mes parents m'avaient tenu à l'écart de l'affaire et je pensais l'avoir loupé, sauf qu'il n'y en a pas eu. Elle n'a jamais été enterrée. Non, elle croupissait ici dans son lit d’hôpital.

 

 Tu crois que je ne le sais pas ?! cri-t-elle à son tour. Tu crois que je ne me suis pas senti coupable quand j'ai commencé à éprouver des sentiments pour son ex petit ami et pour un des responsables de sa mort ? 

 

J'écarquille les yeux, choqué. Des sentiments ? Elle a des sentiments pour moi ? Vraiment ?

 

 Moi aussi, j'ai souffert ! Cet accident a bouleversé ma vie et a détruit ma famille. J'ai vécu jusqu'à présent pour Umé, mais aujourd'hui, j'en ai marre. Je veux être heureuse et enfin vivre pour moi. Et je ressentais ça quand j'étais à tes côtés. J'étais vraiment heureuse lorsque nous étions ensemble et j’espérais que nous pourrions avancer ensemble. Mais tu es comme ma mère, vous ne pensez qu'à Umé ! Allez tous au diable !

 

Elle se redresse et sort en courant de la chambre. Je n'hésite pas une seule seconde et me relève pour me précipiter à sa recherche. J’aperçois au loin une tignasse rose sortir du service. J'ouvre la porte à la volée et la poursuis dans les escaliers. Je les descends deux par deux. Je dois la rattraper. Petit à petit, je ronge la distance qui nous sépare. Je la vois franchir les portes du hall de la clinique. A l'extérieur, je la vois courir sur le parking. Bon sang ! Comment peut-elle courir aussi vite après ce que je lui ai mis la vielle ? Elle na donc aucune courbature ?! 

 

 Sakura, crié-je. 

 

Je cours aussi vite que je peux pour t'enter de la rattraper. Elle n'est plus qu'à quatre petits mètres.

 

Soudain, je l’aperçois. Une voiture rouge s'engouffre dans le parking et percute Sakura de plein fouet. Je me fige sous le choc, j'observe la scène immobile et impuissant. Elle est projetée dans le pare-prise de la voiture avant de rouler sur le capot pour retomber sur le sol. La voiture à l’arrêt, le conducteur sort affolé. Je retrouve enfin l'usage de mes jambes et me précipite sur le lieu de l'accident. 

 

 Elle est...

 

 Je suis médecin, informé-je. Je m'en occupe. Appelez vite la clinique et dite leur qu'il y a une blessée sur leur parking ! Vite !

 

Je m'accroupis auprès de Sakura. Les mains tremblantes, je prends son pouls. Ouf, elle respire. Elle est vivante. Je l'appelle tout en l’auscultant, mais elle demeure inconsciente. Ses paupières restent closes. Son visage et ses avants bras sont tuméfiés. Des larmes me montent aux yeux et coulent le long de mes joues. Oui, je chiale comme une tapette, mais je m'en fou. Je suis mort de trouille, j'ai peur qu'un accident de voiture me prenne encore une personne qui m'est chère. Je ne pourrais pas le supporter.

 

 Sakura, si tu meurs, je ne te le pardonnerais jamais !

 

La voiture ne roulait pas vite, c'est une chance pour elle. Elle devrait s'en sortir ? Aucun organe ne semble touché vu de l'extérieur, mais seule des radios et irm pourront le confirmer. Je lui tiens fermement la main en attendant les secours. J'aimerais la porter dans mes bras pour l'amener dans l'entrée, mais ce ne serait pas prudent. 

 

 Ça va aller, Sakura. Je suis là, la rassuré-je.

 

Après des minutes qui me semblent interminables, du personnel arrive enfin sur place avec une civière. Quatre hommes déplacent délicatement son corps inerte pour le déposer sur le brancard orange.

 

 Oh mon Dieu ! C'est une infirmière de notre clinique ! s'exclame une femme en blouse blanche derrière.

 

— Dépêchons-nous ! 

 

Ils soulèvent la civière et transportent Sakura lentement et méticuleusement jusqu'aux urgences, deux cents mètres plus loin. Je les suis en silence, le cœur tambourinant dans la poitrine. Ils pénètrent dans l'établissement et franchissent deux grandes portes un peu plus loin. La femme m’arrête d'un geste de la main.

 

 Vous ne pouvez aller plus loin. Veuillez attendre ici, s'il vous plaît.

 

— Je suis docteur, j'ai mon propre cabinet.

 

 Je suis désolée, seul le personnel de l’hôpital peut franchir les portes. Nous allons lui faire des examens et nous reviendrons vers vous dès que nous aurons des nouvelles.

 

J'ai envie de la pousser et de passer, mais cela ne servirais à rien. On me rattraperait pour me jeter dehors. Je n'ai pas le choix que de rester ici et d'attendre. Je pousse un long soupir et m'assois sur une chaise en plastique, je sais que la fin de journée s'annonce longue. Sakura a-t-elle vécu la même chose lors de l'accident d'Umé ? A-t-elle attendu dans un couloir pendant des heures sans nouvelles ? Elle a dû tellement souffrir, par ma faute. J'ose imaginer ce qu'elle a vécu ce soir-là et les semaines qui ont suivies. J'attrape mon téléphone et cherche mon frère dans mes contacts qui décroche à la première sonnerie.

 

 Sasuke ?

 

 C'est moi.

 

 Et bien, je n'ai pas eu de tes nouvelles depuis avant Noël. Ça fait plus d'un mois. Maman était déçue que tu ne sois pas là pour le repas...

 

 Elle a l'habitude, elle s'en remettra. Je passerais bientôt les voir pour leur faire un petit coucou.

 

 Tu as une voix bizarre, qu'est-ce qui se passe ? demande-t-il inquiet.

 

 Je suis à l’hôpital.

 

 Quoi ?! Tu vas bien ? Attends-moi, j'arrive. Je serais là dans une dizaine de minutes ! 

 

 Ce n'est pas moi. Je vais bien, je suis dans un couloir et j'attends qu'on me donne des nouvelles.

 

 Qui est blessé, Sasuke ?

 

 Tu te souviens quand on était dans le parc quelques jours avant Noël ? Je t'avais dit avoir vu Umé...

 

 Je m'en souviens. Et je t'ai dit que c'était impossible, elle est morte, Sasuke. C'est dur, je sais, mais il faut que tu l'acceptes...

 

— Qui nous a dit qu'elle était morte ? Papa et maman ont-ils vu son avis de décès dans le journal ? 

 

— Ça remonte à dix ans Sasuke... Je.. Laisse moi réfléchir.

 

Je jette un coup d’œil à la porte qui est toujours fermée. Je pense à Sakura qui se trouve derrière en train de passer une batterie d'examen. A-t-elle reprise conscience ?

 

— Ce sont ses parents. Il me semble qu'ils ont appelé quelques jours après, disant que leur fille était décédée et qu'il était hors de question qu'un membre de notre famille s'approche à nouveau d'eux. On avait interdiction de se rendre à l'enterrement et papa a respecté leur choix. Après tout, il avait étouffé l'affaire qui avait coûté la vie de leur enfant, alors il a voulu respecter leur volonté. C'est pour ça qu'il t'a tenu à l'écart de toute cette merde. Il a fait ça pour toi, Sasuke.

 

 Il n'y a jamais eu d'enterrement Itachi, elle n'est pas morte, m'étranglé-je.

 

 Quoi ? s'exclame Itachi.

 

 Tu avais raison, ce n'est pas elle que j'ai vu ce jour-là, mais sa jumelle Sakura. Et elle m'a tout raconté, lâché-je avec un sanglot dans la voix. Umé est toujours vivante et elle est ici, dans la clinique depuis dix ans. Elle est en état de mort cérébrale et c'est sœur qui s'occupe d'elle, tous les jours. 

 

— Merde ! C'est affreux, souffle Itachi. C'est pour ça que tu es à l’hôpital ? Tu as été la voir ?

 

 Oui, Sakura m'a amené à sa chambre. Je l'ai vu de mes propres yeux, allongée dans son lit entouré de machine. Et puis, on s'est en quelque sorte disputés. Elle s'est enfuie en courant et dehors, sur le parking. Une voiture est arrivée et l'a renversé. Elle était inconsciente, le visage tuméfié. C'était horrible Itachi...

 

 Qui ? Umé ? 

 

 Mais non, Banane ! Sakura !

 

Comment veut-il qu'Umé court alors que je lui ai dit il y a quelques secondes qu'elle était en état de mort cérébrale. Il réfléchit deux minutes lui ?

 

 Ah, sa jumelle.. Et comment elle va ? 

 

 J'en sais rien. Ils lui faut des examens et j'attends... J'ai l'impression que je suis là depuis des heures. Je vais devenir fou !

 

 Tu la connait bien cette Sakura ? s'étonne Itachi.

 

 J'apprends. On se fréquente depuis notre rencontre et je tiens beaucoup à elle. Je n'arrive pas à croire ce que je suis sur le point de t'avouer, mais... je suis en train de tomber amoureux d'elle.

 

Je ne le vois pas, mais je sais qu'il sourit à l'autre bout du fil. 

 

— Attends-moi. J'arrive te tenir compagnie, je serais là dans une dizaine de minutes.

 

 

***

 

Il est passé dix heures et je n'ai toujours pas nouvelle. Cela fait plus de quatre heures que j'attends comme un couillon dans ce couloir sans voir personne. A chaque fois que j'interpelle quelqu'un, on me répond qu'ils ne savent pas. Comment est-ce possible ?

 

 Tu me donnes mal au crâne à faire les cent pas comme ça, Sasuke. Assieds-toi, me supplie Itachi.

 

Le pauvre, cela fait plusieurs heures qu'il attend avec moi. Ah, j’aperçois une infirmière qui s'approche et se dirige vers ces deux maudites portes. Je l'interpelle.

 

 Excusez-moi. Ma petite amie a eu un accident devant chez vous et je n'ai toujours pas de nouvelles...

 

Je ne sais pas vraiment comment qualifier Sakura, nous n'avons pas été très claire à ce sujet. Néanmoins, je n'arrive pas à la considérer comme une amie.

 

 Je suis désolé. Vous n'êtes pas de la famille alors je ne peux rien vous dire.

 

Pardon ? Elle se fout de ma gueule celle-là ? C'est la première fois depuis quatre heures qu'on me dit ça. Comment ça, on ne me dira rien ? Elle insinue que j'attends ici depuis trois plombes, pour rien parce qu'ils ne veulent pas me donner d'informations sur sa santé ? Retenez-moi, je vais faire un malheur ! 

 

 Sakura, cri une voix familière au loin.

 

Je tourne la tête et découvre sa mère en train de parler à une personne en blouse blanche. Je reconnais la collègue blonde de mon soleil rose. Merde. Si j'y vais, je vais me faire engueuler par le dragon qui lui sert de génitrice.

 

 Comment se fait-il qu'on nous prévienne seulement maintenant ! hurle-t-elle. Après tout l'argent qu'on donne à cette clinique, c'est scandaleux ! 

 

Son mari tente de la tempérer, sans succès. Pas étonnant, comment voulez vous calmer une harpie hystérique. Je me rapproche lentement vers eux.

 

 Comment va-t-elle ? Sera-t-elle capable de s'occuper de sa sœur demain ?

 

S'en ai trop pour mes oreilles. La connerie n'a donc pas de limite chez cette femme ?! Je suis maintenant à leur niveau et j'explose de rage.

 

— Il n'y a donc que ça qui vous intéresse ?! Qu'elle soit capable ou non de s'occuper de sa jumelle ? rugis-je.

 

 Vous ? s'écrit-elle offusquée. Que diable faites vous ici ? Décidément, à chaque fois que vous êtes dans le coin, une de mes filles est gravement blessée ! C'est Sakura que vous allez tuer maintenant ?! Sortez-moi cet assassin, cri-t-elle après la blonde.

 

— Je ne peux pas Madame, s'excuse Ino avec un regard compatissant envers moi.

 

Bien, elle a l'air de mon côté. Peut-être pourra-t-elle me donner quelques informations sur Sakura.

 

 Qui êtes-vous ? me questionne Monsieur Haruno.

 

 Je..

 

 C'est cet Uchiwa. Celui qui a tué notre pauvre Umé, sanglote sa femme.

 

L'homme aux cheveux grisonnant reste immobile, mais je perçois de l'émotion dans son visage. Ses yeux s'embuent légèrement.

 

— Je suis ami avec Sakura, depuis peu. Je suis désolé, je n'ai pas pu la protéger lorsque j'ai vu cette voiture foncer sur elle. J'étais trop loin, je n'ai rien pu faire, expliqué-je en m'inclinant légèrement devant lui.

 

 J'avais lui et pourtant dis ce matin d'arrêter de vous fréquenter ! Et voilà le résultat ! 

 

 Tu le savais ? s'étonne son mari. 

 

 Oui. Je suis allée chez Sakura hier soir et il était chez elle ! Comment cette petite sotte a-t-elle osé faire ami-ami avec ce monstre.

 

 Mon frère n'est pas un monstre. Mesurez vos paroles, Madame, intervient Itachi d'une voix sombre.

 

Monsieur Haruno nous regarde à tour de rôle, mon frangin et moi avant de pousser un soupir. 

 

 Sakura est grande et elle fait ce qu'elle veut. Mes sentiments personnels n'ont pas à interférer.

 

 Chéri ! s'offusque sa femme en lui donnant un coup de sac à main.

 

Décidément. 

 

 Allons voir à l'accueil, ils pourront peut-être nous renseigner.

 

Sur ces mots, il s'éloigne sans un regard pour sa femme. Cette dernière nous lance un regard noir avant de suivre son mari. La collègue de Sakura pousse un soupir et se masse les tempes. 

 

 Elle me rend malade ! Même après l'accident de Sakura, elle ne pense qu'au devenir d'Umé.

 

 Tu as des nouvelles ? On ne veut rien me dire car je ne fais pas partie de la famille. 

 

Elle esquisse un petit sourire.

 

 Elle va bien. Pas de traumatisme crânien ou d’hémorragie interne. Elle a eu de la chance, elle s'en sort avec une légère fracture du radius et du tibia. Elle va devoir s'arrêter pendant deux-trois mois. Attends que sa mère l'apprenne, elle va faire un arrêt cardiaque, se moque-t-elle gentiment.

 

A ces mots, je ressens un immense soulagement. Elle est en vie, Dieu merci. Par contre, elle n'a pas fini d'entendre les plaintes de sa génitrice.

 

 Je peux la voir ?

 

 Non, pas aujourd'hui. Elle se repose, revient demain.

 

 

*** 

 

 

Il est onze heures et demi, je marche dans le couloir à la recherche de la chambre de Sakura. Des éclats de voix familières m'indiquent que je n'en suis pas très loin. 

 

 Comment as-tu pu être aussi imprudente ! Regarde ton bras et ton pied, se lamente Madame Haruno. Comment tu vas pouvoir d'occuper de ta sœur maintenant !

 

 Comme je te l'ai dit il y a cinq minutes, mes collègues me remplaceront. C'est leur métier aussi, Maman, soupire Sakura.

 

— Je n'ai pas confiance en elles ! Dis, tu pourrais peut-être le faire avec tes béquilles ? Même si tu mets plus longtemps, ce n'est pas grave.

 

— Tu plaisantes, là ?! Tu vois pas que je suis plâtrée ? Même dans ses moments, tu n'as aucune considération envers moi. Sors de cette chambre. Ne viens plus me voir. 

 

 Tu devrais être contente que je sois là. Tu te plains toujours que je ne pense qu'à ta sœur et quand je suis avec toi, tu me chasses.

 

 Tu es venu seulement pour me parler d'Umé ! hurle-t-elle. Hors de ma vue !

 

Je choisis d'entrer à ce moment pour le bien de la santé mentale de Sakura. Inutile d'attendre plus longtemps, en plus, il s'agit clairement d'un discours de sourds. Elles tournent en rond. 

 

 Qu'est-ce que tu fais là ? rugit-elle.

 

 Sasuke, s'exclame Sakura le sourire aux lèvres. 

 

Mon regard se pose sur son visage tuméfié. L’œil droit au beurre noir et un bleu près de la bouche, j'ai mal pour elle. Son bras est immobilisé contre son buste à l'aide d'une écharpe. J'imagine que sa jambe est plâtrée sous les draps. Elle semble ravie de me voir, a-t-elle gardé des souvenirs concernant notre conversation avant l'accident ?

 

 Salut la schtroumpfette, taquiné-je gentiment.

 

 Sors tout de suite de cette chambre ou j'appelle la sécurité ! menace la harpie.

 

 Faites donc, dis-je en la poussant pour rejoindre Sakura. Comment te sens-tu ?

 

— Tu trouves qu'elle a l'air d'aller bien ? crache sa mère en attrapant mon coude.

 

 Lâchez-moi. 

 

 Maman, va t'en ou j'appelle quelqu'un pour qu'il te sorte de la chambre. 

 

A ces mots, elle saisie la télécommande et positionne son pouce au-dessous du bouton, prête à appuyer. Sa mère, fâchée quitte la pièce comme une furie. Bon débarras ! Nous voilà enfin seul, mais aucun de nous deux n'ose prendre la parole. Je suis gêné, je ne sais quoi dire, je me sens tellement coupable.

 

 Je suis désolée, m'excusé-je en m’asseyant dans la chaise à côté du lit.

 

 Tu n'as rien à te reprocher, dit-elle en secouant la tête. C'est de ma faute. 

 

 Tu as mal ? 

 

 Ça va, les anti-douleurs aident, répond-elle en détourner les yeux.

 

 Tu restes combien de temps ici ?

 

 Je sors dans deux jours, si tout va bien. Mais il n'y a pas de raison. Et après, c'est deux à trois mois d'arrêt avec immobilisation de la jambe et du bras suivis de long mois de rééducation. Je n'ai pas à me plaindre, cela aurait pu être pire.

 

Depuis tout à l'heure, elle évite mon regard. Se sent-elle gênée par notre conversation restée inachevée par sa fuite ?

 

 Tu sais, ce qui tu as dit hier est faux. Je ne pense pas qu'à Umé, mais je culpabilise énormément. Je ne peux m'empêcher de me sentir coupable de son état. Par contre, hier lorsque cette voiture t'a percuté, j'ai cru que mon cœur avait arrêté de battre. J'ai vraiment eu très peur de te perdre, j'ai attendu des heures dans le couloir avant d'avoir enfin de tes nouvelles. C'est vrai que j'ai pensé que tu étais Umé parce que tu as endossé son identité, mais ce n'est pas avec elle que je passais mes soirées. Ce n'est pas elle qui me rendait heureux. Ce n'est pas avec elle que j'ai passé de super moment. Et ce n'est pas d'elle que j'ai commencé à tomber amoureux, soufflé-je.

 

Sakura relève la tête et enfin, je croise son magnifique regard émeraude. Je la vois émue, ses yeux larmoyant brillent et sa bouche est légèrement entre ouverte. Je me lève de la chaise pour m’asseoir avec précaution au bord du lit. Je prends sa main libre et la serre chaleureusement entre les miennes. Des larmes coulent maintenant le long de ses joues.

 

 C'est toi, Sakura. Toi qui fait battre mon cœur et qui me retourne le cerveau. C'est avec toi que j'ai envie de passer mon temps libre et mes soirées. C'est encore toi que j'ai envie de retrouver sous les draps et de serrer dans mes bras.

 

— Je ne suis pas sa remplaçante ? sanglote-t-elle.

 

La tristesse que je lis sur son joli visage tuméfié me fend le cœur.

 

 Absolument pas. Vous avez beaucoup de différences, j'avais mis ça sur le changement de ces dix dernières années, mais je me trompais. Vous avez des personnalités différentes et en te regardant bien, vous n'avez pas tout à fait le même visage. Je n'avais jamais remarqué ce grain de beauté sexy dans le creux de ton cou avant hier, dis-je en l’effleurant du bout des doigts. Tes magnifiques pilules vertes sont légèrement plus foncées et ton nez, un peu plus petit. Vous ne dégagez pas la même chose, vous êtes peut-être jumelles, mais vous êtes vous. Tu es Sakura, mon rayon de soleil rose bonbon, souris-je en lui replaçant une mèche derrière son oreille.

 

Je me penche délicatement vers son visage, elle ferme les yeux et je l'imite avant de lui déposer un doux baiser sur les lèvres. Elle y répond timidement. On s'embrasse pendant plusieurs secondes, avant de se séparer.

 

 Si tu veux bien, j'aimerais venir te chercher à ta sortie de l’hôpital et resté chez toi quelque temps. Tu ne peux pas rester seule, ce n'est pas prudent et je serais plus rassuré d'être à tes côtés.

 

Un sourire se dessine sur ses lèvres, enfin, cela m'avait manqué. J'aime la voir heureuse. 

 

 Avec plaisir. Les escaliers ne vont pas être une partie de plaisir avec les béquilles, j’espère que tu ne seras pas trop pressé.

 

 Je te porterais, assuré-je.

 

 Tu sais que j'ai pris des kilos en plus avec mon plâtre à la jambe ? Tu ne le vois pas, mais il va jusqu'en haut de ma cuisse.

 

 Tu crois que j'ai des abdos en béton et des muscles saillants pour faire jolis ? Faut bien qu'ils servent à quelques choses, ris-je.

 

 Oh, je pensais que c'était seulement pour le plaisir de mes yeux, plaisante Sakura.

 

Je passe ma pause de midi aux côtés de Sakura et repars vers treize heures trente. Je serais bien encore resté, mais il faut bien que je mange un petit truc avant de retourner au cabinet car j'ai malheureusement des rendez-vous. Je repasserais la voir après le boulot.

 

 

***

 

Cela fait maintenant plus d'un mois que je vis chez Sakura et tout se passe pour le mieux. Elle n'a quasiment plus de bleus sur le visage, seuls son bras et sa jambe immobilisés, indiquent qu'elle a eu un accident. Il est vingt heures lorsque je rejoins ma petite amie dans le salon après avoir fait la vaisselle. Oui, nous avons officialisé la chose lors de son retour à l'appartement, lorsque je lui ai demandé si elle voulait sortir avec moi. C'est un peu vieux jeu, mais j'aime que les choses soient claires. Je peux enfin dire qu'elle est ma copine et le mettre dans les dents de sa mère lorsqu'elle me reproche de fréquenter sa fille.

 

 Je vais finir par acheter un lave-vaisselle, je n'en peux plus de la faire à la main, me plains-je en m'affalant dans le canapé.

 

 Il n'y a pas la place dans la cuisine, informe Sakura.

 

 Fais chier... Ils ne devraient pas tarder, pas trop stressée ?

 

 Si, soupire-t-elle. J'espère arriver enfin à les convaincre et qu'ils ne vont pas me détester, surtout maman...

 

Ses parents doivent arriver d'une minute à l'autre pour discuter du cas d'Umé. Sa mère a d'abord refusé, puis à fini par céder sous les appels journaliers de Sakura. Je ne voulais pas être présent, car je pensais ne pas avoir ma place, mais ma copine a insisté pour que je sois présent et que je la soutienne. 

 

La sonnerie retenti et je me lève pour aller ouvrir. Je jubile intérieurement lorsque le visage de Madame Haruno se décompose en me voyant.

 

 Tu es là, toi ? grimace-t-elle de dégoût.

 

 Oui et pour longtemps. Habituez-vous à mon aimable compagnie, belle maman, la taquiné-je avec un grand sourire.

 

Elle me pousse d'un coup d'épaule et pénètre dans l'appartement, son mari me salue d'un geste de la tête avant de la suivre. Je les rejoins au salon et m'assois aux côtés de ma petite amie. Je lui prends la main et la serre doucement pour lui signaler que je suis là, pour elle.

 

C'est parti, la réunion va pouvoir commencé, sortez le pop-corn.

 

 Vous voulez boire quelque chose ? propose gentiment cette dernière.

 

 Allons droit au but. De quoi voulais-tu parler ?

 

Sakura prend une grande inspiration avant de se lancer et de lâcher la bombe.

 

 J'aimerais qu'on débranche Umé pour qu'elle puisse enfin reposer en paix, se risque-t-elle d'une traite.

 

 Quoi ?! Tu as perdu la tête ? aboie sa mère. On en a déjà discuté il y a plus d'un an, pourquoi tu remets ça sur le tapis !

 

Son père pour le moment reste silencieux et observe la scène, je fais de même.

 

 Maman, cela fait dix ans qu'elle est allongée dans un lit, branchée à des machines ! Les battements de son cœur sont mécaniqueset sa respiration artificielle. Son cerveau est mort. Comment oses-tu dire qu'elle est encore en vie dans ces conditions, s'insurge Sakura.

 

 Tu ne comprends pas que je ne peux pas laisser partir ma fille ! cri sa mère. Tu n'as donc pas de cœur !

 

 Arrête de ne penser qu'à toi, mets-toi deux secondes à sa place ! s'énerve Sakura. Tu crois que c'est ce qu'elle aurait voulu ? Intubé depuis presque une décennie, une poche qu'on lui change tous les jours, la toilette quotidienne et j'en passe. Tout ça en étant inconsciente. Tu la maintiens en vie pour quoi, exactement ? Laisse là partir, je t'en supplie ! Tu nous empêcher tous d'aller de l'avant, tu ne t'en rends pas compte. Il n'y a pas que ta petite personne qui compte.

 

 Comment oses-tu ?! s'offusque-t-elle.

 

 Maman, je m'occupe d'elle tous les jours, depuis six ans, gémi-telle les larmes aux yeux. Ça ne fait pas partie de mon boulot d'infirmière de lui faire la toilette et j'en passe, mais je l'ai toujours fait, car je ne voyais pas quelqu'un d'autre s'en occuper. J'ai respecté ton choix de la maintenir en vie jusqu'à aujourd'hui, mais je ne peux plus le faire. C’est fini, je ne serais plus son infirmière personnelle même lorsque je serais remise. 

 

 Tu abandonnes ta sœur maintenant ?! hurle-t-elle les yeux révulsés. Petite égoïste ! 

 

 Tu es gonflée de me dire ça ! J'ai vécu jusqu'à aujourd'hui pour Umé, mais c'est terminé. Il est temps que je vive ma vie et que j'arrête de me faire du mal. J'ai le droit d'être heureuse.

 

— Il n'en est pas question ! rétorque sa mère en se levant d'un bond.

 

 Rassieds-toi chérie, intervint Monsieur Haruno. Sakura à raison. 

 

 Pardon ?! s'étrangle sa femme.

 

 Je suis désolé pour ce que nous t'avons fais vivre Sakura. Je n'aurais jamais dû laisser ta mère te demander de t'occuper de ta sœur et te laisser le faire. Je reconnais que la situation est malsaine et difficile pour toi. Je pense que tu as raison, il est temps de la laisser partir. Umé n'aurait jamais voulu ça et cela dur depuis déjà bien trop longtemps... Nous parlerons en bientôt aux médecins.

 

 Non, hurle Madame Haruno. Tu ne peux pas me faire ça, c'est ma fille, mon bébé... Qu'est-ce que je vais devenir sans elle ?!

 

— Tu n'as pas qu'une seule fille, Mebuki ! Il est temps que tu reprennes tes esprits, gronde gentiment son mari. Sakura, laisse un peu de temps à ta mère, qu'elle puisse faire ses adieux. Je m'occupe de lui faire entendre raison. Je sais qu'elle t'a dit beaucoup de choses inacceptables, mais je te demande de la pardonner, s'il te plaît. 

 

Sakura hoche la tête, mais reste silencieuse. Sa mère, quant à elle est en pleure, j’éprouve presque de la peine pour elle. Son mari pose délicatement sa main sur son épaule en guise de réconfort.

 

— Nous allons y aller. Bonne soirée à vous deux.

 

Il aide sa femme à se lever et nous salut avant se diriger vers l'entrée. Quelques secondes plus tard, on entend la porte claquée. Sakura se tourne vers moi, des larmes coulent le long de ses joues.

 

 J'ai l'impression d'être un monstre de vouloir la laisser partir, sanglote-t-elle.

 

Je la tire dans mes bras et l'enlace. Je lui caresse doucement le dos en lui déposant un baiser sur le sommet de son crâne.

 

 Tu n'es pas un monstre Sakura. Tu es courageuse et tu te soucies du bien être de ta sœur. Comme tu l'as dit à tes parents, ce n'est pas une vie...

 

Elle sanglote de longues minutes dans mes bras avant de s'endormir de fatigue. La pauvre, elle n'a pas réussi à trouver le sommeil la vieille tellement elle appréhendais cette discussion. Je la porte délicatement jusqu'à la chambre en faisant attention à son bras et sa jambe plâtrée. Je la dépose avec beaucoup de précaution sur le lit et la met sous les draps. Elle ouvre les paupières et son regard se plonge dans le mien.

 

 Merci. D'avoir été là, souffle-telle avant de replonger dans les bras de Morphée.

 

 C'est normal. Je serais toujours là, chuchoté-je avant de déposer un baiser sur son front.

 

 

***

 

Deux mois plus tard, nous avons assisté aux funérailles d'Umé. Sa mère a finalement accepté de laisser partir sa fille après de longues discussions avec son mari. Elle a également autorisé ma présence à son enterrement, pour Sakura. Cela a été dur pour tout le monde, il y a a eu beaucoup de pleurs. J'ai ressenti un petit pincement au cœur lorsque le cercueil a été refermé, c'était une partie de mon passé que je laissais derrière moi. Les jours suivants ont été très difficiles pour mon soleil rose qui n'a sourit que très rarement. L'absence et la disparition de sa sœur ont été un crève-cœur. Après tout, elle s'est occupée de sa jumelle pendant six ans, j'imagine à quel point cela doit être dur pour elle. C'est seulement depuis l'enterrement que Sakura a commencé à faire son deuil. Les semaines ont été dures pour elle. Elle a d’abord dû accepté la mort de sa sœur et arrêter de culpabiliser d'avoir été l’élément déclencheur de sa disparition. J'ai toujours été là et je l'ai soutenu. Elle a pleuré de nombreux soirs dans mes bras. "Le plus dur, c'est le soir. Lorsque je ferme les yeux, je la revois, allongée sur son lit. Ça me hante" disait-elle.

 

Elle a plusieurs fois failli replonger dans les anxiolytiques et anti-dépresseurs pour soulager sa douleur, mais je l'en ai dissuadé. Avec mon aideet du temps, elle a fini par aller mieux et à retrouver doucement le sourire. "C'est toujours douloureux, mais je sais qu'elle est mieux là-bas. Je me dis qu'on a fait le bon choix et qu'elle repose enfin en paix"

 

 

A partir de nos six mois, nous avons décidé de chercher un appartement pour emménager ensemble. La relation avec sa mère s'est améliorée petit à petit. Je ne sais pas si c'est le fait d'avoir perdue Umé mais elle s'est enfin rendu compte qu'elle avait une autre fille. Elle n'est plus aussi méchante et cassante avec Sakura. Quant à moi, on dira qu'on se supporte. Je crois même qu'elle aime autant que moi, nos petites piques réciproques. Entre nous, on peut dire que c'est l'amour vache.

 

Un an plus tard, la nouvelle tombe. Je suis en train de jouer à Fifa sur le canapé avec Naruto lorsque Sakura m'annonce qu'elle est enceinte. Nous avions décidé l'arrêt de la pilule un mois plus tôt, mais je ne pensais pas que la mayonnaise prendrait aussi rapidement. Mes spermatozoïdes sont des durs à cuir, des guerriers qui ont réussi à conquérir l'ovaire sacré.

 

J'ai d'abord été surpris par le choc de devenir soudainement papa avant de me lever pour prendre la future maman dans les bras. Nous allions avoir un enfant, tous les deux. Sakura avait le sourire aux lèvres et elle était radieuse. Elle était heureuse et moi aussi. Nous nous étions rencontré dans d'étranges circonstances avec un passé en commun difficile, mais aujourd'hui, nous formions un couple soudé. L'amour qu'il y avait entre nous était sincère et fort, ce qui allait bientôt donner naissance au fruit de notre amour, notre enfant.

 

Ses parents ont été ravie lorsque nous leur avons annoncé la nouvelle. Sa mère se réjouissait d'être mamie, elle était aux anges. Bien sûr, j'ai eu le droit à quelques piques. "J'espère qu'il sera plus sage et plus beau que son père" ou encore "Pourvu que cet enfant tienne de sa mère". Je lui ai répondu en lui disant que moi, je croisais les doigts pour qu'il ne soit pas aussi casse pied que sa grand-mère.

 

En ce qui concerne le prénom, cela été compliqué. Sakura voulait quelque chose en rapport avec sa jumelle, une sorte d'hommage et je n'étais pas contre. Seulement, nous n'avions pas d'idée. Nous ne souhaitions pas donner le même prénom non plus, cela aurait été un peu glauque. 

 

Un matin, il m'est venu une idée. Je l'ai alors exposé à Sakura. Yume. On y retrouvait une trace d'Umé lorsque nous l'écrivions en romaji*. Cela se traduit "rêve". Et j'avais l'impression de vivre un rêve éveillé depuis que j'avais rencontré mon soleil rose-bonbon. Elle ne sait pas encore, mais j'ai prévu de la demander prochainement en mariage. J'aimerais qu'elle ne s'appelle plus Haruno, mais qu'elle porte le nom Uchiwa, comme moi. Je veux qu'elle soit ma femme et qu'elle ait le même patronyme que notre enfant.

 

Je remercie Umé d'avoir mis sur mon chemin sa jumelle, sans elle et les événements qui se sont produits, je ne sais pas si nous nous serions rencontré. Aujourd'hui et pour le reste de mes jours, je vivrais avec le poids de sa mort. C'est mon erreur et j'accepte de la porter. Pour me faire pardonner, je compte bien rendre heureuse sa sœur et ses futurs nièces et neveux. Tous les ans, nous nous rendons deux fois sur sa tombe. A la date de l'accident et à celui de son enterrement. Sakura verse toujours quelques larmes lorsque nous nous recueillons, mais cela n'est plus aussi douloureux. Le temps fini par apaiser la souffrance et on apprend à vivre comme je le fais.

 

 

 

 

 

*romaji : Le terme rōmaji désigne les caractères de l'alphabet latin utilisés dans le cadre de l'écriture japonaise. ICi : 

= Yume (en romaji) = rêve

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Écrire commentaire

Commentaires: 1
  • #1

    Naa-san (mardi, 09 juin 2020 15:12)

    Coucou Darling !

    Me revoilà pour te laisser une review sur ce One-Shot bien long et appréciable !

    J'ai beaucoup aimé la relation naissante entre Sasuke et Sakura dans cette histoire. C'est pour ça que ce One-Shot est particulièrement long d'ailleurs. Il nous raconte l'évolution de leurs sentiments complexes depuis leur première rencontre jusqu'à la naissance du fruit de leur amour. Les mettre en scène plus âgés de ce qu'on a l'habitude de lire apporte une dimension tout autre à leur liaison. Ils ont chacun du vécu et quand ils se rendent compte qu'ils sont en train de tomber amoureux, l'âge fait qu'ils ont envie de construire une famille et un foyer rapidement. Je trouve ça intéressant et crédible, c'est ça qui est important.

    Quant à l'histoire d'une jumelle en état de mort cérébrale uniquement maintenue à la vie depuis dix longues années via un respirateur, tu abordes là un sujet ô combien sensible. Cet accident et ses conséquences auront changé plus d'une vie, on l'aura compris. Sasuke vit avec la culpabilité d'avoir tué à sa petite amie de l'époque et Sakura survit au sein d'une famille refusant de faire leur deuil. Le côté malsain du prendre soin de sa soeur jumelle et le jeu dangereux qu'elle entame en se faisant passer pour elle lorsqu'elle rencontre celui à l'origine de tout ce merdier nous mettent en haleine tout le long du récit. D'abord méfiante envers le jeune médecin, la belle rose va vite briser la carapace qu'elle s'était forgée depuis une décennie. Au final, celui qui lui aura enlevé sa soeur la sauvera des ténèbres de l'angoisse et de sa relation maternelle toxique. Quelle chute !

    Les nombreux instants comiques dus à la maladresse des deux protagonistes ainsi que les subtils moments liés au sexe disséminés dans le One-Shot apportent quelque chose de croustillant je trouve et ce n'est pas pour me déplaire !

    Quelques fautes de frappe et parfois d'accords sont malgré tout dispersés dans tes phrases. Fais-y attention ;)

    Merci pour le partage de cette belle histoire !

    Gros bisous !